Une analyse et des données MKG Consulting. A l’approche de la fin août, l’hôtellerie française tire son premier bilan1 de l’été 2023 : si le pouvoir d’achat des français en baisse, les fortes chaleurs, les craintes du surtourisme ou les reports vers d’autres formes d’hébergement ont contribué à faire reculer le taux d’occupation (-2,2 pts par rapport à l’été 2022), les chiffres d’affaires ont légèrement progressé (+1,7%) grâce à une hausse des prix de +4,8%. Mais localement, les dynamiques ont changé : le retour des clientèles étrangères dans certaines destinations, la volonté de nombreux français de voyager « local » et/ou moins cher, et de nouvelles habitudes tant de destinations que de calendrier ont eu tendance à faire évoluer les schémas habituels des vacances.
Une fréquentation en léger recul sur le littoral...
Sur l’ensemble de l’été, l’hôtellerie française enregistre un recul de 2,2 points de taux d’occupation relativement à l’été dernier, bien que le niveau reste bon (71,3%). Mais cette perte d’activité est toutefois relative puisque le Revenu par Chambre s’établit, à l’échelle nationale, à presque 90€ HT soit +1,7% de plus que l’année dernière sur la même période et +21,9% par rapport à 2019.
Parmi les grandes zones du territoire, le littoral enregistre la plus forte baisse de fréquentation avec 3,5 points de baisse de taux d’occupation par rapport à l’an passé. En Ile-de-France hors Paris, la baisse est plus modérée avec seulement 0,6 point de moins.
... Mais une hausse du prix moyen généralisée (+4,8%)
Malgré ce léger repli de fréquentation à l’échelle nationale, le RevPAR parvient en effet à être meilleur qu’en 2019 grâce à des prix moyens supérieurs de 4,8% à l’an passé, et qui ont explosé depuis 2019 (+28,2%), sous l’effet des conséquences de la crise sanitaire puis de l’inflation.
Cette hausse des prix permet notamment à Paris (+3,2%), à l’Ile-de-France hors Paris (+9,3%) mais aussi à des zones intérieures en Régions (+0,4%) d’afficher des niveaux de RevPAR supérieurs à l’an passé.
Des touristes qui modifient leurs habitudes de séjours ?
Géographiquement, le littoral et la Corse d’ordinaire très attrayants ont vu leur fréquentation s’éloigner des niveaux pré- COVID et de l’année dernière (respectivement -3,5 points et -6,5 points de TO), tandis que des régions plus au nord ou de l’intérieur à l’instar de l’Ile-de-France hors Paris (-0,6 point / 2022), du Grand-Est (-1,3 point) ou des Hauts de France (-2 points) enregistrent des baisses nettement plus modérées.
La capitale n’a pas été laissée de côté. Paris enregistre certes un léger recul de fréquentation hôtelière aussi bien par rapport à l’an passé (-2,3 points) que par rapport à l’année pré-covid (-2,0 points) mais ses prix moyens ayant explosé (+40,7% vs 2019), le RevPAR y enregistre une croissance de +37% par rapport à 2019 ! A noter qu’en juillet, près de 9,8 millions de passagers auraient transité par les aéroports parisiens, enregistrant une hausse de 7,5 % par rapport à 2022, confirmant le retour des clientèles étrangères qui ont soutenu l’activité.
A l’inverse, les touristes notamment français ont délaissé une bonne partie du littoral et certaines côtes subissent une forme de désaffection relativement à l’an passé, telle que la Manche (-6,1 points de TO).
C’est à l’inverse la montagne qui gagne en 2023, avec de fortes progressions d’activité non seulement dans les destinations « phares » traditionnelles telles que les Alpes du Nord (+13,2% de chiffre d’affaires par rapport à l’été 2022), mais aussi sur les autres massifs tels que les Pyrénées (+7%) ou la Moyenne Montagne (Jura, Vosges, Massif Central : +7,7%). La montagne et le rural proposant un bon rapport qualité-prix et la promesse d’éviter la canicule ou autres pics de chaleur.
Cette baisse de fréquentation sur les côtes françaises est moins marquée sur le Littoral Atlantique et notamment la partie Sud qui est un des rares littoraux a avoir vu sa fréquentation augmenter (+1,2 point) par rapport à l’an passé, qui avait été marqué par d’importants incendies.
