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Jacqueline Roux, Présidente de la Fédération internationale des Logis et Krystel Blondeau, Directrice générale de la Fédération internationale des Logis: Tout change aux Logis

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Publié le 19/05/09 - Mis à jour le 17/03/22

En novembre 2007, Jacqueline Roux détaillait devant le congrès des Logis de France la nouvelle stratégie de marque, appuyée sur 11 défis, pour faire entrer le réseau dans une nouvelle dimension à travers notamment sa nouvelle identité. Dix-huit mois plus tard, le mouvement est bien engagé malgré la lourdeur du déploiement dans une chaîne qui ne compte pas moins de 3 000 adhérents. Tout bouge et ce n'est pas fini, affirme un tandem résolu à aller de l'avant.

Où en êtes-vous des 11 défis (1) que vous vous êtes lancés collectivement en novembre 2007 ?

_ Jacqueline Roux : Nous avons bien avancé. Il ne nous reste que deux défis à relever, celui de l'harmonisation de la décoration des établissements et celui de l'organisation des structures internes de la Fédération. Pour les autres, l'objectif 2010 que nous avons fixé est toujours en vue. Le message est bien passé auprès des adhérents, même s'il est parfois difficile de changer des habitudes forgées en 60 ans d'histoire, notamment en supprimant "de France". Le mouvement est porté par le changement physique des enseignes.(1) Les 11 défis des Logis : Incitation à la modernisation de la décoration - Valorisation des “1 cheminée” - Recruter de nouveaux adhérents - Améliorer la communication interne du réseau - Optimisation du fonctionnement du réseau - Nouvelle structure de marque - Image actualisée - Création d'une catégorie haut de gamme - Qualité plus homogène par catégorie de cheminées - Commercialisation plus active - Valoriser la restaurationLe déploiement de ces enseignes est-il dans les temps ? _ Krystel Blondeau : Nous avons aujourd'hui environ un tiers des Logis qui arbore la nouvelle enseigne. Nous avons un objectif de 90% des établissements équipés pour la fin juin. Ce sera sans doute difficile à tenir, mais il faut se rendre compte de l'ampleur de la tache, entièrement coordonnée par la Fédération. Il n'y a pas de frein de la part des hôteliers, mais des procédures administratives souvent longues pour obtenir les autorisations. Et nous nous assurons que toutes les anciennes enseignes soient recyclées.Le changement d'enseigne symbolise une nouvelle stratégie de la marque et de son rajeunissement. Est-ce aussi facile à conduire ? J.R. : La nouvelle identité n'est pas un simple habillage, c’est une évolution en profondeur du réseau. Nous avons préféré reculer le timing d’une année pour que le message soit bien intégré par tous et que les changements engagés soient assez significatifs en termes de standards qualité, de restauration pour que le client puisse les percevoir. _ K.B. : La transformation ne veut pas dire faire table rase du passé. Nos valeurs sont les mêmes, ce qui ne doit pas nous empêcher de nous moderniser. Les quatre piliers de la nouvelle stratégie s’appuient sur les atouts historiques de la chaîne : l’accueil personnalisé, un hébergement de qualité, une restauration d'inspiration régionale, l’envie de faire partager des découvertes pour enrichir le séjour. Il y a par nature des différences entre tous nos établissements et leur singularité fait partie de la force du réseau. Le changement vient de ce que nous voulons que tous partagent le même état d'esprit et que le niveau de qualité soit cohérent avec notre classification interne en cheminées et cocottes. En demandant cet engagement plus fort de chacun, la conséquence est une perte régulière d’adhérents anciens de la chaîne. Est-ce une volonté assumée ? J.R. : Il y a longtemps que la volonté de faire partie des Logis ne se résume plus à un accès aux subventions, même si cette dimension financière reste collée à notre histoire. Oui nous perdons encore des hôtels parce que nous ne voulons pas transiger sur la démarche qualité. Elle est fondamentale pour la perception globale du réseau. Mais il y a aussi d’autres raisons à la baisse des adhésions : les cessations d’activité, la difficulté de reprise des affaires en milieu rural. Je veux aussi insister sur le fait que nous gagnons régulièrement de nouveaux adhérents qui se retrouvent dans notre démarche. Ils