• Adeline Grattard, créatrice de Yam’Tcha à Paris, est devenue en quelques mois la coqueluche des critiques gastronomiques et a été choisie comme Grand chef de demain. • Cuisinière par plaisir depuis son enfance, elle a laissé tomber ses études d’Allemand, pour revenir à 22 ans sur les bancs de l’Ecole supérieure de cuisine française du groupe Grégoire-Ferrandi. • Après un passage dans quelques grands restaurants et une plongée en immersion dans les cuisines de Hong Kong, elle est revenue à Paris avec son mari Chiwah pour ouvrir un concept bien à elle.
Tout va vite, trop vite peut-être, car l’effet de mode à Paris peut retomber aussi vite qu’il s’est enflammé. “Je ne suis pas inquiète pour cela. Je ne fais pas ce métier pour être à la mode. Je développe mes idées, je travaille mes recettes et je n’ai pas d’autre ambition que de continuer à me faire plaisir et à faire plaisir”. Le succès rapide de son concept pourrait aussi lui donner des idées de développement et de multiplication… “Sûrement pas, je suis avant tout une cuisinière. Je suis devenu chef d’entreprise pour garder ma liberté, et gérer six employés est déjà un exercice difficile. Je veux garder la proximité avec mes clients et me consacrer le plus possible à ma passion”.2000 : Décroche sa licence d'Allemand mais ne poursuit pas vers l'enseignement _ 2001-2003 : CAP, BEP et diplôme de l'Ecole supérieure de cuisine française dans le groupe Grégoire-Ferrandi à Paris _ 2003 : Premier poste comme responsable de poste de Pascal Barbot à L'Astrance, Paris _ 2006 : Départ pour Hong Kong avec son mari Chiwah pour se familiariser avec les techniques de la cuisine chinoise _ Mars 2009 : Ouverture avec son mari du Tam'Tcha, restaurant de 20 couverts, rue Sauval à Paris _ Octobre 2009 : Intègre la première promotion des “Grands Chefs de Demain” Gault-Millau et Champagne MummInstallée depuis le printemps dernier dans une petite rue discrète à deux pas du Forum des Halles, Adeline Grattard a encore du mal à réaliser le “buzz”, comme on dit dans les milieux branchés, créé autour de son restaurant Yam’Tcha. En quelques mois à peine, cette adresse confidentielle, version originale dans tous les sens du terme de la cuisine chinoise à la vapeur, est encensée par les critiques. Adeline est poussée un peu contre son gré sur le devant de la scène comme une étoile montante de la gastronomie parisienne.Surprise mais attentive à gérer au mieux cette renommée soudaine, Adeline Grattard cherche à rester dans sa bulle, cuisinière avant tout. Car c’est bien la passion de la cuisine et un sacré acharnement qui l’ont conduit si vite à la notoriété. A 22 ans, licenciée en Allemand, elle avait pour horizon immédiat le professorat et une carrière assez ennuyeuse. “Je ne me voyais pas du tout comme enseignante alors je me suis tournée vers ce que je faisais de mieux. C’est-à-dire la cuisine. J’ai vu un reportage sur l’Ecole Ferrandi et ce fut comme une révélation. Je me suis inscrite à l’année de mise à niveau pour passer le CAP et le BEP de cuisine dans la foulée, avant de m’inscrire à l’Ecole supérieure de cuisine française”. Elle fait partie des étudiantes les plus âgées, mais la motivation et l’engagement gomment toutes les différences. Elle se donne à fond pour apprendre les ficelles du métier, toutes les ficelles, qui lui permettront le plus rapidement possible d’avoir son affaire à elle. “J’ai cherché à multiplier les expériences pendant les stages liés à la formation : d’abord avec Flora Mikula aux Olivades, puis chez Henri Faugeron, le spécialiste de la truffe, pour finir six mois dans la brigade de Yannick Alléno au Scribe. Là j’ai vu que la place d’une fille dans une grande brigade n’était pas évidente. Cela m’a renforcé dans mon idée de travailler dans les petites structures”. Son diplôme de l’ESCF en poche, elle ne se sent pas encore prête pour l’aventure de l’entreprise et se fait engager chez Pascal Barbot à l’Astrance, près du Trocadéro. Trois années qui seront un véritable passeport professionnel. “Il n’y a pas de commis avec Pascal, seulement trois