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Portrait de Keith Lindsay, Hotel Delta Real Estate: "Aventurier en hôtellerie"

8 min de lecture

Publié le 08/03/11 - Mis à jour le 17/03/22

• Keith Lindsay, sans doute le plus francophile des Sud-africains, a tenu la promesse faite à son épouse française d’éduquer leurs filles en France, quitte à arrêter les périples internationaux. • Banquier d’affaires converti au tourisme par la grâce de Disney, il est entré en hôtellerie via Holiday Inn et surtout l’ex groupe Envergure, passant de la finance aux opérations. • Cette double casquette a séduit des groupes hôteliers, mais aussi des fonds d’investissement américains. Aujourd’hui, fort de ses expériences, il est revenu sur Paris pour assister et accompagner les investisseurs et les opérateurs au sein d'une nouvelle structure originale, Hotel Delta Real Estate.

Dans un français impeccable, teinté d’un accent indéfinissable, Keith Lindsay se décrit volontiers comme un aventurier. Est-ce l’Afrique du Sud, son pays natal, la proximité des grands fauves et de la savane qui ont modelé son caractère ? Sans doute. Le jeune cadre déjà formé aux subtilités du timeshare quitte l’Afrique pour faire son MBA à Barcelone. Il rencontre son épouse, fraîchement diplômée de l’Insead, qui le convainc de tout abandonner pour venir en France. EuroDisney pré­pare l’ouverture de son parc et souhaite implanter son Disney Vaccation Club, la division times­hare. Keith est l’homme de l’affaire, mais il faut convaincre un Philippe Bourguignon qui répugne à engager un anglo-saxon qui ne parle pas un mot de français. Convaincre, un talent que Keith saura développer tout au long de sa carrière, préférant démontrer que d’imposer ses vues. L’aventure Disney Vaccation fait long feu, mais Philippe Bourguignon conquis le fait rentrer dans l’équipe de Dominique Cocquet au développement.2010 : Création de Hotel Delta Real EstateLe pied est mis dans l’univers des loisirs et il faudra peu de temps à Holiday Inn pour approcher cet expert qui connaît si bien les ratios financiers, les petites lignes des contrats et le marché immobilier. La société lui confie le développement de son enseigne en France. C’est l’époque où le CDR a hérité du Crédit Lyonnais un vaste portefeuille d’établissements. "Nous avons réalisé l’une des plus belles opérations en partenariat avec Westmont et Whitehall, en dotant Holiday Inn d’un parc de 60 hôtels en fran­chise en moins de 18 mois”, se souvient Keith Lindsay. Le groupe lui confie alors le développement de Crowne Plaza dans toute l’Europe, y ajoutant InterContinental une fois l’acquisition finalisée. C’est à ce moment qu’il plonge les mains et la tête dans les opé­rations pour se familiariser totalement avec l’univers hôtelier. “Je ne pouvais pas réali­ser un développement efficace et bénéfique sans comprendre les méandres du fonction­nement hôtelier. J’ai côtoyé les plus grandes pointures à la direction des InterContinental en apprenant énormément à leur contact et j’ai pu concrétiser grâce à cela quelques belles implantations aussi rentables pour le propriétaire que pour l’exploitant”.Ce talent n’a pas échap­pé aux chasseurs de tête qui le contacte au nom de la famille Taittinger en quête d’un patron pour la division Hôtellerie économique. “Quand j’ai eu mon premier entretien avec Frantz Taittinger, j’ai cru qu’il y avait eu erreur de casting. Je n’avais jamais eu de responsabilité opéra­tionnelle, même en étant proche du terrain. Mais l’aventure était tentante et j’ai sauté le pas. En passant du monde du luxe à l’hôtel­lerie économique je ne pensais pas trouver une telle passion dans les équipes de terrain. Un Campanile dans une petite ville a autant d’importance pour l’économie locale qu’un InterContinental dans une capitale”. Mais il doit néanmoins gagner sa légitimité de direc­teur général, auprès des 600 salariés du siège, des directeurs de filiales et des franchisés. “Frantz Taittinger a eu l’intelligence de me laisser gagner progressivement la confiance des gens. C’est aussi ma propre démarche”. Le défi était de faire passer Envergure à une stature internationale en changeant la menta­lité du groupe. Keith propose une stratégie en trois R, qui lui permet d'obtenir une large adhésion : Responsabilité, Responsabilisation, Résultats. "Cela impliquait des choix, de l’autonomie et une culture du bénéfice qui manquait un peu. On m’en parle encore huit ans plus tard”. Avec la famille Taittinger, Keith Lindsay prépare la fusion Envergure et Concorde Hôtels au sein de Louvre Hôtels pour mettre le groupe en position d’être bien vendu. “C’était une expérience passionnante de rapprocher des univers éloignés, des intérêts différents, des égos naturels en se focalisant sur l’enjeu. J’ai dû manier à la fois la diplo­matie et la règle à calcul”.Une fois placé Louvre Hôtels dans le giron de Starwood Capital, Keith s’accorde quelques mois de repos avant d’être contacté par l’état-major du groupe Accor qui ne veut pas le laisser s’échapper dans la nature. Avant de l’intégrer au siège, il lui propose une véritable mission d’aventurier : renforcer la place d’Accor en Russie. Avec femme et enfants, le voila parti pour Moscou pour assurer un développement stable dans un pays mouvant. “Je m’attendais à pire”, dit-il aujourd’hui. “Avec l’aide de la BERD, nous avons sélectionné des partenaires sérieux et réalisé les premières opé­rations Novotel et Ibis à St-Petersbourg et bien d’autres encore”. Mission accomplie, Keith Lindsay se trouve en 2006 devant la nouvelle équipe emme­née par Gilles Pélisson. L’aventure russe s’achève aux portes de la direction générale. Qu’à cela ne tienne, un autre continent s’ouvre à lui. Le voilà installé à New York, chargé par le géant AIG de monter un fonds d’investissement dans l’hô­tellerie. L’argent est disponible, très dispo­nible, les opportunités nombreuses. “J’ai fait de belles opérations en Europe, au Mexique, en Inde, aux Etats-Unis. Je suis surtout fier de ne pas avoir fait des opérations tentantes mais trop spéculatives. Encore plus à ce poste qu’ailleurs, j’ai constaté les dérives d’un système où des hommes sont motivés par les primes sur résultats sans avoir suffi­samment conscience de l’intérêt à long terme pour tous les partenaires du deal”. Une fois ses 400 millions de dollars investis, Keith Lindsay tient la promesse de revenir en France quand ses deux filles seront en âge d’entrer au lycée. Heureux concours de cir­constances, il arrive en Europe quatre mois avant la faillite totale d’AIG. “Mes amis ont été impressionnés par mon intuition, je ne les ai pas démentis, mais ma décision était prise depuis un moment. Je voulais mettre à profit tout ce que j’ai accumulé dans la gestion immobilière, le développement, les opéra­tions, les finances pour aider les investis­seurs et les opérateurs à restructurer leur portefeuille et le développer avec les bons contrats. Je pense avoir une véritable valeur ajoutée avec un recul suffisant sur tous ces aspects du patrimoine hôtelier pour trouver la bonne combinaison. Les dirigeants ont la mémoire longue et ils se souviennent de ceux qui les ont aidés à faire un bon deal et ceux qui les ont mis dans une situation embarras­sante”.Il crée ainsi Beacon Hospitality et développe ses talents pour Orco en Europe centrale et d’autres groupes ou investisseurs en France et ailleurs. Puis, l'an passé, il monte sa propre structure avec des associé, Hotel Delta Real Estate, pour assurer cet interface nécessaire entre les opérateurs et les investisseurs hôteliers. Cette nouvelle aven­ture, plus personnelle, n’est pas pour lui déplaire. “Par orgueil peut-être, j’ai toujours pensé que je devais diriger ma carrière en fonction des défis qui se présentaient sans chercher à m’installer dans le confort d’un groupe international. Le monde change, il faut être flexible et disponible. C’est pour cela que je n’ai jamais été surpris par la fin, parfois brutale, de mes missions. Si un autre challenge se présente, je suis partant”. Keith Lindsay en quelques dates...1991 : Responsable de Disney Vaccation Club pour la France, puis du développement EuroDisney SCA1995 : Directeur du développement Holiday Inn France1998 : Directeur du développement Crowne Plaza, puis InterContinental en Europe2002 : Directeur général du groupe Envergure2005 : Mission de développement pour Accor en Russie2006 : Responsable du fonds d’investissement hôtelier de AIG2008 : Création de Beacon Hospitality Partners2010 : Création de Hotel Delta Real Estate

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