viennent désormais frapper à notre porte parce que la communication sur le changement porte ses fruits et que nous avons gagné en crédibilité à travers les résultats commerciaux de la chaîne. _ KB. L’objectif n’a jamais été d’épurer le réseau mais d’engager tout le monde dans une démarche Qualité et une même stratégie marketing. Ceux qui sont partis n’étaient peut-être pas d’accord ou ne pouvaient pas suivre ce mouvement.Y a-t-il à vos yeux une taille idéale du réseau ? Un retour aux 5 000 adhérents est-il envisageable ? _ J.R. : Nous ne voulons pas nous fixer d’objectif chiffré et si jamais un jour nous sommes à nouveau 5 000 Logis - ce dont je doute - c’est que tous auront accepté la démarche qualité et qu’ils poursuivent les mêmes objectifs et la même vision. Le niveau actuel permet d’asseoir une bonne couverture nationale et une grande diversité de l’offre. Il y a encore du potentiel pour élargir le cercle car nous avons aussi besoin d’un certain volume d’adhérents et d’affaires pour soutenir toutes nos actions.La crédibilisation du réseau s’est-elle manifestée auprès de nouveaux clients ? K.B. Nous sommes beaucoup plus sollicités par la clientèle Affaires qui trouvent un bon rapport Qualité Prix Plaisir. Certains préfèrent faire un détour pour être sûrs d’être bien accueillis dans un hôtel de charme. Notre démarche qualité les a rassurés sur l’absence de mauvaise surprise en termes de confort et d’équipements. Notre seconde cible majeure est une clientèle urbaine plus jeune, hédoniste, en quête de découverte et pour laquelle les Logis offrent une bonne réponse pour les courts séjours. Dans les “focus groupes”, c’est cette cible qui a le mieux répondu au changement d’enseigne qui traduit la modernité de notre démarche par rapport à une hôtellerie de charme plus vieillotte.Les Logis étant particulièrement présents sur les segments économiques, vous avez une opportunité de promouvoir des vacances à prix réduits dans un contexte de crise… Allez-vous en profiter ? _ J.R. : Nous sommes persuadés que nous sommes globalement très bien placés en termes de prix, mais nous voulons coordonner nos 3 000 adhérents autour d'une notion plus complexe de rapport Qualité Prix Plaisir. Nous avons toujours hésité à ne mettre en avant que le prix, qui est trop réducteur, car il y a d’autres facteurs aussi importants comme la découverte et la relation avec l’hôtelier. Il est vrai que nous avons un panel de prix qui rend les Logis accessibles à tout le monde. _ K.B. : Nous sommes en train de préparer une opération via le site Internet pour mettre beaucoup plus en avant les promotions avant les grandes vacances. C’est quelque chose de nouveau pour nous et pour les hôteliers qui n’aimaient pas trop communiquer sur les prix. Les choses ont évolué avec la crise. Nous cherchons la bonne adéquation entre les discounts de prix et le maintien d’une image de qualité en hébergement et en restauration.Parlons des outils qui font la crédibilité d'une chaîne. Comment ont-ils évolué ? K.B. : Nous avons tous les outils nécessaires à la commercialisation d’une chaîne hôtelière. Nous sommes précurseurs à bien des titres dans la distribution électronique. Nous avons même signé des contrats avec des poids lourds de l’e-distribution que n’ont pas signés de grandes chaînes intégrées. Nous mettons en service un nouveau site Internet en novembre 2009. Il comportera notamment un moteur de recherche par “envies”. Nous avons une offre tellement riche qu’il fallait trouver une façon de présenter astucieusement la segmentation. C’est notre travail du moment. Aujourd’hui, 95 % des réservations de la centrale transitent par Internet, sur un volume d’affaires traçable de 48 millions d’euros. Près de la moitié, environ 21 millions d’euros, provient de la réservation via notre site, y compris les affiliations. Les Etapes Affaires, en forte progression, représentent 26,4 millions d'euros et les chèques cadeaux près de 1,5 million d'euros.Cette progression vous satisfait-elle ? _ K.B. : Il faut savoir qu’à ce jour nous n’avons que 50 % des hôtels en réservation en ligne. C’est plus de 1 500 contre 400 il y a trois ans. Au fur et à mesure du renforcement de l’offre en accès direct, le volume d’affaires va croître. _ J.R. : Nous venons de loin. Nos adhérents privilégiaient le côté rassurant du cahier de réservation avec un crayon de papier