
La Polynésie, une collectivité très autonome qui mise sur « l’accueil qui nous ressemble et nous rassemble ». La Polynésie française occupe une place à part dans la République française à un peu plus de 17.000 km de la métropole. Elle s’étend sur une vaste zone maritime de 2,5 millions de km2 au cœur du Pacifique sud, l’équivalent peu ou prou de la surface de l’Europe. (Brice Duthion)
La Polynésie française compte un peu moins de 300.000 habitants répartis sur soixante-seize îles habitées et une zone économique exclusive de 5,5 millions de km2. La démographie polynésienne a été très impactée par la pandémie du Covid-19, l’espérance de vie à la naissance en a été nettement impactée (en 2021, 71,5 ans pour les hommes et de 76,3 ans pour les femmes).
Ces îles, dont certaines vides de toute présence humaine, sont regroupées en cinq archipels : l’archipel de la Société qui réunit les îles du Vent (dont Tahiti qui concentre les deux-tiers de la population) et les îles Sous-le-Vent (dont Bora Bora), l’archipel des Tuamotu composé de soixante-dix-huit atolls coralliens, l’archipel des Gambier, l’archipel des Marquises (dont Hiva Oa) au relief très découpé et aux côtes rocheuses à falaises escarpées et l’archipel. La majorité des îles sont d’origine volcanique.
La Polynésie française est une Collectivité d’outre-mer dotée depuis quarante ans d’un régime original d’autonomie, renforcé par une loi organique de février 2004 et garanti par l’article 74 de la Constitution. Elle est compétente dans de nombreux domaines, sauf ceux relevant des missions régaliennes de l’État (monnaie, défense, sécurité, relations extérieures mais dessertes maritimes et aériennes).

Un Haut-commissaire de la République y représente l’État. Quatre institutions structurent la vie de la Collectivité polynésienne : le Président (élu pour cinq ans), le gouvernement, l’Assemblée et le Conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC).
Le PIB de la Polynésie française est estimé à 613,4 milliards de Francs Pacifique en 2021 (soit environ 5 milliards €). Le PIB par habitant s’élève à 1,97 million de Francs Pacifique (18.300 €, la moitié environ du PIB par habitant en France métropolitaine). Le poids des secteurs est variable : les services marchands représentent plus de la moitié de la valeur ajoutée (52%), les services non-marchands un tiers (33%) et l’industrie à peine un-huitième (12%).
Les ressources propres des archipels polynésiens, c’est-à-dire les principales ressources exportées dépendant principalement du tourisme, pour plus de 80% de leur valeur (en moyenne, sur les quinze dernières années plus de 43 milliards de Francs Pacifique). Les secteurs qui génèrent également des revenus internationaux sont la culture de la perle (7 milliards) et marginalement la pêche, la vanille ou le monoï.
Le tourisme polynésien, une mono-industrie qui dépasse ses meilleures performances
Le tourisme représente donc une quasi mono-industrie en Polynésie française. En 2022, 219 000 touristes non-résidents ont visité la Polynésie française et consommé près de quatre millions de nuitées touristiques. Ils ont dépensé 77 milliards de F.CFP au cours de leur séjour (contre 65 milliards en 2018 et 27 milliards en 2021), soit plus de cinq fois la valeur des exportations de produits locaux qui s’élève à 15 milliards de F.CFP.

Le poids du tourisme dans l’économie polynésienne équivaut en moyenne à 12% ou 14% du PIB et sans doute un peu plus en estimant les retombées indirectes. En 2019, plus de 3.600 entreprises travaillaient directement dans le secteur touristique (7,5% du nombre total d’entreprises), pour près de 12.000 emplois salariés (près de 18% des emplois salariés en Polynésie française) et 2.000 emplois non-salariés. Fin 2022, 4.600 travaillaient dans le secteur.
Entre 2010 et 2020, l’hôtellerie – restauration-tourisme a représenté plus de 20% des offres d’emplois. En 2019, avant le Covid qui est devenue l’année de référence en période de reprise d’activité, les entreprises touristiques ont représenté plus de 16% du chiffre d’affaires global des entreprises du pays (pour 155 milliards F.CFP), dont plus d’un tiers pour l’hébergement et autant pour le transport aérien.
Le tourisme polynésien a retrouvé une belle vigueur
Depuis l’année dernière, en 2022 et 2023, le tourisme polynésien a retrouvé une belle vigueur. La fréquentation des touristes internationaux a approché celle de 2019 et l’a même dépassée (+20% en mars 2023 par rapport à mars 2019). La Polynésie a même battu son record de fréquentation l’année dernière en attirant plus de 260.000 touristes en 2023, une année record, soit +20% de plus qu’en 2022, et 11% de plus qu’en 2019, dernier record en date.
Si la durée moyenne de séjour est passée de 17,1 jours en 2022 à 15,8 en 2023, les dépenses par touriste ont augmenté́ de 18% en 5 ans. En 2023, les recettes touristiques s’établissent à 712 millions d’euros (+21% par rapport à 2019), une augmentation expliquée en grande partie par la hausse des tarifs hôteliers. Les principaux marchés émetteurs étant les Etats-Unis (plus de 40 %), la France (33 %), l’Europe (plus de 10 %) et la zone Pacifique (7 à 8%).
Une clientèle internationale majoritairement américaine
Les Etats-Unis demeurent les plus importants pourvoyeurs de touristes en Polynésie française. Cela s’explique par le nombre de liaisons aériennes depuis la côte Ouest (Los Angeles, San Francisco et Seattle), la parité avantageuse du dollar US vis-à-vis du franc Pacifique et la reprise des croisières locales (1.000 escales comptabilisées en 2022, près de 1.400 en 2023).
Les Français de métropole privilégient l’hébergement terrestre pour des durées de séjour d’un mois environ. Le secteur hôtelier polynésien a ainsi bénéficié du retour de ses clientèles étrangères. L’hôtellerie internationale accru en 2022 ses capacités. Le nombre de chambres offertes s’affiche à +23 % par rapport à 2021 (865 000). Les taux d’occupation (près de 70%) et RevPAR (41 000 F CFP) ont même dépassé en 2022 leurs niveaux de 2019.
Une forte diversité de l'offre en hébergements touristiques

