Rencontre avec François Deseille, Maire adjoint de la métropole de Dijon, lors de la conférence de presse pour l’ouverture très prochaine de La Cité Internationale de la gastronomie et du vin au cœur de la Cité des Ducs.
La genèse du projet
En 2010, le « Repas Gastronomique des Français » faisait son entrée sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. L’Unesco reconnaissait alors la valeur d’une tradition ancestrale au sein de l’Hexagone. Des produits issus du terroir, des accords mets et vins, une convivialité sans limite, sont autant de facteurs qui ont élevé les repas à la française au rang d’art. Trois années plus tard, le Gouvernement et la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires (MFPCA) annonçaient la création d’un réseau culturel dédié à la promotion de cette distinction, visant notamment à transmettre ses valeurs tant aux touristes qu’aux Français eux-mêmes.
Dijon était alors en lisse aux côtés de Lyon, Tours et Paris-Rungis pour accueillir un projet tout à fait singulier : une Cité de la gastronomie. Forte d’un passé viticole, la destination ayant renoué avec celui-ci grâce au projet selon François Deseille, et d’une inscription des Climats vignobles de Bourgogne au patrimoine mondial de l’Unesco en 2015, il est apparu comme une évidence que cette Cité mettrait également en lumière le vin. Un produit indissociable de la gastronomie française dont Dijon veut célébrer toutes ses dimensions : culturelle, scientifique, historique et patrimoniale.
Au cœur de son centre-ville classé Unesco, Dijon disposait du site parfait pour sublimer l’art de vivre à la française, l’ancien hôpital général, qui a quitté les lieux en 2015. Suite à un appel à manifestation d’intérêt lancé par la ville de Dijon, c’est le groupe EIFFAGE qui se voit confier la mission de faire sortir de terre la Cité Internationale de la gastronomie et du vin. Il aura fallu 10 ans et 250 millions d’euros d’investissements, majoritairement privés, pour que cet ambitieux projet aboutisse.
Les locaux, habitants comme commerçants, n’étaient pas forcément séduits par le projet de prime abord. De nombreuses fausses rumeurs ont circulé au début, comme l’ouverture d’un fast food ou d’un bowling, mais qui se sont vite essoufflées au fur et à mesure que le projet final se dessinait. Des élus de la ville avaient également exprimer leur opposition au projet, notamment Emmanuel Bichot qui avait saisi la justice à plusieurs reprises pour empêcher la construction de la Cité en lieu et place de l’ancien Hôtel-Dieu. La Cour administrative d’appel de Lyon a finalement rejeté sa requête. Et contre toute attente, ce mouvement d’opposition a été bénéfique puisqu’il a permis au projet de gagner rapidement et fortement en notoriété. François Deseille explique même que « cette histoire nous a monté d’un cran », boostant ainsi la motivation des équipes porteuses du projet.
La gastronomie et les vins à l’honneur
Dijon c’est une ville de gastronomie avec pas moins de 7 étoilés Michelin.
François Rebsamen, Maire de Dijon et Président de Dijon métropole
Donner les clés pour comprendre le « Repas gastronomique des Français », c’est la mission de cette Cité Internationale de la gastronomie et du vin. Pas moins de 1 750 m² d’espaces d’exposition y seront dédiés. Ce parcours d’exposition se déploie dans le pavillon contemporain, dans la grande chapelle de l’ancien hôpital ainsi qu’au rez-de-chaussée et en mezzanine. Les visiteurs pourront découvrir trois expositions permanentes dites d’interprétation ainsi qu’une exposition temporaire qui sera régulièrement renouvelée. Parmi les expositions permanentes, on retrouve « Le petit théâtre du bien manger et du bien boire » qui se présente comme un parcours ludique et interactif où l’on découvre entre autres les arts de la table. L’exposition « En cuisine » consiste en un plateau expérimental et interactif mettant en scène les 5 sens, avec en bonus un jeu numérique interactif nommé « Panique en cuisine ». Enfin, l’exposition « la Chapelle des Climats et des terroirs » explique à l’aide de projections et de témoignages les Climats du vignoble de Bourgogne ainsi que le terroir du territoire. L’exposition temporaire du moment, baptisé « C’est pas du gâteau ! les secrets de la pâtisserie française » fait découvrir l’univers de la pâtisserie, elle est par ailleurs parrainée par Pierre Hermé.
Dijon se trouvant au premier kilomètre de la Route des grands a également dédié un espace d’envergure aux vins. Un espace de plus de 600 m² réparti sur 3 niveaux. La Cave de la Cité répertorie plus de 3 000 références de grands crus mondiaux dont 1/3 proviennent de la région viticole Bourgogne. Les visiteurs pourront profiter d’une dégustation personnalisée avec une offre quotidienne de 250 vins au verre. A travers cette Cité, la ville cherche notamment à renforcer son image de vitrine mondiale du patrimoine vitivinicole. En octobre 2021, elle a par ailleurs obtenu le transfert du siège de l’Organisation internationale de la vigne et du vin, qui se trouvait jusque là à Paris. Un transfert tout à fait symbolique qui légitime encore plus l’ouverture d’un tel site.