responsables de poste qui suivent les préparations de bout en bout, postes que j’ai alterné pendant trois ans : aux desserts et garde-manger, au poisson et à la viande”.Nouvelle rupture pour respirer et pour chercher son style. Proche de sa tante mariée à un citoyen de Hong Kong, Adeline baigne depuis son enfance dans la cuisine chinoise. Elle a bien été séduite aussi par la cuisine ensoleillée de l’Italie, mais la rencontre avec Chiwah, lui aussi Hong-kongais, va finir de la faire basculer vers les saveurs asiatiques. Déjà chaque année, ils profitent des grandes vacances pour faire un périple gastronomique en Chine. Adeline pousse son mari à s’installer à Hong Kong pour approfondir sa technique. Grâce à lui, pendant deux années, elle peut se faire une place dans les restaurants de l’ex-colonie anglaise, et travailler les subtilités des épices, des cuissons à la vapeur… C’est aussi l’occasion de faire un bébé pour se poser un peu plus dans la vie. Mais l’aventure personnelle reste un objectif majeur pour Adeline qui veut développer son affaire. Avec le soutien constant de son mari, elle revient en France pour concrétiser son rêve. “Je ne pensais pas que se serait aussi long et aussi difficile”, reconnaît-elle aujourd’hui. “Il a fallu six mois pour trouver un local à Paris qui pouvait correspondre à mon projet et encore six mois pour convaincre les banques de sa viabilité. Je voulais absolument conserver un caractère intime avec une vingtaine de couverts. Cela ne fait pas un gros chiffre d’affaires et les financiers ne jurent que par la rentabilité immédiate pour limiter le risque. Il faut vraiment s’accrocher pour ne pas renoncer”.Dans cette période difficile, elle peut compter sur les conseils de Pascal Barbot, heureux de revoir son “élève” revenir sur Paris avec un projet personnel. Il mettra son carnet d’adresses et ses recommandations à sa disposition. En pleine crise économique, le Yam’Tcha, littéralement “L’instant thé pour déguster des dim sums”, ouvre ses portes rue Sauval. Elle y adapte ses connaissances de la cuisine chinoise avec les bases de sa formation classique.C’est peu dire que le succès est quasiment immédiat. La référence à Pascal Barbot est une porte ouverte vers les médias spécialisés toujours en quête de nouveauté. Pascal et son directeur de salle Christophe Rohat lui envoient des clients. “Dès les premiers jours, je voyais des gens prendre des notes et des photos. Je n’étais pas du tout préparée à cela et j’ai dû y faire face alors même que nous étions en rodage. J’étais seule en cuisine et c’est arrivé un peu vite, surtout après la visite de François Simon du Figaro”.Concentrée sur son travail et la mise au point de nouvelles recettes, Adeline n’a pas trop le temps de lire les critiques, plutôt élogieuses, qui se multiplient. “J’avais à peine le temps de les lire, car il fallait tout gérer en même temps, et parfois je ne comprenais même pas le sens de ce que je lisais. Alors on ne peut pas se déterminer par rapport à cela. Je suis beaucoup plus attentive à la réactions des clients qui viennent depuis le début et qui n’hésitent plus à me faire part de leurs appréciations et parfois même de leurs déceptions. C’est ce que me fait évoluer et avancer”, raconte Adeline qui a eu une nouvelle surprise le mois passé : être sélectionné par Gault-Millau dans la première fournée des six “Grands chefs de demain”.Tout va vite, trop vite peut-être, car l’effet de mode à Paris peut retomber aussi vite qu’il s’est enflammé. “Je ne suis pas inquiète pour cela. Je ne fais pas ce métier pour être à la mode. Je développe mes idées, je travaille mes recettes et je n’ai pas d’autre ambition que de continuer à me faire plaisir et à faire plaisir”. Le succès rapide de son concept pourrait aussi lui donner des idées de développement et de multiplication… “Sûrement pas, je suis avant tout une cuisinière. Je suis devenu chef d’entreprise pour garder ma liberté, et gérer six employés est déjà un exercice difficile. Je veux garder la proximité avec mes clients et me consacrer le plus possible à ma passion”.