
Brian Povinelli a rejoint Starwood en 2006 pour diriger le marketing mondial de Sheraton à un moment où l'enseigne était en pleine transition. Il a fortement contribué à son repositionnement, puis a ajouté la marque Westin à ses responsabilités. Fin 2012, dans le cadre d'une réorganisation au sein du groupe, il a été nommé à la tête des marques Westin et Le Méridien au niveau mondial. Avant de rejoindre la société Starwood Hotels & Resorts, Brian Povinelli a été vice-président du marketing de Reebok, après avoir débuté dans une agence de publicité britannique.
Comment voyez-vous l’intégration de Méridien dans le portefeuille de Marriott une fois que la fusion des deux groups aura été achevée ?
Nous avons fait un énorme travail pour faire progresser nos marques avant même d’envisager la fusion avec Marriott, qui va nous faire entrer dans un environnement plus large. Pour ce qui est de Méridien, les progrès ont été très solides au cours des trois dernières années, non seulement en termes de développement sur de nouveaux territoires, mais aussi pour le repositionnement de la marque. Nous travaillons encore pour répondre aux attentes des clients, pas seulement loisirs mais aussi voyageurs d’affaires. La différenciation entre nos différentes marques est plus forte que jamais et nous voulons poursuivre dans cette direction. C’est sans doute l’un des aspects qui a motivé l’intérêt de Marriott. Ils reconnaissent la puissance du programme de fidélité, SPG, mais également la relation émotionnelle que les clients ont établi avec nos marques. Marriott aime mettre en avant son excellence opérationnelle and nous pouvons sans rougir mettre en avant notre excellence marketing. La combinaison des deux fait sens.
Pouvez-vous craindre des recoupements potentiels entre toutes les marques ?
De fait, quand vous passez de onze à trente marques, il y a des zones de recoupement et nous devrons être attentifs et imaginatifs pour naviguer dans ces zones. Cela fait partie du travail auquel nous devons nous atteler une fois la fusion entérinée. Nous sommes déjà en train de regarder comment créer des «couloirs de nage» bien définis pour chaque marque. Pour un homme d’enseigne, c’est un travail passionnant. Le Méridien a une riche histoire que nous pouvons mettre en scène et repréciser. Notre défi est bien d’aider nos clients à naviguer dans cet océan de trente marques et de choisir celle qui correspond le mieux à leurs besoins et leurs exigences.
Et où serait plus précisément la place de Méridien ?
La relance du Méridien Etoile en septembre prochain sera un point de départ symbolique. Nous avons entièrement rénové le bâtiment, du haut en bas, dans l’optique de présenter le nouvel esprit de la marque et tous les changements que nous avons opéré depuis trois ans. Depuis que Starwood Hotels a acquis Le Méridien, il y a 11 ans, nous avons redimensionné le portefeuille, ce qui nous a amené à sortir plusieurs établissements, tout en y faisant rentrer plus de 40 nouvelles adresses de nouvelle génération. Chic, Culture, Découverte restent les termes qui définissent notre pensée profonde, associée au concept de «Destination Unlocked», que l’on pourrait traduire par «donner les clefs de la ville», un concept sur lequel nous avons travaillé ardemment pour le traduire à travers nos produits et nos services, en les rendant plus accessibles à tous.Le concept de base, que ce soit en affaires ou en loisirs, est d’aider nos hôtes à s’imprégner de la destination où ils sont sans avoir même besoin de sortir de l’établissement. C’est une idée simple mais aucune marque haut de gamme, à ma connaissance, a réussi à la concrétiser. Et c’est notre défi.
En d’autres mots, si je ne quitte jamais l’hôtel est-ce que j’aurais pour autant un ressenti réaliste de la destination ?
Nous y parvenons à travers ce que nous appelons les filtres de la découverte : l’environnement proche de l’hôtel, la culture et la cuisine. C’est véritablement de cette manière que nous donnons vie au programme. C’est là que nous trouvons l’espace pour un nouveau marketing dans l’hospitalité. Nous allons concrétiser cette expérience pour vous dans une centaine de lieux à travers le monde. Que vous soyez en voyage d’affaires avec très peu de temps à y consacrer ou en voyage de loisir avec trois jours entiers pour vous connecter à la destination.
Allez-vous toujours insister sur les dimensions culturelles et artistiques liées à l’image de Méridien ?
Il est vrai que la marque a été très associée à l’art et encore davantage à l’art contemporain, mais nous avons découvert que le concept n’était pas suffisamment accessible à la majorité de notre clientèle. Le défi qui m’a été donné, il y a trois ans quand on m’a confié la gestion de la marque, était justement comment la rendre plus accessible et comment accélérer sa croissance. Au lieu de simplement «déverrouiller l’art», nous tâchons de déverrouiller la destination. Un bon exemple de ce mouvement est ce que nous avons fait à Londres. Nous sommes passés d’une collaboration avec le Tate Modern Museum à un partenariat avec Gray Malin, un célèbre artiste photographe américain, avec lequel nous en sommes à notre troisième épisode du programme «Follow Me». Son œuvre fait écho à l’influence du design moderne milieu du siècle dernier que l’on peut sentir et expérimenter dans les Méridien.
