Lors de la récente présentation du rapport annuel de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, Halde, son ex-président, Louis Schweitzer, a regretté que si ce problème de société est de mieux en mieux connu des Français, il n’en reste pas moins que les cas de discriminations identifiés sont de plus en plus nombreux. En 2009, la Halde a enregistré 10 545 réclamations, soit 21 % de plus qu'en 2008 et 69 % de plus qu'en 2007. De plus, le collège a pris l’année dernière 412 délibérations qui ont donné lieu à 442 mesures, parmi lesquelles 212 observations devant les tribunaux (contre 64 en 2008). Selon ce rapport d’activité, les domaines où se manifestent le plus les discriminations, concernent l'emploi, notamment au niveau du recrutement dans le secteur privé (3 316 saisines) et en second lieu le déroulement de carrière dans le secteur privé (22,5% des réclamations). Arrivent ensuite le fonctionnement des services publics (10%), l'éducation (6 %), le logement (5,5%) et la réglementation (5%). L’origine de la personne demeure le critère de discrimination le plus souvent invoqué avec un chiffre de 3.009 (28,5% des réclamations). Viennent ensuite l'état de santé et le handicap (18,5%), suivis par le sexe (6,5%) et les activités syndicales (6%). Les saisines liées aux discriminations pour grossesse ou maternité (259 saisines) sont en très forte augmentation en 2009. Rappel des règles à respecter
En application de l’article 6 de la loi du 27 mai 2008 qui modifie le contenu des articles 225-1 à 225-4 du Code pénal, la loi impose d’afficher sur les lieux de travail, ainsi que dans les locaux où se fait l’embauche, les articles du Code du travail relatifs à l’égalité professionnelle et à la discrimination (voir notre édition n° 400 du 19 mai 2009 sur les nouvelles obligations des employeurs en matière d’affichage).La Halde, créée par la loi du 30 décembre 2004, et dont les pouvoirs ont été renforcés par la loi du 31 mars 2006 «pour l’égalité des chances», est une autorité indépendante compétente pour connaître et lutter contre les discriminations, directes ou indirectes, interdites par la loi ou par une convention internationale à laquelle la France est partie.Elle peut être saisie par toute personne qui s’estime victime de discrimination ou se saisir d’office des cas de discrimination directe ou indirecte dont elle a connaissance, sous réserve que la victime, lorsqu’elle est identifiée, ait été avertie et qu’elle ne s’y soit pas opposée.Les agents de la Halde, assermentés et habilités par le Procureur de la République, peuvent constater par procès-verbal les délits de discrimination, notamment dans le cas où il est fait application des dispositions de l’article 225-3-1 du Code pénal admettant comme mode de preuve de l’existence d’une discrimination la pratique des vérifications à l’improviste.Ces agents disposent d’un pouvoir d’investigation permettant de demander des explications, d’auditionner des personnes, de consulter des documents ou même, dans certains cas, de procéder à des vérifications sur place. Ces vérifications doivent en principe avoir lieu avec l’accord des personnes intéressées. En cas d’opposition du responsable des lieux, le président de la Halde peut saisir le juge des référés. Depuis le décret n° 2008-799 du 20 août 2008, la Halde est autorisée sous certaines conditions à conclure des transactions pénales qui évitent une poursuite judiciaire : amende d’un montant maximum de 3 000 € et éventuellement indemnisation de la victime.II – Les personnes protégées Tout salarié, tout candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise est protégé contre les discriminations au travail. Les salariés témoins ou ayant relaté de bonne foi, soit à leur employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives, des agissements discriminatoires dont ils auraient eu connaissance dans l’exercice de leur fonction, ne peuvent pas non plus être sanctionnés, licenciés ou faire l’objet d’une mesure discrimination. III - Droit d’alerte du délégué du personnel En cas d’atteintes aux droits des personnes et aux libertés individuelles résultant de mesures discriminatoires en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement, les délégués du personnel disposent d’un droit d’alerte.Ils peuvent saisir l’employeur qui doit procéder sans délai à une enquête et mettre fin à cette situation. Si l’employeur ne réagit pas à cette alerte, le Conseil de prud’hommes, dans sa formation de référé, peut être saisi par le salarié concerné ou, avec son accord, par les délégués du personnel.IV - Motifs de discrimination interdits Opérer une distinction entre les salariés sur des motifs autres que les nécessités de l’emploi ou les qualités professionnelles du salarié constitue