
Céline Moscheni, architecte d'intérieure des particuliers et des boutiques, répond aux questions pourquoi avoir réalisé coup sur coup deux établissements hôteliers.
Je suis pratiquement née dans un hôtel…un hôtel Accor bien sûr, mon père ne nous aurait jamais emmené chez la concurrence ! Je cultivais depuis mon diplôme d'architecte d'intérieur, le rêve de pouvoir un jour aménager et décorer un hôtel, mais j’avais besoin d’acquérir l’expérience et la technicité : les hôteliers sont des personnes exigeantes, avec des budgets très précis et des délais particulièrement courts, il me fallait être organisée, et aujourd’hui, j’ai une équipe solide.Quels sont ces exigences qui vous ont fait hésiter ?Une fois bien entourée, je n’ai pas hésité ! C’est vrai qu’il y a une exigence de délai qui s’impose en raison de l’activité commerciale d’un hôtel. Il faut donc être capable de tout mener de front dans un respect de planning impératif, avec une équipe suffisamment étoffée pour traiter avec le client, les fournisseurs et les entreprises en même temps. Le respect du devis fait aussi partie des exigences puisqu’il est budgété de manière rigoureuse dans les comptes. Il n’est pas question de faire une erreur d’appréciation. En plus, très souvent, il faut réaliser les travaux sans fermeture de l’établissement. Cela impose une organisation du chantier par zone, avec des solutions alternatives pour les clients qui limitent les désagréments et la perte de chiffre d’affaires. Une quadrature compliquée.Est-ce qu’il y a une «signature» Céline Moscheni qui se retrouve dans vos projets ?Je n’ai pas cette prétention, mais je suis attachée à un certain nombre de principes existants dans tous mes projets : un lieu, que ce soit une maison, un appartement ou un hôtel, devra être élégant et chaleureux (la convivialité vient certainement de mes origines Italiennes) ; je dessine des intérieurs avec des matériaux contemporains mais intemporels, des matières parfois très modernes, parfois vintage mais toujours nobles et j’aime la couleur : qu’elle soit lumineuse, minérale ou parfois rétro, elle est très importante dans tous mes projets. La lumière… c’est la lumière qui va créer les ambiances, les lieux de vie, de repos, de convivialité et d’espaces plus intimes éclairés à la lueur des bougies. Une belle architecture mal ou pas éclairée peut être complètement gâchée. Qu’elle soit naturelle ou artificielle, une belle lumière est indispensable. Et enfin, le mobilier, j’attache une importance au confort, et à la beauté des matières et cela nous a conduit, au sein de l’agence a dessiner une ligne de mobilier, que nous allons bientôt éditer ainsi que des concepts de structures que nous allons breveter.Comment avez-vous interprété ces principes dans vos réalisations, comme le Novotel Porte d’Orléans ? C’est le premier projet hôtelier d’envergure que nous avons aménagé et décoré. Le propriétaire, que je remercie, nous a fait confiance et nous a laissé beaucoup de liberté, ce qui n’est pas toujours le cas. Cet hôtel nous donnait la sensation d’un hall de gare, d’un lieu plein de courants d’air et situé porte d’Orléans sur les périphériques…. pas très sexy tout cela, nous avons donc repensé tout le hall et le bar de l’hôtel afin de se protéger des nuisances extérieures et d’en faire un lieu élégant et chaleureux. Malgré son imposante hauteur sous plafond, nous avons voulu créer un lieu à échelle humaine : Nous avons dessiné 2 immenses «cabanes tulipes» qui encadrent l’entrée et qui offrent un espace de business lounge privatisé et intimes, autour duquel s’articule tout l’hôtel : entre ces 2 cabanes tulipes, la réception, lumineuse et accueillante. Puis un lounge dissimulé à travers des voilages où le plafond est beaucoup plus bas et où l’on peut voir sans être vu, puis un lounge de travail et de consommation, qui s’articule autour du bar restaurant sous un ciel de suspensions lumineuses. Dans la montée d’escalier, une bibliothèque a été dessiné et aménagé «comme chez un particulier», toujours dans le souci d’en faire un lieu vivant. Tout le mobilier a été spécialement dessiné pour cet hôtel qui en fait aujourd’hui un hôtel évidemment d’affaire mais aussi un lieu de rendez vous ou l’on prend son temps.Quand vous revenez êtes-vous surprise par l’appropriation de vos espaces par les clients ?Je dois dire que la réaction des clients est très favorable et dans l’esprit que nous avions imaginé. Le hall auparavant peu accueillant est aujourd’hui occupé par des femmes et hommes d’affaires qui organisent leur réunions dans les alcôves ou dans les lounges, par des familles qui s’installent dans les cabanes, surfent sur le net ou lisent la presse , et le bar a multiplié sa fréquentation. Mon équipe et moi retournons avec beaucoup de plaisir et de fierté dans cet hôtel, qui est à présent un peu le notre, au moins sentimentalement..Le projet du Mercure de Valescure était-il d’une autre nature ? Oui, une tout autre manière de travailler. C’était un ancien hôtel Latitudes, conçu pour les séminaires, quasiment abandonné pendant des mois avant d’être revendu à des investisseurs privés qui le relance comme un hôtel d’affaires et de loisirs Mercure. Compte tenu de la faible activité du début, le projet initial était un «relookage» léger de l’accueil et du restaurant en attendant des jours meilleurs. Mais en insistant un peu (pas tant que ça d’ailleurs…) j’ai réussi à convaincre les investisseurs de se lancer dans un véritable réaménagement du hall d’accueil et du restaurant pour casser l’image de l’ancien établissement et créer une véritable rupture. Le budget a «presque» été respecté. Nous avons évidemment conservé les grandes salles de réunions qui seront décorées dans un second temps. Le hall d’entrée était encombré par une estrade qui coupait l’espace et en faisait plus un hôtel d’hivers, tourné vers l’intérieur… Or, nous sommes sur la Côte d’Azur, la région la plus ensoleillée de france. Nous avons pensé cet hôtel comme un hôtel d’été, sans aucune rupture entre l’intérieur et l’extérieur, avec une grand allée blanche qui vous accompagne sur la vue dégagée de la pinède et des 2 piscines de l’hôtel. Une fois de plus, un travail particulier a été fait sur les couleurs, que j’ai voulu estivales, ensoleillée et gaie et sur la lumière qui permet, le soir tombé de se lover à l’intérieur dans une ambiance confortable et feutrée.Et demain ?On continue, évidemment… Ces deux premiers projets ont été très bien accueillis, tant par mes clients (les propriétaires de ces hôtels) que par les clients des hôtels, cela donne confiance et mon équipe est très enthousiaste à chaque nouveau projet d’hôtel. Nous sommes en ce moment sur un projet d’hôtel à Arcachon et à Dax dont les travaux vont commencés fin 2012, et 2013, et puis d’autres hôtels… en perspective. Les hôtels me passionnent et nous espérons continuer à évoluer dans cette grande famille qu’est l’hôtellerie.www.moha-architecture.com
