
• Arrière, arrière petite-fille du fondateur Maurice Hurand, Emilie Arabyan a rejoint le groupe hôtelier familial en prenant la direction du Bourgogne & Montana. • Elle a pourtant commencé sa carrière professionnelle loin de l’univers hôtelier au contrôle financier du géant du nucléaire Areva, une volonté délibérée d’élargir d’abord son horizon. • La fibre familiale reste un élément fondamental dans ce groupe où la présence de Jean-Max Hurand, son grand-père, apporte à la fois la dimension historique et la continuité dans la tradition.
Entre une forme de sagesse assise sur l’expérience et l’envie de pousser le groupe plus avant, l’équilibre passe par des discussions intenses dans le conseil d’administration. “C’est parfois animé, mais chacun apporte sa vision. Je suis très heureuse de pouvoir discuter avec mon grand-père qui a déjà connu plusieurs crises et qui nous aide à relativiser. Notre volonté est de poursuivre la croissance avec d’autres acquisitions et en même temps de donner une vraie cohésion à un groupe constitué d’hôtels très personnalisés”, décrypte Emilie Arabyan. Le grand-père et la petite-fille partagent le sentiment d’être sur un créneau porteur - le boutique hôtel de charme – vivant pleinement le retour de balancier vers les exploitants indépendants qui avaient cédé du terrain face aux enseignes internationales. “C’est bien pour cela qu’il faut poursuivre les investissements et entretenir notre avantage”, insiste la jeune directrice qui prépare aussi l’avenir avec un bébé à naître dans quelques semaines. Une sixième génération qui aura sans doute à cœur de franchir une nouvelle étape au-delà du premier siècle déjà parcouru.1979 : Naissance à Paris, élevée avec ses frères et soeurs au sein du Terrass Hotel où habitent ses parents, Christine et Jean-Luc Binet _ 2000 : Etudes de gestion financière à l'université de Paris-Dauphine _ 2003 : Obtention du premier diplôme d'expertise comptable _ 2004 : Engagée chez Areva en poste à la gestion financière de la holding _ 2006 : Nommée à la Business Unit Mines d'Areva comme contrôleur financier avec de nombreux déplacements au Niger, du Canada et de l'Allemagne _ Juin 2009 : Nomination à la direction de l'hôtel Bourgogne & Montana à Paris. _ 2010 : Le groupe Maurice Hurand est constitué des hôtels Artus, Bourgogne & Montana, Buci, Madison et Terrass Hotel.Elevée pratiquement dans les couloirs du Terrass Hotel, Emilie Arabyan, fille de Christine, née Hurand, et de Jean-Luc Binet, n’avait pas forcément vocation à entrer dans l’entreprise familiale. “Depuis mon plus jeune âge, mes parents m’ont laissé le choix de l’orientation professionnelle, même si, inconsciemment, il y avait un souhait plus ou moins exprimé de faire perdurer la tradition. Mais je n’ai pas suivi d’études hôtelières et j’ai commencé ma vie professionnelle pendant six années au contrôle financier d’Areva”, explique la jeune directrice de l’hôtel Bourgogne & Montana, qui a pris ses fonctions en juin 2009. Représentante, avec sa soeur, respon¬sable des ressources humaines du holding familial, de la cinquième génération en poste dans le groupe hôtelier, elle n’a fait que suivre d’autres exemples d’arrivées tardives. Sa propre mère n’a rejoint l’entre¬prise qu’après une brillante carrière d’ingénieur en physique et son grand-père Jean-Max Hurand, toujours très présent, a un peu renâclé avant de travailler aux côtés de son père au Terrass Hôtel en 1955. “Je voulais être agriculteur et finalement j’ai entrepris des études de droit. Mais à l’époque, fils unique, j’ai n’ai pas eu tellement voix au chapitre. Je suis entré sans beaucoup d’expé¬rience et il m’a fallu apprendre sur le tas. Ce fut difficile mais je me suis pris au jeu en passant par tous les services. Au bout de quelques années, j’ai convaincu mon père qu’il fallait faire des travaux pour devenir un hôtel 4 étoiles, le premier à Montmartre. Ce fut le début de la transformation de l’hôtel, étage par étage, sans emprunter d’argent, en travaillant sur les deux immeubles qui constituaient l’établissement. Il y avait une dizaine d’ouvriers en permanence et nous y sommes parvenus”.Jean-Max Hurand se souvient de cette période où l’hôtellerie