une discrimination prohibée par la loi ( n° 2008-496 du 27 mai 2008.Sont particulièrement visées les discriminations fondées sur l’origine, le sexe, les mœurs, l’orientation sexuelle, l’âge, la situation de famille ou la grossesse, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales, les convictions religieuses, l’apparence physique, le patronyme, l’état de santé ou le handicap.En conséquence, aucun de ces motifs ne peut donc être invoqué pour : écarter une personne d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise. sanctionner, licencier ou décider d’une mesure discriminatoire (directe ou indirecte) à l’encontre d’un salarié, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat.V - Les règles de procédure de recrutement à respecter Le principe de non-discrimination s’applique dès la procédure de recrutement que celle-ci soit effectuée directement par l’employeur ou par l’intermédiaire d’un cabinet de recrutement. Par conséquent, l’offre d’emploi ne doit pas mentionner de limite d’âge supérieure, sauf si elle est imposée par les textes législatifs ou réglementaires.Elle ne doit pas contenir de mentions discriminatoires, ni d’allégations fausses ou susceptibles d’induire en erreur et portant en particulier sur un ou plusieurs des éléments comme l’existence, le caractère effectivement disponible, l’origine, la nature et la description de l’emploi ou du travail à domicile offert, la rémunération et les avantages annexes proposés ainsi que le lieu de travail.En outre, l’article L. 1221-7 du nouveau Code du travail dispose que «dans les entreprises de cinquante salariés et plus, les informations communiquées par écrit par le candidat à l’emploi doivent être examinées dans des conditions préservant son anonymat».VI – Le recours des victimes de discrimination Le candidat ou le salarié estimant être victime d’une discrimination doit rapporter des éléments de fait laissant présumer le comportement discriminatoire de l’employeur et il revient en définitive au juge du fond, à la vue de l’ensemble de ces éléments, de trancher le litige.Sur le plan pénal, ce sont les articles 225-1 et suivants du Code pénal qui sanctionnent de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende toute personne physique ou morale qui lors d’un recrutement ou de l’exécution du contrat de travail a manifestement constitué une discrimination envers un candidat à un emploi, à un stage ou à une formation ou un salarié fondée sur l’origine, le sexe, la situation de famille, la grossesse, l’apparence physique, le patronyme, l’état de santé, le handicap, les caractéristiques génétiques, les moeurs, l’orientation sexuelle, l’âge, les opinions politiques, les activités syndicales, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposées, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (l’amende encourue par la personne morale est quintuplée).En matière civile, les salariés victimes ou témoins de discriminations disposent également d’un recours devant le Conseil de Prud’hommes pour faire annuler la mesure ou la décision fondée sur un motif discriminatoire et demander réparation du préjudice subi.A noter que le licenciement est nul lorsqu’il est décidé par l’employeur en raison d’une action en justice engagée contre lui par le salarié concerné, une organisation ou une association le représentant. Le salarié bénéficie d’un droit à réintégration et est considéré comme n’ayant jamais cessé d’occuper son emploi. Si le salarié peut refuser de reprendre son emploi, le Conseil de prud’hommes lui accorde une indemnité au moins égale aux salaires des six derniers mois, en plus de l’indemnité de licenciement conventionnelle ou légale.Les délais de prescription des actions en justice en cas de discrimination à l’encontre d’un salarié ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou à une formation sont fixés à 5 ans.Enfin, il faut retenir que les organisations syndicales de salariés représentatives au plan national ou dans l’entreprise peuvent exercer en justice toute action relative à des agissements discriminatoires, en faveur d’un salarié de l’entreprise ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en entreprise. Dans ce cas précis, le syndicat de salariés doit notifier par écrit à l’intéressé son intention d’exercer l’action en justice.VII – Un affichage obligatoire En application de l’article 6 de la loi du 27 mai 2008 qui modifie le contenu des articles 225-1 à 225-4 du Code pénal, la loi impose d’afficher sur les lieux de travail, ainsi que dans les locaux où se fait l’embauche, les articles du Code du travail relatifs à l’égalité professionnelle et à la discrimination (voir notre édition n° 400 du 19 mai 2009 sur les nouvelles obligations des employeurs en matière d’affichage).