Tandis que l’Ile-de-France tire son épingle du jeu grâce aux clientèles internationales, en régions le bilan est plus contrasté. Seules 4 régions (Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté) signent une progression de chiffre d’affaires par rapport à l’été 2022, 3 (Bretagne, Pays de la Loire et Centre-Val de Loire) sont quasi stables, et 5 sont en recul.
Le plus gros « choc » est observé en Corse où la fréquentation plonge (-6,5 points de TO vs l’été 2022) et où même les prix moyens ont baissé (-1,2%) entrainant une perte d’activité significative (-9% de RevPAR vs 2022). Si la baisse de pouvoir d’achat des français et l’explosion des logements alternatifs (meublés et résidences secondaires) expliquent une partie de cette baisse de fréquentation, tout le secteur touristique subit cette perte d’activité, y compris les transports et notamment les aéroports de l’île qui enregistrent une baisse de 5% entre 2022 et 2023. L’Ile de Beauté, comme d’autres destinations littorales traditionnelles, semble cette année avoir souffert du cocktail hausse des prix, concurrence à l’hôtellerie classique, surtourisme et réchauffement climatique.
De son côté, la région Sud qui a également enregistré un repli de 3,6 points de taux d’occupation cet été relativement à la même période l’an passé parvient tout de même à maintenir sa place de « leader » de la reprise relativement à l’avant- COVID avec une croissance de RevPAR qui s’établit à plus de 30% par rapport à 2019, malgré donc le repli de cet été (-1,3% / été 2022). Mais on y constate un rééquilibrage avec une baisse d’activité au mois d’août (sur les 3 premières semaines) tandis que le mois de juillet a été aussi bon que l’an dernier.
Vers une après-saison meilleure ?
Outre les modifications de la carte du tourisme, ce sont en effet plus largement les habitudes des touristes qui semblent bien évoluer.
En raison d’un coût des vacances en hausse, des fortes chaleurs et du surtourisme, ceux qui le peuvent semblent avoir reporté leur départ, notamment pour partir hors haute saison – une manière d’expliquer le léger recul de fréquentation en août, tandis que juillet s’est maintenu et que les réservations progressent pour septembre, après un mois de juin qui avait été excellent (+2 points de taux d’occupation par rapport à juin 2022, +21% de chiffre d’affaires).
Ce report de certains vacanciers vers les ailes de saison pourrait bien, couplé à l’organisation de la Coupe du Monde de Rugby qui s’étalera du vendredi 8 septembre au samedi 28 octobre 2023 dans les villes de Saint-Denis, Toulouse, Nice, Marseille, Bordeaux, Nantes, Lille, Lyon et Saint-Etienne, dynamiser les performances hôtelières à la rentrée.
Toujours afin de se prémunir contre des hausses tarifaires, les vacanciers ont aussi ajusté leurs comportements. Certains partent moins longtemps, par exemple 2 semaines au lieu de 3, d’autres ont repris leurs habitudes de réservation en « anticipé ». Ainsi, à la mi-août les taux de réservation pour septembre s’établissaient déjà à 41,6% à l’échelle de la France contre seulement 35% à la même période l’an dernier.
Enfin, la reprise du voyage international a soutenu les arrivées de clientèles étrangères dans l’Hexagone mais aussi dans l’autre sens les départs des Français vers d’autres destinations.
Vanguelis Panayotis, CEO MKG Consulting, a ainsi déclaré « Le prix moyen a permis aux professionnels du secteur de réaliser un été record en termes de chiffre d’affaires. Cependant, concernant la demande, c’est à dire la fréquentation, on sent qu’on a touché un palier de ce que les clients sont prêts à dépenser.
En termes de perspectives, malgré un environnement incertain au niveau économique, la France bénéficiera d’un calendrier très favorable avec dès septembre la coupe du monde de Rugby et dans moins d’un an des JO qui s’annoncent déjà porteurs pour les destinations concernées.
Avec cet été des contrastes, mais un niveau d’activité qui reste élevé, on peut dire qu’on a tourné la page du rebond post covid pour rentrer dans un nouveau cycle d’activité pour le secteur. »
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