
Quand au printemps tous les responsables touristiques se félicitaient d’un étonnant dynamisme de début de saison, les mêmes faisaient davantage grise mine au début de l’été face à une baisse de régime des réservations et des conditions climatiques, géopolitiques et économiques dégradées. Qu’en est-il finalement, alors que la fin de la saison se dessine, même si l’automne reste encore actif ? Alexis Gardy, le patron des 50 Belambra Clubs répartis sur tout le territoire, répond à nos questions.
Le contexte de la saison estivale 2023 est-il favorable pour battre le record de 2022 ?
Les conditions sont différentes de la saison dernière à plusieurs titres. La première tient à l’ouverture totale des frontières. Le monde du tourisme est ouvert à 100 % et nous ne bénéficions plus d’une clientèle relativement captive face à une offre pléthorique au niveau mondial.
Le deuxième élément de contexte est lié à des conditions climatiques assez exceptionnelles avec les quatre saisons réunies sur une courte période à travers la France, de la Toussaint en Bretagne en passant par l’hiver à la montagne et les canicules dans le Sud. Cela a perturbé et réorienté les choix de dernière minute des candidats au départ, voire provoqué des arbitrages de destination en cours même de séjour.
Le troisième effet tient à une inflation qui s’est invitée de manière permanente tout l’été autour de la table. Elle ne bouleverse pas radicalement la volonté de départ, mais elle génère des changements de comportements qui se traduisent par des durées de vacances réduites, des dépenses locales très réduites et la recherche des formules les meilleures marchées.
Quelles en ont été les conséquences sur votre propre activité ?
La première conséquence, positive en ce qui nous concerne, c’est la validation d’une offre club qui comprend un maximum de prestations incluses dans le prix de base : hébergement, restauration, activités récréatives et sportives. C’est une arme redoutable anti-inflation dont nous avons bénéficié indéniablement. La volonté de contrôler son budget vacances dans un contexte difficile a trouvé sa réponse.
Cela conforte-t-il vos tests d’offre « all inclusive » menés cet hiver ?
Nous les avions mis en place sur plusieurs sites de montagne cet hiver, mais pas reconduits cet été compte tenu du fait que l’offre club est quasiment identique. Il n’y a guère que les dépenses au bar qui ne sont plus comprises et cela conforte bien notre analyse puisque nos bars, cet été, n’ont pas réalisé le chiffre d’affaires attendu normalement. De même, dès que nous avons proposé des animations hors du forfait club, elles n’ont pas rencontré un grand succès.
Avez-vous connu le phénomène des ventes de dernière minute qui caractérise souvent les périodes d’incertitude ?
Nous avons espéré que les ventes de dernière minute viennent renforcer le phénomène d’anticipation que nous avons constaté au printemps dernier pour les prises de réservation, mais elles n’ont pas été d’une grande vigueur, à l’exception d’une pousser soudaine autour du long week-end du 15 août. Cela conforte l’analyse, les Français sont plutôt globalement moins partis en vacances. Ceux qui avaient décidé ont pris leur précaution à l’avance et ponctuellement des pointes de vente ont été générées en pleine saison. Nous sommes passés successivement de l’euphorie au doute pour finir sur le soulagement.
Quel pré-bilan tirez-vous de votre saison ?
L’été n’est pas encore fini et se prolongera sur septembre qui est un bon mois pour l’accueil des groupes et des premiers séminaires d’entreprise, dont certains ont même privatisé des sites dans leur ensemble. Donc le bilan sera bon, mais nous n’allons pas crier victoire. Il valide des options qui nous tiennent à cœur comme la très bonne performance des sites rénovés et montés en gamme ; l’augmentation globale du taux de satisfaction sur la formule Club et un taux de recommandation (NPS) qui a bien progressé aussi.
Le chiffre d’affaires augmente du fait de hausses de tarif qui ont été acceptées et justifiées par les investissements réalisés. La fréquentation est sensiblement la même voire en retrait, à l’exception de la montagne qui a particulièrement été dynamique cet été, tant aux Arcs, à Tignes-Val Claret qu’à Avoriaz. A contrario, le manque d’accessibilité a pénalisé la Corse, par exemple.
Faut-il arrêter de croire que les saisons se succèdent et battent à chaque fois des records ?
La réalité est beaucoup plus mitigée. La hausse inévitable des tarifs masque une baisse de fréquentation quasi-générale à travers la France avec des variations très différentes d’une région à l’autre. Les dépenses locales ont été contraintes et beaucoup de prestataires dans les stations n’ont pas fait la saison espérée. J’ai entendu une réflexion de l’un d’eux qui résume un peu l’avis ressenti : « Il paraît que tout le monde part en France mais pas chez nous ».
Qu’en est-il du résultat opérationnel, arrivez-vous à préserver vos marges ?
Nous sommes sous pression car l’inflation ne fonctionne pas que dans un sens. Que ce soit pour la masse salariale qui a pris 17% de hausse, les dépenses d’énergie, les approvisionnements en restauration ... tout a largement augmenté et cela a conduit à faire des choix, des arbitrages en repensant notre offre tout en travaillant la qualité. Nous avons tout fait pour préserver les marges sur 2023, via les hausses tarifaires acceptées, mais elles devraient être améliorées en 2024, notamment grâce à une évolution favorable des coûts de l’énergie.
