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Une opportunité de fédérer le secteur et de réinventer le tourisme de demain. Entretien entre Vanguélis Panayotis, CEO MKG Consulting et Franck Gervais, Directeur Général Europe Accor.

A titre personnel, tout va bien. Je crois que c’est l’essentiel dans cette période-là. Nous sommes dans une période inconnue et que personne n’avait prévu. Nous sommes heureux de voir la lumière au bout du tunnel et de pouvoir se projeter un petit plus.

Oui, il faut s’adapter un contexte inédit. Nous avons publié en collaboration avec Hospitality ON, une analyse sur le poids des groupes hôtelier en fonction de leur EBITDA et de leur valeur d’entreprise. Évidemment, le nombre de chambres est important mais la puissance financière est essentielle. De ce fait, comment décrirais-tu le rôle structurant d’Accor dans notre secteur ?

Le leadership d’Accor, nous l’avons exercé sur deux sujets clés. Des sujets clés sur lesquels nous ne nous sommes pas contentés te dire « c’est Accor qui fait ça » mais « c’est Accor en lien avec d’autres ou bien pour d’autres. »

Le premier cas, c’est toutes les actions de solidarité afin d’aider tout ceux qui était en première ligne durant ce combat contre le virus. C’est d’abord pouvoir loger le personnel soignant dans nos hôtels (...) Toujours sur ce premier volet, le fait de loger des personnes sans-abri mais aussi des personnes battues ou les populations qui continuent de travailler.

Le premier volet, c’est solidarité et utilité pendant la crise et puis progressivement pour en sortir. Nous proposons quelques hôtels pour le déconfinement. Nous logeons des patients porteurs Covid+, ce qu’on appelle asymptomatique (...) Par exemple, Accor a une charte d’accueil des populations sans abris et nous avons été ravi de la partager avec toute la profession.

Le deuxième volet, c’est vraiment sur la sortie du confinement et la reprise progressive du business. D’abord des hôtels et ensuite des cafés et des restaurants. Il faut rappeler que les hôtels en France ne sont pas administrativement fermés. Ils sont fermés de faite que les gens ne peuvent pas se déplacer.

Nous avons joué notre rôle de leader pour écrire un protocole, un engagement, une charte sanitaire, qui dit « voilà dans quelles conditions cher client, chers employés, Messieurs les ministres, Commissaire au confinement et Monsieur le Président de la République, ce secteur est prêt à rebondir. »

Évidemment, il y a le port obligatoire des masques et de la charlotte dans les cuisines pour tous les préparateurs. Évidemment, nous servirons au restaurant avec des gants et évidemment, nous accueillons dans les hôtels avec un masque. Mais cela ne va pas durer et sera revu au fur et à mesure de la doctrine sanitaire de chacun des gouvernements.

Plutôt que chacun aille proposer son mode opérationnel pour sa branche, ses marques et son secteur, nous avons pris la main pour comprendre comment nous pouvions nous réunir. Je crois que nous pouvons écrire un feuillet sur comment en 72 heures nous avons réussi avec tous les indépendants et les représentants des chaînes, à nous aligner afin de sortir un même protocole. Il n’y a pas eu de fausse note, tout le monde y est allé à l’unisson. Cela donne des idées pour la suite.

Quelles sont vos relations avec vos autres partenaires ? 

C’est aux principaux intéressés qu’il faut demander. C’est aux partenaires et aux propriétaires de répondre. J’ai l’impression que nous n’avons jamais été aussi proches, aussi soudés et aussi unis. Nous avons été plus à l’écoute et plus sensible. Le groupe Accor, sans ses 400 partenaires franchisés en France, il n’est rien. C’est autant de cas individuel qu’il faut considérer, qu’il faut valoriser, qu’il faut protéger et qu’il faut soutenir.

C’est ce que nous avons fait dans notre discussion avec le gouvernement. Nous nous sommes fait porte-parole de tous nos partenaires. Et je crois que les relations sont très bonnes. Il y a de l’écoute, de la compréhension, du respect et de la confiance. Je crois que tous les ingrédients sont là et tant mieux. Le fait de parler certaines incompréhensions nous a permis de nous rapprocher. C’est de très bon augure.

Selon toi, quelles vont être les grandes tendances de demain ?

Cette pandémie, ce premier semestre 2020, va marquer un tournant en particulier dans l’histoire du tourisme. Tout le monde ressentait que nous étions en train de vivre les dernières heures, semaine et mois de ce mode de consommation. Il n’y avait plus de limite. Nous sentions qu’un moment donné l’élastique, à force de tirer dessus, allait rompre.

