
Entretien avec Antoine Dubois, Senior, Vice President Global Marketing Strategy - Accor & Brand Leader Tribe, Jean-Luc Chetrit, Directeur général, Union des Marques et Pierre Calmard, Président Directeur Général de Dentsu Aegis Network en France :
Antoine Dubois : « Nous voyons l’émergence de nouvelles marques, de nouvelles tendances en termes de communication. Les assurances et les banques par exemple parlent avec beaucoup d’humanité. Enormément de créativité commence à émerger dans les différents univers. Les tendances s’accélèrent autour d’une société plus citoyenne, plus environnementale. »
Il est important de souligner la réactivité et la capacité d’adaptation des hôteliers parisiens avec la multitude d’offres de staycation qui sont proposées à la clientèle.
Accor a choisi d’agir et de préparer l’après-crise en envoyant des messages positifs pour affirmer la présence du groupe, prêt à recevoir ses clients, et leur montrer que dans les hôtels Accor l’expérience est assurée et qu’il est toujours possible de passer un excellent moment. Le consommateur a envie de voyager alors que cela lui est interdit, la dernière campagne #AllSafe leur est dédié et vise à leur assurer que leur sécurité est la priorité mais sans vouloir dramatiser sur le sujet.
Jean-Luc Chetrit : L'Union des Marques représente beaucoup de secteurs (230 entreprises adhérentes qui représentent plus de 1500 marques). Sur plus de 50 marques interrogées lors d’une enquête récente, 70% considèrent qu'elles ont confiance dans l'avenir pour leur entreprise et qu'elles peuvent s'en sortir.
Trois opportunités s’offrent aux marques et aux entreprises : l’accélération de la transformation digitale avec l’omnicanalité, la recherche de nouveaux clients avec une nouvelle façon de traiter la relation client, et la communication qui se doit d’être dans l’utilité, dans le service, l’information et la proximité.
La confiance dans les marques s’était érodée ces dernières années, seulement 27% des Français font aujourd’hui confiance aux grandes marques. C’est désormais l’opportunité de recréer de la confiance.
Les GAFAT (en incluant TikTok) apportent des services pertinents à l’utilisateur, c’est indéniable. L’usage est le premier élément qui guide le choix d’une marque. Cependant, certaines pratiques commerciales de ces acteurs ne sont pas acceptables et il est nécessaire de les dénoncer. Les régulateurs, acteurs et associations comme l’Union des marques ont du poids pour faire bouger les lignes, et sur certains sujets, Facebook ou Google sont en train de changer.
Le climat se dérègle et tous les acteurs doivent participer et être capables d’avoir un impact positif sur l’environnement. Il y a deux visions pour réguler ces problèmes d’environnement : la décroissance avec moins de consommation via moins de communication et donc moins de croissance d’une part et la croissance progressivement décarbonée d’autre part où il est possible de nourrir la planète en changeant la façon de produire et de communiquer.
La Convention Citoyenne a pensé que l’interdiction était la meilleure des solutions pour changer les comportements. Or, l’expérience prouve dans beaucoup de pays, que l’information paie et qu’il faut faire confiance au libre arbitre et au discernement des Français. Le désir s’accompagne d’une responsabilité.
S’il y a une communication qui ne doit pas être supprimée c’est celle qui s’adresse directement au client. Pour les fidéliser, les clients ont besoin d’avoir un message personnalisé. Et paradoxalement, cette communication n’est pas forcément la plus coûteuse.
« Les marques sont nées après des crises car elles ont su réagir avec pertinence. C’est une erreur totale d’arrêter de communiquer. Il y a des silences coupables et ceux qui ne disent rien aujourd’hui et qui vont le payer extrêmement cher demain. »
Pierre Calmard : Durant ces six derniers mois, le marché publicitaire et de la communication a très fortement baissé en France, avec une perte estimée de 7 milliards d’euros en 1 an (baisse de 34 milliards à 27 milliards) Cela a des conséquences désastreuses notamment pour notre démocratie, les médias étant largement financés par la publicité.
La cristallisation des tendances, avant lentes et qui maintenant s’accélèrent fortement, est un fait marquant. Ce qui était hier le futur ou accessoire devient aujourd’hui l’essentiel. La communication va être embarquée dans un paradigme nouveau qui sera fait de confiance que va générer la marque car l’être humain a besoin d’évoluer dans un écosystème où il se sent le plus en confiance possible. Les marques qui toucheront le plus et qui gagneront sont celles qui seront les plus authentiques et transparentes, les plus respectueuses de l’être humain. La grande crise que nous traversons, combinée aux aspects climatiques ne fait que renforcer cette tendance.
Le but des publicités est de susciter le désir et il faut progresser sur l’objet du désir. La data représente la capacité à aller cibler un message pertinent pour un utilisateur. La logique digitale consiste à accompagner le consommateur. Si la marque est servicielle, pertinente et transparente, l’individu aura confiance.
La publicité du vingtième siècle est morte, mais la communication de demain s’ouvre laissant place à une ère post publicitaire qui fait appel à plus des contenus, de la pertinence et de la personnalisation.
Les Français ont économisé 100 milliards d’euros et malgré la crise économique et la défiance, tout cela ne demande qu’à redémarrer fortement. La communication sera le premier vecteur pour redonner confiance au consommateur et faire revenir les clients en magasin, dans les hôtels, etc.
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