Entretien avec Jean-Bernard Falco, Président Fondateur & Associé de Centaurus. Une discussion avec Vanguélis Panayotis, CEO MKG Consulting.

Comment voyez-vous cette rentrée, êtes-vous aussi inquiet qu'il y a quelques mois, ou êtes-vous rassuré ?

Jean-Bernard Falco : Je suis ravi et enchanté. Depuis le début de la semaine dernière [ndlr : l’interview a été réalisé le 20 septembre 2021],­ nous avons rouvert l'intégralité notre parc hôtelier.

Nous avons vécu un été exceptionnel. A Paris et dans les grandes villes, cela a été moins prononcé, car notre clientèle habituelle, les anglo-saxons, les asiatiques ou les orientaux, a été absente. En revanche, dans les hôtels de région, à Belle-Ile-en-Mer par exemple, Nîmes, Perpignan, voir même un peu au Portugal, nous avons bien fonctionné.

Quel est votre pari pour le retour d’une activité proche de celle de 2019 ?

Jean-Bernard Falco : J’avais des anticipations très négatives en termes de projection. Nous avons eu beaucoup de difficultés pour faire de la prospective, avec nos managers, nos associés, nos actionnaires, nos investisseurs. J'étais plutôt sur un retour à la normale, c’est-à-dire 2019.

Je reviens complètement dessus. Lorsque je vois la croissance mondiale pour 2021, 2022 ou 2023, ou en tout cas de ce qui est anticipé au niveau de la croissance européenne et française ; les prévisions semblent bonnes.

Au mois de septembre, il y a eu beaucoup plus de corporate que nous ne pouvions l'imaginer cet été. Nous n’avons pas eu de touristes, mais nous avons eu des grandes villes avec un taux d'occupation à ne pas négliger, des prix moyens, qui certes, ne sont pas à la hauteur de ce qu'ils étaient en 2019, et un REVPAR en augmentation, jour après jour.

Ce qui me fait dire que d’ici fin 2022, nous aurons retrouvé les chiffres de 2019 ou en tous cas, son activité.

Quelle est votre ambition et vos intentions pour la décennie à venir ?

Jean-Bernard Falco : Nous nous sommes dit que nous devions trouver une solution un peu différente de structuration juridique, financière, fiscale et surtout sociale. Nous commencions à devenir un groupe compliqué, avec une société de gestion, des marques hôtelières, des enseignes, des franchises.

Comment voyez-vous votre groupe et vos métiers dans dix ans ?

Jean-Bernard Falco : Nous avons été les seuls à s'auto-contrôler, en tout cas dans l'hôtellerie dite indépendante en Europe. Nous avons créé une marque française internationale en 2014, from scratch, cinq étoiles, de luxe.

Au moment où nous nous parlons, en septembre 2021, nous sommes déjà à 14 établissements. Quatre hôtels à Paris sous l'enseigne Maison Albar, dont un hôtel à Nîmes, un hôtel à Porto et quatre en Chine. Deux qui sont ouverts en exploitation, l'un dans une petite bourgade de 23 millions d'habitants Chengdu dans le Sichuan, l'autre à Guiyang, une petite ville de 12 millions d'habitants et deux projets en développement, Changsha dans le nord de la Chine et à Gwangju à Canton.

Par ailleurs, nous avons de grandes ambitions en Europe. Nous sommes sur le point d'aboutir sur quelques transactions. Enfin, l’Afrique représente pour nous un enjeu majeur. En matière de tourisme, l’Afrique est une évidence avec notamment 1.5 milliards de personnes d’ici 2030 et des pays francophones exceptionnels. Il reste cependant beaucoup à faire. Nous avons pu, grâce à notre cabinet conseil cabinet Gide, nouer une véritable relation forte depuis quelques années avec le gouvernement ivoirien et avons de nombreux projets d'installation.

Quels sont pour vous les trois grands défis des sept années à venir pour notre secteur ?

Jean-Bernard Falco : Je crois que nous ne pouvons pas nous dispenser d’une meilleure attractivité sectorielle par une augmentation salariale. Nous devons avoir la capacité de proposer à l'Etat des solutions. C'est ce que nous faisons avec l’AHTOP, l'association pour un hébergement et un tourisme professionnel, que j'ai co-créé avec mes pairs en 2015. Nous avons rédigé un manifeste avec quatre thématiques très fortes et dix propositions pragmatiques. Quatre thématiques autour de la relance, de la promotion, de la valorisation et la transmission.

Le deuxième point, c'est de réfléchir à l'avenir. Nous allons tous être confrontés à des difficultés importantes. Pour un certain nombre d'entre nous, des loyers n'ont pas pu être payée aux bailleurs. Il va falloir, d'une manière ou d'une autre, rembourser l'intégralité de son endettement. Or, comment fait-on à 100 sur un indice 100 de chiffre d'affaires pour rembourser 25-30 % d'endettement supplémentaire sur une durée de quatre ans ? Je rappelle que le PGE, c’est 6 ans. Donc, comment faire pour rembourser sur quatre ans 25-30% de son chiffre d'affaires, en tenant compte des arriérés de loyer, des arriérés fournisseurs, des arriérés de cotisations sociales, patronales, des taxes de séjour et autres. Ce n’est pas possible. Nous avons des solutions permettant à tout le monde de sortir par le haut et de repositionner les entrepreneurs et les entreprises du secteur dans la situation dans laquelle ils étaient en 2019. Il faut que cela nous permette d'appréhender l'avenir avec beaucoup d'efficacité.

Mon dernier point est une plus forte digitalisation de notre secteur. Il s’agit de la grande thématique et du grand enjeu de demain. 80-90 % des chiffres d'affaires sont faits par soit des outilleurs soit par de l'électronique. Une grande partie du chemin a ainsi été fait, d'un point de vue commercialisation et marketing. Par exemple, notre secteur est très présent sur les réseaux sociaux. Nous sommes certes loin de Tiktok et compagnie, mais ce qui est sûr c'est que tous les acteurs économiques, quels qu'ils soient, ont pris le sujet au sérieux.

En d'autres termes, les trois points cruciaux pour moi ce sont : beaucoup d'humain et avec une vision partagée en leadership, des PGE pour le futur, une meilleure attractivité nos secteurs et une plus grande digitalisation avec une personnalisation client très importante. Celle-ci doit être, en termes de CRM et de marketing, ultra individualisé et ultra personnalisés.

Croyez-vous qu'il existe une excellence française dans ce métier de l'hospitalité ?

Jean-Bernard Falco : La France est une terre d'hospitalité. Il n'y a pas plus beau joyau que la France en matière de tourisme. Nous sommes le premier pays visité au monde.

C'est d'abord en France que vous voulez venir. A Paris évidemment, mais pas seulement. Nous avons de magnifiques régions et avons mis en place de nombreux programmes d'infrastructures. Bordeaux n'est plus qu'à 2 heures de Paris. Il faut cependant poursuivre cet effort et désenclaver un certain nombre de régions.

Revendiquons le secteur du service comme étant une véritable fierté, monteront à nos enfants ce qu'est l'hospitalité et sortons de ces idées noires qui sont que l’hospitalité c’est de l'asservissement, que le tourisme c'est les vacances. Le tourisme est une véritable fonction et un véritable emploi. Nous avons ainsi encore beaucoup à faire afin de nous faire entendre, par tout le monde et de faire en sorte que tous soient fiers comme nous pouvons l'être de travailler dans notre secteur.

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