et une gomme. La conjoncture bouscule un peu tout cela et amène nos hôteliers, qui sont aussi d’une nouvelle génération, à mettre leurs chambres en ligne. Nous n’avons plus besoin de les convaincre. Les chiffres de l’apport commercial à ceux qui mettent les chambres en ligne parlent d’eux-mêmes. Pour ceux qui ont la volonté de se lancer nous faisons des formations, dans leur établissement, entièrement financées par le Fafih. Tous les éléments sont mis en œuvre pour aller plus loin.Qu’avez-vous apporté de nouveau dans les modalités de réservation ? K.B. : Nous venons de mettre en service fin mars un système multi taux beaucoup plus souple qu’auparavant. Nous n’avions précédemment que deux “tuyaux” : celui de la centrale Logis vers le grand public à 5 % de commission et celui des e-distributeurs, avec des taux de commission de l’ordre de 20 %... et rien entre les deux. Le système autorise désormais d’allouer chaque jour un quota de chambres par taux de commission en ouvrant plus largement le recours à des partenaires, qui ont des conditions différentes en fonction de leur apport de clientèle. L’hôtelier peut jouer, en fonction de son remplissage, avec des canaux présentant des taux allant de 5 à 25 %.Dans le contexte de crise actuel, comment vivez-vous les rapports avec les grands partenaires de l’e-distribution ? Les conditions de rémunération se sont-elles aggravées ? _ J.R. : Nous devons faire face au paradoxe que ces géants, qui ont des millions de connexions par jour sur leur site et des dizaines de milliers d'hôtels en portefeuille, sont à la fois des concurrents et des partenaires. Ils sont totalement incontournables compte tenu des volumes qu’ils manipulent. Les taux de commission augmentent, mais je ne sais pas si c’est la crise qui en est à l’origine ou si c’est la logique normale de la concentration du secteur. Il y a de moins en moins d’acteurs qui deviennent de plus en plus puissants. Le coût des référencements dans les moteurs de recherche devient inabordable et celui des commissions très élevés, mais il faut accepter ce canal de distribution supplémentaire avec ses contraintes en faisant le maximum pour ne pas être trop dépendants. _ K.B. : Nous sommes très attentifs à la répartition des risques et qu’un ou deux partenaires de l’e-distribution ne deviennent pas majoritaires dans l’apport de réservations. Nous accentuons la communication pour diriger le grand public vers notre site.Vous êtes l’une des rares chaînes volontaires à accéder à la communication grand public via la télévision. Allez-vous continuer ? _ K.B. : Nous avons la chance aujourd’hui que les négociations avec les régies soient plus intéressantes. Nous avons entamé une campagne sur un mois dans de bonnes conditions et nous continuerons en fonction des budgets qui seront alloués. Nous sommes aussi dans une période difficile, avec des incertitudes sur l’allocation des budgets.Allez-vous élargir encore l’offre thématique des Logis ? _ K.B. : Elle est déjà bien large. Sur le site Internet, nous avons réorganisé notre offre Familles enfants, car il y a une grande demande. Nous allons aussi travailler sur une segmentation autour de la mer et de l’eau pour le prochain site prévu en novembre : les Logis à proximité de plages ou de plan d’eau et une déclinaison bien-être.Les Logis d’Exception sont-ils considérés comme une offre thématique ? _ J.R. : C’est une approche différente. Les Logis d’Exception sont une “marque fille”, la seule déclinaison à ce jour par rapport à la “marque mère”. Nous en avons 13 et il y en aura un peu plus à la fin de l’année. 80 % des premiers Logis d’Exception sont déjà adhérents et cela marque leur fidélité à la chaîne alors qu’ils pouvaient être sollicités par des réseaux qui représentaient davantage le luxe. Mais surtout de nouveaux candidats viennent nous voir. Il y a une vraie attraction pour la marque qui associe la bonne image des Logis et notre façon de fonctionner. Ils veulent profiter d’une très bonne notoriété, - nous sommes dans le Top Ten des marques hôtelières reconnues par le public - et des conditions d’adhésion plus raisonnables que dans d’autres réseaux. _ K.B. : Ils attendaient de voir si nous avions les mêmes outils que nos “concurrents”: une centrale de réservation, une démarche qualité rigoureuse, une communication modernisée. Le potentiel est assez important.Pourrait-il y