Au moment où les déconfinements et les réouvertures de frontières s’amorcent partout dans le monde et que notre secteur guette la lumière au bout du tunnel, prenons une dernière fois le temps de l’introspection.
Le Covid-19 nous a gratifié d’un nouvel élément de langage avec la « distanciation sociale ». Le terme est maladroit, et nous sommes heureux de constater qu’on lui préfère maintenant l’emploi de distanciation physique : il n’est pas franchement plus heureux, mais c’est déjà mieux.
En effet, la socialisation est l’essence des relations entre humains : nous nous définissons comme des animaux sociaux. