Entretien avec Corinne Menegaux, Directrice générale de l'Office du Tourisme et des Congrès de Paris. Une discussion avec Vanguélis Panayotis, CEO MKG Consulting.

Vous étiez prêts à faire les campagnes de relance pour la destination Paris. Que s’est-il passé ? Vous avez tout remis dans les cartons ?

Nous avons en effet mis en attente un certain nombre de choses, mais elles sont prêtes à ressortir. Nous sommes prêts pour une éventuelle reprise dès qu’elle se présentera, mais il est vrai que nous ne nous attendions pas à autant de restrictions. Nous avions un certain nombre de professionnels qui avaient commencé à rouvrir et qui se projetaient notamment sur des fêtes de fin d’année.

Aujourd’hui, nous sommes beaucoup plus circonspects et prudents sur ces perspectives parce qu’elles nous semblent compliquées. Nous chercherons quand même à faire des choses pour animer le secteur, mais je pense qu’il est plus raisonnable de se projeter sur une année 2021 qu’à court terme.

Qu’apporte l’Office de Tourisme et des Congrès de Paris en termes de soutien aux professionnels du tourisme à Paris ?

Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet au mois de mars. Malheureusement, nous avons un certain nombre de professionnels qui continuent à avoir besoin d’aide sur l’application des mesures, notamment gouvernementales. Nous intervenons auprès d’eux avec beaucoup de pédagogie. Nous servons d’experts pour répondre à des questions plus précises. Nous sommes d’ailleurs en train de plaider pour faire prolonger les mesures d'accompagnement aux professionnels pour l’année 2021.

Nous sommes aussi dans l’accompagnement. Nous avons nos adhérents tous les mois au téléphone sur un grand call général. Nous faisons un point sur la conjoncture, les perspectives – même si ce n’est pas toujours facile en ce moment – les mesures, les changements et ce que cela implique pour eux en termes d’activité.

Nous essayons d'aller plus loin et de travailler sur une logique de reprise en 2021 en capitalisant sur l'expérience déjà, malheureusement, acquise. Nous travaillerons sur des sujets plus thématiques par secteurs d'activité.

Il y a deux volets : un premier volet qui est de renforcer les accompagnements pour aider les professionnels à passer cette crise et préserver notre outil productif. Un deuxième volet qui est de mettre en place de nouveaux outils afin de sortir plus forts et mieux préparés. Avez-vous quelques exemples concrets à partager avec nous ?

Plus d’actions précises sur le tourisme d’affaire qui demandera certainement un accompagnement plus fort et un travail sur la manière d’accueillir. Par exemple, accompagner les événements à mieux travailler en termes de promotion et de réassurance sur l’état de la destination, y compris sur les mesures sanitaires quand cela sera de nouveau possible.

Chacun travaille sur ses propres mesures et son propre protocole, ce qui est légitime et totalement professionnelle de la part de chacun. En revanche, lorsqu’un visiteur vient à Paris, il a besoin de savoir tout ce qui se passe autour de son événement ou de son hôtel. Nous devons le rassurer sur chaque étape de son voyage. C’était l’objectif de la charte « Caring attitude » que nous avons lancée il y a quelques mois. Nous sommes dans la pédagogie autour de cette charte, ce sont des outils ludiques et sympathiques pour expliquer comment votre voyage à Paris va se dérouler.

Pouvez-vous nous en dire plus sur cette charte ?

L’idée de la charte, c’est de pouvoir travailler sur l’ensemble du parcours client c’est-à-dire de rassurer un client en lui disant « Voilà ce qui se passe à l’aéroport, quand vous prenez un taxi ou un VTC, quand vous arrivez au restaurant, à votre hébergement ou dans un événement... ». Autrement dit quelles sont les mesures qui sont mises en place et quelles sont les garanties que nous vous proposons.

C’est vraiment utile. Nous pouvons le constater lorsque nous gardons du lien avec les professionnels à l’étranger. Ils sont très demandeurs de cela parce qu’ils ont aussi besoin de rassurer leurs clients et dire que Paris s’est mobilisée à toutes les échelles.

Nous avons trois grands piliers : la sureté, la réassurance et la sécurité économique. Pensez-vous que Paris puisse arriver de façon unie à rassurer les voyageurs de demain ? 

Sur les deux premiers sujets, nous avons fait une démonstration d’un collectif efficace et de mesures globales sur laquelle Paris s’est extrêmement impliquée. Chacun doit faire l’effort à son niveau, mais il est important que la ville ait un discours destination qui permet de rassurer.

