
• Depuis le mois de janvier dernier, Christopher Hache, 28 ans, a été appelé pour diriger les cuisines du Crillon à Paris et de son restaurant gastronomique Les Ambassadeurs. • Pour son premier poste aux commandes des cuisines d’un palace, il a cherché à s’entourer d’une équipe qu’il connaît depuis longtemps et réaliser ainsi le meilleur tandem possible cuisine et salle. • Adepte d’une cuisine accessible et lisible, il a la chance d’avoir une page blanche à remplir, sans pression excessive, même si la conquête des étoiles s’inscrit naturellement au programme.
L’humilité n’empêche pas l’ambition et Christophe Hache entend bien rétablir Les Ambassadeurs dans la liste des meilleures tables parisiennes. “Le gain des étoiles n’est pas dans mon contrat. C’est une pression de moins pour débuter, mais les obtenir est toujours une finalité pour un chef et bien-entendu je vais y penser”, admet-il avec un sourire complice.1998-2001 : BEP restauration et bac Pro en pâtisserie au lycée hôtelier d’Eragny _ Août 2003-juillet 2004 : Commis de cuisine aux Elysées du Vernet avec Eric Briffard _ Août 2004-février 2006 : Chef de Partie chez Lucas Carton avec Alain Senderens, puis 3e sous-Chef avec Frédéric Robert et Sous-Chef chez "Senderens", nouvelle formule de Lucas Carton _ Juillet 2005 : Sous-Chef à l’Auberge des Cîmes de Régis Marcon _ Février 2006-février 2009 : Sous-Chef restaurant du Bristol Paris avec Eric Fréchon _ Avril 2009 : Sous-Chef au restaurant La Grande Cascade du Bois de Boulogne _ Janvier 2010 : Chef des cuisines du Crillon à ParisC'est peu dire que Christopher Hache est tombée dans la marmite dès qu’il était en âge de se promener dans la cuisine de l’auberge familiale, bercé par sa grand-mère cuisinière et entretenu dans la passion des recettes de terroir par son père, restaurateur à Eragny dans le Val d’Oise, à l’enseigne Paris Dieppe. C’est auprès de lui qu’il fera ses classes, poussé en permanence à se dépasser. “On peut dire qu’il m’a forgé le caractère et incité à aller toujours de l’avant pour être le meilleur”, reconnaît aujourd’hui le jeune Christopher qui entame une formation classique de cuisinier. Au lycée hôtelier Auguste Escoffier d’Eragny, à deux pas de la maison paternelle, il décroche son CAP cuisine, poursuit par un BEP restauration section cuisine et complète la formation initiale par un Bac Pro pâtisserie.Il est temps d’entamer le parcours initiatique auprès de ses aînés pour développer sa technique, sa sensibilité et son regard sur le métier. Il débute son apprentissage de la haute gastronomie auprès d’Eric Briffard, le Chef des Elysées du Vernet, un MOF exigeant et rigoureux : “Ce fut une période difficile, mais instructive”, reconnaît Christopher. Il y développe les bases fondamentales de la grande cuisine, la rigueur, l’organisation ainsi que la technique et la précision.Deuxième étape, la brigade du Lucas Carton, place de la Madeleine, comme Chef de partie sous les ordres d’Alain Senderens. “C’est un vrai philosophe de la cuisine. Il en a une approche émotionnelle, en cultivant des sentiments, un mélange d’excentricité et d’inventivité mais toujours avec la qualité d’une cuisine d’auteur. Oui, c’est une cuisine qui m’inspire”, reconnaît le jeune Chef qui progresse jusqu’à 3e sous-chef dans l’équipe de Frédéric Robert. Et puis, Alain Senderens décide de fermer le Lucas Carton pour développer une nouvelle approche de la restauration. Pendant cette période de fermeture, il rejoint Jacques Marcon, avec lequel il travailla aux Elysées du Vernet, auprès de son père Régis à l’Auberge des Cimes en Haute- Loire. Mais de retour à Paris, il participera à la réouverture du nouveau concept de Lucas Carton dans le restaurant rebaptisé «Senderens».Et puis Christopher veut se familiariser avec l’univers des