Stéphane Frantz di Rippel - Exemplaire jusqu'au bout

Stéphane était arrivé en décembre 2010 à Abidjan, dans une période qui s’annonçait troublée mais pas au point d’en perdre la vie. La rédaction d’Hôtel Restau Hebdo et d'Hospitality ON s’associe naturellement à la peine de sa famille et de ses collègues.-* 1985 : Diplômé du lycée hôtelier de Dinard -* 1985 : Réceptionniste au Novotel Rennes Alma -* 1990 : Responsable commerciale du Thalazur Antibes -* 1992 : Directeur-Adjoint Novotel Genève Aéroport à Ferney-Voltaire -* 1995 : Directeur général du Novotel Saint-Etienne -* 2004 : Directeur général du Mercure Centre Colombiers de Rennes -* 2005 : Directeur général du Novotel et de l’Ibis de Cotonou - Bénin -* 2009 : Directeur général du Mercure Sarakawa de Lomé - Togo"Il n'y a pas de journalistes ici !», c’est par cette réponse courageuse que Stéphane Frantz di Rippel a tenu tête aux militaires de la faction du président déchu Laurent Gbagbo qui ont investi son hôtel le 4 avril dernier. Revenu depuis peu à Abidjan, après une première évacuation orchestrée par le groupe, le directeur général du Novotel, situé sur le Plateau, le quartier des affaires et de la vie politique de la capitale économique ivoirienne, a pris sur lui de protéger avant tout ses clients contre les menaces et les intimidations des militaires. La suite est un enchaînement terrible de lâcheté et de représailles. Enlevé en compagnie de Yves Lamblin, le président d’une grosse entreprise locale, qui a tenté de s’interposé, et de deux clients étrangers qui ont eu le malheur de se trouver dans le hall à cet instant, on perd la trace de Stéphane Frantz di Rippel pendant pratiquement deux mois. Même si l’espoir s’amenuisait au fil des semaines, sa compagne Karine, ses deux filles de 10 et 19 ans, leur mère, et son père, Jacques Frantz di Rippel, installé à Biot en Provence, voulaient croire encore à une bonne nouvelle. Ce ne sera malheureusement pas le cas et les autorités françaises ont confirmé le décès de Stéphane Frantz di Rippel, même s'il faut attendre une identification officielle des restes du corps retrouvé au bord de la lagune d’Abidjan. Le père du directeur du Novotel a dû annoncer cette terrible nouvelle à la famille réunie à Saint-Malo pour célébrer la communion de la plus jeune des filles de Stéphane.La vie se devait de continuer et la cérémonie avait été maintenue comme un acte symbolique d’espoir : “C’est comme cela que Stéphane aurait voulu que les choses se passent. C’était un fils extraordinaire. Juste avant d’être enlevé, et alors qu’il n’était de passage que quelques jours en France, il avait tenu à prendre l’avion jusqu’à Biot pour me voir. Il avait le cœur sur la main. Il aimait les gens. Et les gens l’aimaient. Tous ses employés disaient d’ailleurs de lui qu’il était un super-patron d’hôtel. Par malheur, il était là au mauvais endroit, au mauvais moment”, a confié son père effondré à la presse locale.?Je suis profondément bouleversé et choqué par ce meurtre révoltant. Mes pensées vont d’abord aux enfants, à la famille et aux proches de notre collaborateur. Le groupe s’attachera à leur apporter tout le soutien dont ils auront besoin dans ces moments douloureux. C’est un immense choc pour les collaborateurs du groupe, qui n’ont cessé d’envoyer des messages de soutien du monde entier depuis l’enlèvement”, a immédiatement déclaré en écho Denis Hennequin, président-directeur général du groupe Accor.Ainsi s’achève tragiquement une carrière promise pourtant à un bel avenir. Originaire de Saint-Malo, Stéphane Frantz di Rippel s’est toujours passionné pour l’hôtellerie et s’est toujours totalement engagé dans la vie locale, selon sa conception du rôle d’un hôtelier. A tout juste vingt ans, il sort du lycée hôtelier de Dinard avec son BEP et son BTH en poche et profite de la possibilité de partir deux mois au Novotel de Toronto pour parfaire son anglais et se familiariser avec les opérations hôtelières. Pour son premier poste en 1985, il restera dans sa région bretonne en travaillant à la réception et au service restauration du Novotel Rennes Alma. Assez vite tenté par les expériences internationales, il aura l’occasion d’une première incursion en Afrique en 1989 avec une mission d’accompagnement au Novotel de N’Djaména au Tchad. De retour en France, en 1990, il fera ses seules infidélités au groupe Accor sur la Côte d’Azur en travaillant six mois comme 1990 assistant chef de réception de l’hôtel Concorde Martinez à Cannes, puis pendant deux ans comme responsable commercial pour faire l’ouverture du Thalazur Antibes. Désireux de se perfectionner aux méthodes commerciales et marketing, il reprend ses études pendant deux ans en DESS à l’IAE d’Aix-en-Provence, en suivant les cours du professeur Pierre Eglier. Il se sent alors mieux armé pour reprendre son parcours au sein du groupe Accor, qu’il ne quittera plus. Nommé directeur adjoint du Novotel Genève Aéroport à Ferney-Voltaire. Au bout de trois ans, il décroche son premier poste de directeur au Novotel du Creusot Monchanin, première étape de quelques mois avant de prendre la responsabilité du Novotel Saint-Etienne pendant cinq ans. C’est là qu’il peut donner libre cours à sa passion pour le football. Quelques années plus tard, alors de nouveau en poste à Rennes, il ne pourra s’empêcher d’évoquer son long passage à Saint-Etienne : ?Je suis un passionné de football, et je supporte naturellement les «Rouge et Noir» de Rennes, mais quand ils sont face à l’AS Saint-Étienne, mon coeur balance car j’ai tellement aimé l’ambiance du stade Geoffroy Guichard”.Il quittera effectivement Saint-Etienne pour prendre la direction du Grand Mercure Président de Grenoble pendant plus de trois ans, pour revenir enfin dans sa terre natale, en Bretagne, à la tête du Mercure Centre Colombiers de Rennes. Ce sera son dernier poste en France, car l’opportunité se présente de repartir en Afrique, mais cette fois-ci pour diriger des hôtels. Il arrive au Bénin en novembre 2005 pour diriger le Novotel et l’Ibis de Cotonou. En 2009, il est nommé au Togo comme directeur général du Mercure Sarakawa de Lomé. Patron de la zone Afrique à l’époque Jean-Luc Motot se souvient d’un grand professionnel : “ses missions se sont toujours remarquablement bien passées car il avait pris la mesure des enjeux qui sont ceux d’un hôtelier en Afrique, où l’on a un rôle de manager, mais aussi un peu d’ambassadeur”.Stéphane Frantz di Rippel s’engage d’ailleurs dans la vie économique locale, nommé depuis 2008 comme Conseiller du Commerce Extérieur. Yann Caillère, directeur général délégué du groupe, qui a eu l’occasion de le rencontrer en poste à Cotonou, confirme l’opinion que tous ses patrons ont eu de lui : ?vraiment quelqu’un de très bien et très efficace, particulièrement apprécié de ses équipes. C’est ce qu’il y a de plus dur à vivre quand un tel événement dramatique se produit. C’est la première fois que le groupe le vit et je serai personnellement aux côtés des équipes d’Abidjan pour leur apporter notre soutien et relancer l’activité de nos hôtels. Pendant toute la période d’inquiétude à son sujet, nous avons reçu énormément de témoignages de solidarité de la part des membres du personnel”.