Sur les sujets de sureté, nous avons un indice de sécurité assez bon. Nous étions dans le top 3 ou 4 des villes qui étaient réputées pour leur protocole sanitaire. Je ne pense pas qu’il y ait une inquiétude de la part des voyageurs d’affaires ou de loisirs.

Concernant le troisième sujet, nous allons commencer à l’aborder, car personne ne mesurait vraiment l’ampleur de la crise jusqu’à présent. Je pense que ces nouvelles restrictions vont nous amener à travailler différemment. C’est un sujet que je porte fortement aux pouvoirs publics en disant : « Nous avons une responsabilité collégiale et gouvernementale d’aider les professionnels pour être sûrs qu’ils puissent répondre à l’appel quand nous allons redémarrer dans six mois ou dans un an ».

Aujourd’hui, nous avons une chance et c’est en même temps une problématique, d’avoir beaucoup d’indépendants à Paris. C’est une vraie diversité en termes d’offres, que ce soit en hôtellerie, en restauration ou en activités, mais malheureusement ce sont eux qui sont les plus malmenés. Le gouvernement fait quand même beaucoup d’efforts et je pense que nous aussi, nous allons avoir un rôle d’accompagnement moins économique, mais plus sur une dimension marketing : « Comment fais-je pour redémarrer ? » ou « Comment je remets mes équipes au travail après neuf mois d’absence ? ». Pensons aux cabarets et aux salles de spectacles, qui sont arrêtés depuis longtemps.

Ce sont des sujets qui ne sont pas faciles à porter et je pense que l’OTCP a un vrai rôle à jouer. Cela fait partie des sujets sur lesquels nous allons nous mobiliser avec l’aide d’experts. C’est important qu’il ait l’opportunité d’échanger avec des gens qui peuvent faire débattre avec eux de leurs idées, les accompagner ou leur dire des choses qui ne sont pas faciles à entendre, mais essentielles pour redémarrer. Nous jouons ce rôle de conseil et je pense c’est primordial.

Nous savons que lorsque les choses vont repartir, toute cette concurrence qu’il y avait entre les grandes agglomérations va revenir. Il y a des destinations européennes et internationales qui vont probablement vouloir revenir de manière agressive. Avons-nous quelques armes secrètes ? Comment allons-nous maintenir voire profiter de cette situation ?

La situation est très différente d’autres situations que nous avons vécues puisque nous n’avons pas de concurrence internationale déloyale. Nous sommes tous au même niveau.

Nous échangeons beaucoup avec les autres capitales européennes ou avec des villes comme Londres et New York qui sont pour nous nos benchmarks les plus importants. Nous sommes d’ailleurs en train de réfléchir depuis quelques mois sur des opérations que nous pourrions faire ensemble. Nous sommes plutôt sur une logique commune de défense du tourisme urbain et du tourisme d’affaires.

L’effort collectif dont nous parlions tout à l’heure prendra également son sens au niveau international. C’est l’occasion pour Paris d’accélérer des changements que nous avions déjà initiés, qui étaient des tendances émergentes depuis quelques années avec un Paris très expérientiel, plus green. C’est l’occasion de travailler sur ces sujets de manière plus collégiale sur un tourisme plus local et les clientèles de proximité, mais également comment allons-nous faire mieux vivre les évènements ? Comment pouvons-nous travailler mieux main dans la main avec la ville et ses habitants ? Il y a beaucoup de choses à gagner de ce travail. Nous accueillons des congrès qui sont incroyables en termes de contenu. Nous avons de vraies opportunités et c’est peut-être l’occasion de pouvoir les mettre en œuvre.

Quelle est ta conviction par rapport au télétravail sur les comportements tourisme d'affaires ?

Avec du recul, je pense que nous verrons des changements de comportements assez forts sur certains sujets. Je reste assez convaincue que le voyage d’affaires quotidien aller-retour dans la journée va probablement fortement diminuer. En revanche, et je l’espère, au profit de voyages plus longs et plus contributifs pour la ville. C’est plus intéressant en tant qu’acteur du tourisme d’avoir des gens qui restent deux ou trois jours, que certains qui font l’aller-retour dans la journée et consomme assez peu.

Avec les difficultés que nous avons aujourd’hui, nous continuerons d’avoir des offres très intéressantes. Il y aura toujours de la créativité sur ces sujets. Je pense donc que ce type de comportement sera plus simple à gérer pour Paris que pour d’autres villes qui ont moins d’offres à faire valoir.

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