“Les investisseurs sont de plus en plus nombreux à accepter aujourd’hui de payer le coût d’une construction bas carbone”

8 min de lecture

Publié le 25/01/23 - Mis à jour le 25/01/23

Novotel Paris Belleville

Entretien avec Jean-Luc Guermonprez, directeur général adjoint pôle hôtellerie, Vinci Immobilier. Construire pour consommer moins c’est également une partie de la réponse à l’augmentation des coûts des énergies.

Un travail de longue date autour de l’impact carbone 

Vinci Immobilier a réalisé avec l’ADEME et le CSTB la première opération pilote HQE en 2005 pour le Novotel Montparnasse de 200 chambres. Lors de cette première opération, nous nous sommes aperçus que les hôteliers étaient plutôt vigilants sur leurs coûts énergétiques. Nous avions en effet dépensé plus de frais en études qu’en travaux pour améliorer le bâtiment afin d’obtenir une labellisation HQE. Cet hôtel a été pilote pour déployer le premier référentiel HQE en hôtellerie.

Depuis 2 ans, nous ne proposons plus d’opération sans une labellisation. C'est devenu une obligation sociétale pour Vinci Immobilier. C'est également devenu une obligation commerciale et sociétale pour nos partenaires qui dans le ranking des foncières doivent avoir un certain pourcentage de bâtiments labellisés. 

Pour favoriser la décarbonation des bâtiments, nous avons créé il y a 18 mois un cahier des charges de recommandations, spécifique à l’hôtellerie, à destination de nos partenaires dans l’acte de construire. Il a été conçu à l’attention des architectes, des bureaux d’études et de nos clients investisseurs ainsi que de leurs partenaires exploitants hôteliers. Cet outil n’a pas vocation à graver dans le marbre ce qu’il est possible de faire, il a été conçu comme un menu listant les actions que l’on peut déployer pour améliorer le bilan carbone d’un projet.

Des ambitions fortes pour être un acteur ayant un impact positif sur les territoires 

Dans la stratégie environnementale de Vinci Immobilier, nous nous sommes fixés comme objectif de faire 50% de notre activité en réhabilitation à échéance 2030 et de diminuer de 50% les émissions carbones sur la construction de nos bâtiments dans le même délai. Pour ce qui est de l’activité hôtellerie, nous nous sommes aperçus que nous étions largement en avance. Les exploitants nous y poussent pour avoir moins de dépenses énergétiques. Cela fait également plusieurs années que plus de la moitié de nos opérations sont des réhabilitations. En 2021 sur nos plus gros projets, nous avons livré à 4 réhabilitations sur 5 opérations. 

Pour les projets à venir, nous continuons sur cette dynamique avec par exemple des réhabilitations d’immeubles de bureaux ou d’immeubles appartenant à l’état et devenus obsolètes. Nous regardons également des projets de restructuration de friches industrielles. Bien que vieillissants, les actifs immobiliers vendus par les collectivités locales sont généralement bien placés ce qui induit les réflexions vers des projets hôteliers. 

La réhabilitation permet de diminuer l’impact carbone grâce à des délais de construction plus courts. Le fait de moins démolir cela signifie également utiliser moins de béton que dans une opération démolition/reconstruction. Pour une des dernières opérations que nous avons livrée, l’hôtel Léonor à Strasbourg, nous avons conservé 80 % des façades et sommes intervenus par contre sur la quasi-totalité des planchers. Nous avons également fait le choix de nous contenter des sous-sols existants, sans creuser, quitte à payer une taxe pour la non-création de places de parking. Nous avons également mis en place de la géothermie. Autant d’actions qui en font une opération exemplaire en termes de développement durable. Nous avons travaillé avec une exploitant hôtelier qui s’est montré très raisonnable dans son cahier des charges, avec par exemple des attentes en termes de climatisation qui nous ont permis d’éviter le suréquipement. 

Globalement, les hôtels de gamme économique sont moins chers à construire, moins chers à rafraichir, moins chers à chauffer, le tout avec une architecture raisonnable. Aujourd’hui, nous travaillons beaucoup en collaboration au stade de la conception des établissements. 80 % des éléments liés à la consommation des édifices se jouent au moment de la conception. 

Une démarche encore récente pour laquelle il faut des points de repère 

Il y a une réelle difficulté à faire correspondre les exigences auxquelles nous pouvons être confrontés dans les appels d’offres et la réalité économique de la construction d’un hôtel. A date, nous promoteurs, mais également certainement les exploitants hôteliers, il nous manque un retour d’expérience sur les derniers hôtels construits qui sont labellisés. La période que nous venons de traverser ne nous aide pas à disposer des bons indicateurs car un hôtel plein consomme plus. 

Tous ces éléments que je viens de vous partager, ont une incidence sur notre niveau d’expertise en interne. Nous challengeons également les architectes et les exploitants hôteliers sur ces sujets. 

Par ailleurs, la réhabilitation est 30 à 50% plus coûteuse que de construire du neuf. Il nous faut donc travailler sur un modèle économique différent et être capable de démontrer à une collectivité qu’il vaut mieux qu’elle vende moins cher son foncier pour disposer ensuite d’un actif immobilier performant en termes de consommation et de bilan carbone sur son territoire. Nous commençons à avoir ces discussions mais il y a encore du chemin à faire sur ce sujet. 

Chez nous, construire durable ne se discute pas, c’est une obligation sociétale. Il faut par contre parvenir à équilibrer l’équation économique. Les investisseurs sont de plus en plus nombreux à accepter aujourd’hui de payer le coût d’une construction bas carbone, durable ou encore labellisée. 

Nous développons le segment milieu de gamme dans des villes secondaires. Avoir une labellisation sur un projet de 100 chambres dans ces destinations coûte le même prix qu’une labellisation sur un projet de 150 chambres en Île-de-France dont le montant d’investissement est le double de ce qui serait investi en région. Il faut donc parvenir à vendre ce surcoût du développement durable aux clients finaux. Les exploitants avancent dans le bon sens car ils ont la capacité de faire payer aux clients cet effort développement durable. Cela correspond aux attentes des clients et les établissements qui resteront des passoires thermiques ne seront plus fréquentés à terme. Pour répondre aux critères qui seront mis en place à l’horizon 2030, c’est maintenant qu’il faut s’y atteler. 

La hausse du coût des énergies est globale et touche tout le monde. Les exploitants parviennent à la répercuter auprès des clients. De notre côté, c’est plus compliqué et nous sommes dans la période où nous nous devons de tenir les engagements pris auprès de nos clients alors que les prix de revient augmentent. Je ne doute pas que le cycle va se relancer, nous continuons à croire fortement dans l’immobilier hôtelier. En termes de destination immobilière, l’hôtellerie à la chance d’avoir un modèle économique qui continue à fonctionner et qui est viable. Ce n’est pas forcément le cas de certains autres modèles d’actifs. 

Les réhabilitations réalisées par Vinci Immobilier :

Novotel Paris Belleville

PARIS 20

Hôtel 4* de 119 ch

 

Transformation d’un bâtiment administratif

Kimpton PARIS OPERA

PARIS 2

Hôtel 5* de 149 ch

Transformation de 3 immeubles de bureaux

Le Léonor STRASBOURG

STRASBOURG

Hôtel 5* 116 ch

Transformation d’un commissariat de police

OKKO HOTELS LILLE CENTRE

LILLE

Hôtel 4* 120 ch

Transformation d’un centre commercial

 

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