Qu’en est-il du LM100, ce groupe d’artistes qui a aidé à construire l’image de la marque ?
Cela fait partie du passé. Nous avons profité d’artistes étonnants, rassemblés par Jérôme Sans, le curateur du groupe, mais il est désormais plus important de traduire l’esprit d’une destination à travers l’expérience client. Même pour nos collaborateurs, il est plus facile pour eux d’expliquer et de partager leurs sensations sur une destination à partir de la gastronomie qu’en matière d’art contemporain.
Justement, qu’en est-il de la cuisine, comment avez-vous l’intention d’intégrer votre concept dans l’expérience client ?
Nous sommes actuellement en train de lancer, dans un certain nombre d’hôtels, des soirées thématiques pour célébrer l’été. Récemment, au Méridien Piccadilly de Londres, nous avons transporté le Méridien Nice en «déverrouillant la destination» par les senteurs et les saveurs provençales. L’expérience réelle est d’apporter la cuisine locale à travers des offres signature. La gastronomie est un moyen fantastique pour animer les espaces publics et pour raconter une histoire. Vous pouvez aussi le voir à travers nos halls d’hôtel, qui fonctionnent comme un Hub, comme nous les appelons, Coffee houses le jour, cocktail lounges le soir. Nos propositions Coffee house sont renforcées grâce à notre partenariat avec Illy Café et via les «éclairs» signature que chaque hôtel a créé à son image. Nos Chefs pâtissiers ont chacun interprété la recette traditionnelle en utilisant des ingrédients qui s’identifient à la destination. Le soir, nous avons un programme baptisé Sparkling qui permet à nos barmen d’être créatifs avec les cocktails, dès lors qu’ils pétillent, une fois encore avec des saveurs et des produits locaux.
Vous avez été l’une des premières marques à réinventer le lobby et les espaces publics, les rendant plus animés et plus rentables, êtes-vous satisfait du résultat ?
Nous avons réussi à obtenir deux choses : des revenus supplémentaires à travers les programmes que je viens de mentionner et créer des espaces où les gens aiment passer du temps. La mesure clef du succès à ce jour est la façon dont nos halls sont animés, générant des recettes supplémentaires et une plus grande fidélité avec du business répétitif. Nous avons énormément de feedback positif de nos clients fidèles. Nous n’aurions pas eu une telle pénétration du concept à travers tout notre portefeuille si cela n’avait pas été un succès. A ce jour, les deux tiers des Méridien ont investi dans un Hub.
Seriez-vous prêt à aller plus loin et à organiser des espaces dédiés aux co-workers en quête d’un lieu adapté et d’une liaison wi-fi à haut débit ?
Nous n’avons pas l’intention de le faire en tant que concept, mais nous regardons avec intérêt comme le Hub est utilisé. Cela dépend de l’espace disponible dans un hôtel pour le faire. Mais vous avez raison, c’est un nouveau défi, notamment depuis que la connexion wi-fi est perçue comme un service essentiel au même titre que l’air et l’eau. Pour une autre marque du portefeuille Starwood Hotels, Westin, nous avons créé une station «Tangent» avec des équipements spécifiques pour les travailleurs indépendants ou les petits groupes, et nous facturons un usage à l’heure avec une connexion haut débit. Nous avons quelque 55 stations Tangent à travers le monde.
Vous avez évoqué votre second défi, en dehors du repositionnement de la marque, qui est d’accroître son implantation dans le monde, comment vous situez-vous ?
Nous gérons 104 établissements et nous avons un pipeline d’une trentaine d’hôtels qui doivent ouvrir dans les deux à trois ans. C’est le programme d’expansion le plus important de toute l’histoire de la marque. Parfois c’est un renforcement de notre présence, mais dans la plupart des cas il s’agit d’ouvrir un nouveau marché. L’Asie continue d’être une zone très forte de croissance, en Amérique du Nord nous avons doublé notre portefeuille au cours des deux dernières années, avec trois ouvertures à venir dans les dix-huit mois. En Europe, nous sommes centrés sur les rénovations dans les villes clé. Paris, comme je l’ai dit, sera notre plus récente rénovation, dévoilée en septembre prochain ; et notre hôtel de Londres Piccadilly Circus va bientôt bénéficier de rénovations. Vienne et Barcelone suivront sur la liste et nous réintroduisons la marque à Rome avec un Méridien à deux pas du Vatican.