avoir d’autres “marques filles” ? K.B. : Si nous avons choisi de simplifier la marque Les Logis, c’est dans une double optique. La première de favoriser l’internationalisation en se déconnectant de la racine France. La seconde est de resserrer la marque autour de ses composants ADN, les piliers que j’ai mentionnés auparavant. La thématisation autour du vin, de la pêche, du vélo… avait étiré la marque qui finissait par s’appauvrir en tant que telle. Désormais tous les segments de marché peuvent se retrouver dans Les Logis, avec une seule “exception” pour le haut de gamme. _ Comment voulez-vous aborder le défi de l’organisation interne ? J.R. : C’est un défi majeur pour décentraliser l’animation et l’accompagnement du réseau au niveau de nos structures dans chaque département et dans chaque région. Il est impossible de gérer 3 000 établissements depuis le siège parisien sans s’appuyer sur des relais forts sur le terrain. Le travail est en cours sur l’organisation territoriale et la répartition des missions et des moyens. Le plus important étant que le client s’aperçoive localement des changements conduits par le réseau.Quel est votre regard sur le processus de la nouvelle classification hôtelière ? _ J.R. : Nous sommes plusieurs réseaux à penser que la nouvelle classification hôtelière vient se rajouter à un processus que nous avions déjà engagé avec nos hôteliers et qui dans certains cas va bien au-delà de ce que réclame le référentiel de chaque catégorie d'étoiles. Nous menons des inspections complètes à partir d’une grille de plus de 500 points, en visitant toutes les chambres. Les hôteliers ont du mal à comprendre qu’ils vont devoir repayer une nouvelle inspection. Nous sommes en contact avec la Direction du Tourisme et le ministère pour faire passer l’idée qu’il pourrait y avoir des passerelles entre les audits pour les étoiles et ceux que nous faisons passer dans notre démarche Qualité. Ce serait aussi une accélération du mouvement de classification en renforçant sa crédibilisation si 3 000 hôtels recevaient rapidement leurs étoiles, sans parler des autres réseaux qui ont aussi un référentiel rigoureux. C’est un dossier difficile, mais nous sommes pugnaces et nous avons des arguments solides.Dans les autres dossiers difficiles, celui de la mono appartenance resurgit de temps en temps. Quelle est votre position ? _ J.R. : J’ai toujours dit que j’y étais plutôt favorable car l’engagement que l’on demande aux hôteliers et la mise en avant d’une marque doivent se traduire à un moment par un choix exclusif. C’est à la fois logique sur un plan marketing et dans le respect d’une forme de déontologie par rapport aux informations et aux services qui sont associés à un réseau. Les Logis se heurtent à un obstacle majeur, celui de la direction de la Concurrence qui considère qu’une telle exigence conduirait à un abus de position dominante puisque nous sommes 3 000 en Europe. Je constate que d’autres réseaux ont la même approche et qu’ils ne sont pas concernés par ce blocage. Nous allons peut-être y arriver par défaut quand tous les autres réseaux auront mis en place la mono appartenance pour leurs propres adhérents.L’année de vos 60 ans ne sera pas marquée par un congrès des Logis. C’est un choix volontaire ? _ J.R. : La célébration des 60 ans est déjà en cours avec la profonde modification engagée et la nouvelle identité visuelle des Logis. Nous fixerons sans doute un rendez-vous majeur en 2010 pour l’achèvement de notre stratégie en 11 défis.Serez-vous encore à la tête des Logis ? _ J.R. : Mon mandat au conseil d’administration doit être renouvelé dans quelques semaines. Si je suis reconduite par mes pairs, j’assurerai la présidence des Logis jusqu’au congrès de 2011. Les chantiers engagés par toute l’équipe sont trop importants pour les laisser en cours de route. Il est naturel que je les accompagne jusqu’à leur terme.(1) Les 11 défis des Logis : Incitation à la modernisation de la décoration - Valorisation des “1 cheminée” - Recruter de nouveaux adhérents - Améliorer la communication interne du réseau - Optimisation du fonctionnement du réseau - Nouvelle structure de marque - Image actualisée - Création d'une catégorie haut de gamme - Qualité plus homogène par catégorie de cheminées - Commercialisation plus active - Valoriser la restauration

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