Sur l’ensemble des entreprises affiliées au tourisme, un tiers appartient au secteur de l’hébergement. En 2022, 40 établissements font partie de groupes internationaux, dont un tiers de 4 ou 5 étoiles, pour près de 2 000 chambres. Ils sont implantés principalement à Tahiti (10), Bora Bora (9) et Moorea (8). Trois villas de luxe complètent l’offre, aux îles Sous-le-Vent (Bora Bora, Raiatea) et aux Tuamotu (Nukutepipi). Dans chaque archipel, des pensions de famille offrent des capacités complémentaires d’hébergement. 284 pensions, dont une cinquantaine labellisées, sont répertoriées en 2022 pour une capacité d’accueil de près de 1.400 chambres. En 2022, cinquante d’entre elles ont obtenu un label, attestant de la qualité́ de leurs prestations. En parallèle, en 2022, le Service du tourisme recense en Polynésie française près de 1.500 meublés du tourisme (à peine 1.000 en 2021) et 61 établissements à vocation touristique (camping, auberges de jeunesse et motels) pour une capacité globale de plus de 2.300 chambres.
La Polynésie souffre encore d’un déficit de capacité hôtelière
La demande touristique a donc augmenté. Et pourtant, l’InterContinental Moorea, les Méridien Tahiti et Bora Bora et les deux Sofitel de Bora Bora n’ont pas rouvert leurs portes depuis la crise Covid. La Polynésie souffre d’un déficit de capacité hôtelière. Un problème structurel pour le développement de l’activité́ touristique notamment sur la haute saison touristique. « Il manque environ 500 chambres par rapport à 2019 », selon Jean-Marc Mocellin, directeur général de Tahiti Tourisme.
Des démarches sont menées pour convaincre des investisseurs locaux et étrangers pour aider au développement d’autres formes d’hébergements (pension de famille, meublés touristiques...). En parallèle, la Polynésie relance le Village tahitien, un projet de six hôtels à Tahiti à 500 millions d’euros pour près d’un millier de chambres. Ce projet hôtelier est une « sorte d’Arlésienne polynésienne ». Annoncé à de nombreuses reprises, la Polynésie a proposé́ l’établissement des baux emphytéotiques de 99 ans afin « d’être en adéquation avec l’importance des investissements ».
« Fa’ari’ira’a manihini » : une stratégie pour 2027
Pour définir la stratégie globale du tourisme et de l’hospitalité polynésienne, une stratégie touristique a été élaborée par la collectivité, « Fa’ari’ira’a manihini : l’accueil qui nous ressemble et nous rassemble ». Cette stratégie 2022-2027 repose sur trois piliers : atténuer les effets de la crise, relancer l’industrie touristique, développer un tourisme inclusif et durable.

Cette nouvelle stratégie de développement touristique de Tahiti Et Ses Îles dévoile un plan d’actions ambitieux qui protège les ressources naturelles, optimise les retombées du tourisme pour la population locale et privilégie une expérience de qualité pour les visiteurs. L’un des principaux axes de la stratégie « Fāri’ira’a Manihini 2027 » consiste à gérer le flux touristique, qui devrait atteindre 280.000 visiteurs d’ici 2027.
Ce seuil permettrait de maintenir l’objectif d’un ratio relatif à un habitant pour un visiteur, la population actuelle étant de 278.781 habitants selon le dernier recensement (2022). « Tahiti Et Ses Îles doit rester une destination « Slow Tourisme » selon Jean-Marc Mocellin, « un petit coin de paradis avec un service exceptionnel, axé sur les expériences, la culture et les rencontres avec la population locale ».
« L’objectif de Fari’ira’a Manihini 2027, est de faire en sorte qu’un lien authentique et sincère se renforce entre ceux qui viennent d’ailleurs et ceux qui, ici, acceptent de les accueillir ». La destination s’engage également à suivre la stratégie touristique établie par le Conseil Mondial du Tourisme Durable (Global Sustainable Tourism Council – GSTC) à l’instar de l’élaboration de la stratégie touristique du SPTO (Pacific Tourism Organisation) dont Tahiti Et Ses Îles est membre.