palaces, cette recherche constante de la perfection, la régularité imposée 7 jours sur 7, la pression de la conquête de graal avec les 3 macarons Michelin. Il travaille avec le Chef Eric Fréchon au Bristol pendant toute cette période jusqu’à la consécration qui arrive en mars 2009. Pour Christopher Hache le contrat est rempli, il est temps de passer à un autre défi, celui de la gestion opérationnelle et du calcul économique.Les liens ne sont jamais rompus avec les anciennes équipes et il rejoint Frédéric Robert, qui a quitté Lucas Carton pour prendre la direction de la Grande Cascade. Avec le Chef, il élabore la carte du restaurant et des banquets. Comme sous-Chef, il participe de près à la gestion et à la recherche indispensable de la rentabilité en période de crise. Il serait encore en place si un nouveau défi n’était venu le titiller. Le départ de Jean- François Piège du Crillon ouvre une voie royale, normalement réservée à un Chef déjà expérimenté et connu, qui contribuera à la réputation du palace. La direction générale a pris une voie différente en auditionnant plutôt les «jeunes loups», qui participeront à leur manière au renouveau de l’hôtel. “Etre Chef des cuisines d’un palace, c’est un rêve d’enfant. J’ai un peu réfléchi et j’ai décidé de saisir ma chance”. Après quatre à cinq entretiens, il décroche le poste en étant peut-être le premier surpris. “Ils ont peut-être été séduits par une certaine fraîcheur de ma part, la recherche d’un autre regard”, s’interroge t-il aujourd’hui. Mais il passe rapidement à autre chose, au concret. “On m’a offert une page blanche à remplir. Je succède à Jean-François Piège mais je dois surtout apporter ma propre pierre à la reconstruction d’une restauration différente puisque nous n’avons plus les étoiles. Du coup, je m’oriente vers une restauration plus accessible, plus lisible. L'idée est de dévoiler une nouvelle carte toutes les saisons pour renouveler régulièrement les plats et travailler autour des produits de saison”.En place depuis janvier dernier, Christopher a pris le temps qu’il fallait pour élaborer cette carte. Il s’est d’abord attaché à revisiter les offres de L’Obé, des banquets, du room service, du bar et du jardin d’hiver, avant de plonger “avec une grande humilité et beaucoup de passion” dans le grand bain avec le restaurant gastronomique Les Ambassadeurs. Plus accessible, c’est d’abord un challenge financier puisque la nouvelle carte propose des formules à moins de 100 euros et un menu dégustation à 140 euros, presqu’inhabituel dans un palace. Pour être sûr de lui, il a testé sans relâche ses propositions et impliqué toute son équipe. Habitué au travail en brigade, Christophe Hache ne conçoit pas la réussite sans le travail collectif. “Je voulais être entouré de gens qui ont l’habitude de travailler avec moi et pour diriger le restaurant j’ai fait appel à un ami, Pierre Jung, avec lequel j’ai travaillé chez Lucas Carton quand il y était premier maître d’hôtel. Je suis heureux que nous attaquions ensemble ce défi. On ne peut pas bien travailler sans harmonie entre la salle et la cuisine. J’ai pris une semaine entière à faire goûter à chaque serveur tous les plats de la carte, en les expliquant, pour qu’ils soient nos Ambassadeurs auprès des clients. J’ai été très touché quand une cliente m’a dit récemment qu’elle avait choisi les langoustines parce que le maître d’hôtel qui les avait goûtées avait su lui en parler”.L’humilité n’empêche pas l’ambition et Christophe Hache entend bien rétablir Les Ambassadeurs dans la liste des meilleures tables parisiennes. “Le gain des étoiles n’est pas dans mon contrat. C’est une pression de moins pour débuter, mais les obtenir est toujours une finalité pour un chef et bien-entendu je vais y penser”, admet-il avec un sourire complice.