Partenaire depuis le début de projet, étant même l’un des premiers acteurs à le rejoindre, FERRANDI Paris crée notamment un campus de 850 m² au cœur de la Cité. Un partenariat qui fait sens selon Richard Ginioux, le Directeur général de FERRANDI Paris, car le maitre mot de l’école est l’excellence, un adjectif qui selon lui qualifie bien ce projet. La volonté de mettre en lumière le savoir-faire français correspond également autant à l’école qu’à la Cité. Les deux laboratoires professionnels de cuisine et de pâtisserie sont installés dans le « Canon de lumière », une construction architecturale déjà emblématique. La campus dispense deux types de programmes, l’un dédié aux professionnels tandis que l’autre est ouvert aux débutants. Le premier, dispensé en anglais sur une période de 4 mois, permet d’acquérir les compétences et connaissances nécessaire au lancement d’une carrière dans la filière. Le second s’adresse à des Français souhaitant acquérir les bases en matière de cuisine et de pâtisserie, il est ainsi plus court mais tout de même intensif.
On ne vient pas à la Cité sans goûter quelque chose.
Dominique Buccellato, Directrice du Pôle Culturel de la Cité Internationale de la gastronomie et du vin de Dijon
L’accent est réellement mis sur l’aspect ludique et expérientiel afin de découvrir et d’apprendre tout en s’amusant et en expérimentant. Le maitre mot de la Cité Internationale de la gastronomie et du vin est par ailleurs la gourmandise, un mot cher aux acteurs du projet qui souhaitent l’infuser dans toutes les offres du site.
L’offre est également complétée par un l’Ecole des vins de Bourgogne, un cinéma Pathé Gaumont de 9 salles, un village de 15 start-ups, un centre d’interprétation de l’architecture et du patrimoine, un futur hôtel Hilton ainsi qu’un village gastronomique comprenant des commerces de bouche locaux, une librairie gourmande et 3 restaurants dont celui du chef 3 étoiles Eric Pras.
Des ambitions à la hauteur du projet
Avant la crise sanitaire, Dijon accueillait plus de 3 millions de touristes à l’année dont une forte proportion de touristes internationaux. Notamment des voyageurs d’origine asiatique qui transitaient par la ville avant de se rendre à la capitale. Comme le rappelle François Deseille, ainsi que François Rebsamen, cette Cité est conçue à l’échelle internationale. Une centaine de vins provenant du monde entier sont notamment mis en avant dans la Cave de la Cité. Ils espèrent atteindre 1 million de visiteurs sur la première année d’activité, ne souhaitant pas être trop ambitieux pour le moment. Ils préfèrent se fixer des objectifs réalistes et attendre ensuite d’observer les chiffres de fréquentation pour potentiellement revoir leurs ambitions à la hausse.
On a vu ce qui ne se faisait pas ailleurs et nous avons donc décidé de le faire nous.
François Deseille, Adjoint au maire de Dijon et Vice-Président de Dijon métropole
Un site d’une telle envergure permettra notamment à la ville de rayonner sur la scène touristique, nationale comme internationale. Et François Deseille constate que même avant son ouverture, la Cité draine d’ores et déjà d’importants flux touristiques dans la ville grâce à la visibilité et la notoriété qu’elle a obtenu à travers ce projet. Dijon a notamment été classée par la CNN comme l'une des meilleures destinations 2022, une distinction en partie due à l'ouverture de la Cité et sur laquelle la ville compte bien capitaliser. L’objectif étant de convertir les visiteurs en prescripteurs afin de faire accroitre la popularité du site via le bouche-à-oreille, un canal de communication souvent oublié malgré son efficacité.
Si attirer des touristes fait partie des ambitions principales, rendre la ville attractive pour capter de nouveaux habitants en fait également partie. Car la Cité est bien plus qu’un simple lieu de visite, c’est un lieu de vie à part entière avec ses boutiques, ses restaurants et son cinéma. Par ailleurs depuis l’annonce du projet il y a de ça plusieurs années, nombreux sont les restaurants qui ont décidé d’ouvrir un établissement à Dijon. Un cercle vertueux qui ne cesse de prendre de l’ampleur à quelques mois de l’ouverture prévue le 6 mai prochain. Et de nombreux postes seront à pourvoir, en effet, la Cité génère entre 250 et 300 emplois directs, de quoi attirer de nouveaux habitants en recherche d’emploi ou souhaitant se reconvertir dans le secteur de la gastronomie ou de la culture.
Alors que la Cité n’a pas encore ouvert ses portes, les acteurs du projet regardent déjà vers l’avenir. Des projets et partenariats que François Deseille a accepté de nous partager, démontrant les fortes ambitions qui accompagnent ce projet. L’année 2023, qui marquera les 20 ans de la disparation du célèbre chef français Bernard Loiseau, sera l’occasion de mettre en lumière l’héritage que l’illustre chef a laissé derrière lui tout comme son empreinte sur la gastronomie française. Un partenariat avec l’entreprise Gustave Eiffel est également au programme, avec notamment un mois qui lui sera entièrement consacré.