Concentrer autant de population pendant une même période sur un même endroit, ce n’était pas durable. Effectivement, ce n’est pas responsable. Le tourisme va devenir responsable. Il va s’assurer de la bonne cohésion, de la bonne communion et du bon respect autant pour les visiteurs que pour les locaux. Ils ne pourront plus se faire opposition. 

Je ne juge pas, mais ce n’est pas normal que nous avons des maires de grandes villes comme Barcelone, Amsterdam, Dubrovnik ou même Paris, qui parle du tourisme dans des termes, pas forcément négatif, mais comme si cela avait trop duré. Nous sommes allés trop loin.

Il faut que le tourisme soit plus authentique, plus respectable et beaucoup plus local. Il faut que nos hôtels soient des lieux où les habitants puisse rencontrer des visiteurs et des touristes. Et qu’il n’y a pas cet anonymat, où le client n’a pas eu ce contact avec la population locale. Peut-être que ce seront des séjours plus longs, moins lointains, moins nombreux. Il faudra en passer par là. C’est une conviction.

Nous sommes en train de nous poser la question de comment notre secteur va s’inscrire dans la durée ? Cela incite à revoir tout ce que nous proposions. Est-ce que les marques sont cohérentes entre ce qu’elle dit est ce qu’elles sont ? Est-ce que les marques sont cohérentes entre les messages donnés aux clients et la façon dont elles entretiennent la relation avec leurs employées ? Est-ce qu’on donne aux employés toutes les chances de formation ou de développement ? Est-ce qu’il y a un dialogue constructif avec le client ? Est-ce que nous sommes un acteur qui est responsable de A à Z ?

Je suis convaincu que c’est ce que recherche de plus en plus les clients, mais aussi les employés. Nous allons pouvoir distinguer les personnes qui sont authentiques et ceux qui sont plus surfacique et artificiel. Je pense qu’un des bénéfices de cette crise, c’est qu’il va y avoir un tri entre le bon grain et le mauvais grain.

Est-ce le moment de réinventer ou de réadapter nos concepts ? Est-ce qu’il n’y a pas des opportunités pour lancer de nouvelles marques ?

Oui, il y a des opportunités pour lancer des choses autour de cette âme et de ces rencontres. Nous créons, enfin de compte, des rencontres et des découvertes. Les clients sortent de chez nous avec au moins deux choses : le sourire et en ayant appris quelque chose.

Je pense à nos marques lifestyle telles que Mama Shelter, Tribe ou Great, qui tournent autour de la rencontre et de l’authenticité. Mais aussi à nos marques cœur qui doivent conserver une empreinte, un message, une consistance globale avec un ancrage local plus important.

C’est le cas d’un ibis qui est ouvert, mais a qui et a quoi ? Il est ouvert aux talents qui autour de l’hôtel ont envie de venir chanter ou donner des cours. Il est également ouvert aux talents internes de l’hôtel qui peuvent délivrer leurs passions. C’est se dire « voilà, ce que propose ce soir à 18h, un des clients de l’hôtel, parce qu’il a cette passion ou qu’il venait pour l’exercer ». C’est avoir beaucoup plus d’expression naturelle et cela se fait au travers des personnalités et des individualités. Je pense que nous avons une belle occasion de réinventer tout ce qui est autour du co, tel que le coworking ou le coliving. C’est une vie autour du partage qu’il va falloir qu’on pousse tout en prenant plusieurs précautions de distanciation. Il faut savoir les marier ensemble.

La distanciation sociale en termes de sémantique est très pénalisante. Cela serait bien que la profession se fédère sur un terrain qui soit plus la distanciation physique.

La distanciation physique ne doit obérer en rien la distanciation sociale. Ce sont des nouvelles règles du bien vivre ensemble, où le social aura tout son rôle. Nous pouvons faire plein de choses avec 1m de distance et puis progressivement avec des vaccins et des protections, tout va lever. Si tu en es d’accord, nous pouvons bannir ce terme de distanciation sociale.

Au fil des entretiens avec tous les acteurs du secteur, je ne peux qu’observer que tout le monde reste positif dans une situation aussi difficile. Nous sommes un des secteurs les plus touchés mais tout le monde se fédèrent pour faire battre passion est le cœur de ce métier. Je vous félicite.

C’est l’âme qui s’exprime. La volonté de donner et d’exprimer le fait que l’autre se porte mieux. Je connais peu de secteur qui fassent environ 10 % de leur business et qui s’exprime avec toujours autant d’enthousiasme et de générosité. Cela montre que l’homme n’a pas été cassé par cette crise et qu’il en ressortira de plus belle. J’en suis convaincu.

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