parisienne était entièrement entre les mains de familles d’hôteliers, à la tête des plus grands établissements. “Les relations étaient très aimables au sein de la chambre syndicale avec de fortes personnalités. Le secteur n’était pas facile pour autant car il fallait trouver du personnel avec les bonnes qualifications et qui restait fidèle à l’entreprise. On ne peut pas dire que les exploitations étaient plus faciles. Ces familles sont en partie responsables de leur disparition progressive du paysage quand les chaînes hôtelières sont arrivées. Elles ont trop tardé à faire évoluer leur établissement et à faire les travaux nécessaires”, explique celui qui est le premier à pousser à la rénovation des hôtels du groupe. “Le prix des travaux a bondi de façon incroyable, mais c’est une nécessité impérative pour se mettre au goût du jour. Il faut le faire même parfois contre l’avis de clients, qui sont très fidèles à un hôtel et qui ont l’impression que l’on touche à leur maison”. La fidélité est une forte caractéristique de l’approche au sein du groupe Maurice Hurand. Une fidélité qui se cultive auprès des clients et du personnel. “On peut parler de paternalisme, mais il a aussi ses bons côtés”, plaide Jean-Max Hurand. “C’est important de compter des salariés, dont beaucoup ont des dizaines d’années de maison. C’est aussi vrai pour des clients, qui sont fidèles depuis plusieurs générations. Cela fait notre force dans les moments difficiles comme ceux que nous traversons”. Pour Emilie Arabyan, il faut juste corriger les défautspotentiels de cette fidélité. “Beaucoup de salariés sont attachés à leur hôtel au sein du groupe. La volonté actuelle est de les faire tourner davantage, de leur donner des perspectives de carrière. Il faut que les cadres aient aussi conscience que la dimension familiale du groupe n’est pas une barrière à leur propre progression”. En arrivant au Bourgogne & Montana, Emilie a du aussi s’imposer dans un univers qu’elle n’avait que côtoyé dans sa jeunesse. “En acceptant le poste de directeur, à l’occasion d’un mouvement au sein de nos hôtels, j’ai conscience que je dois faire mes preuves. Il y a une part de défi pour assurer la continuité familiale, mais du coup j’ai aussi besoin de prouver que je mérite ma place”. L’avantage d’un petit hôtel est que la polyvalence est plus facile à acquérir. Il suffit de s’y mettre. “J’ai besoin de faire par moi-même pour comprendre le fonctionnement. Je me suis mis pas mal de pression pour obtenir ma légitimité en tournant dans les postes à la réception, au back-office, à la lingerie. Mais je pense aussi que je peux apporter une vision intéressante à l’hôtel avec mon expérience du contrôle financier dans une très grande entreprise. Le plus simple pour moi a été d’appréhender les techniques de yield, de gestion des canaux de distribution, de réaction par rapport à des clients qui changent de comportement. Nous y sommes mieux préparés dans une grande entreprise et j’ap¬porte mon regard de client à travers mes nombreux voyages dans ma première vie professionnelle”.Entre une forme de sagesse assise sur l’expérience et l’envie de pousser le groupe plus avant, l’équilibre passe par des discussions intenses dans le conseil d’administration. “C’est parfois animé, mais chacun apporte sa vision. Je suis très heureuse de pouvoir discuter avec mon grand-père qui a déjà connu plusieurs crises et qui nous aide à relativiser. Notre volonté est de poursuivre la croissance avec d’autres acquisitions et en même temps de donner une vraie cohésion à un groupe constitué d’hôtels très personnalisés”, décrypte Emilie Arabyan. Le grand-père et la petite-fille partagent le sentiment d’être sur un créneau porteur - le boutique hôtel de charme – vivant pleinement le retour de balancier vers les exploitants indépendants qui avaient cédé du terrain face aux enseignes internationales. “C’est bien pour cela qu’il faut poursuivre les investissements et entretenir notre avantage”, insiste la jeune directrice qui prépare aussi l’avenir avec un bébé à naître dans quelques semaines. Une sixième génération qui aura sans doute à cœur de franchir une nouvelle étape au-delà du premier siècle déjà parcouru.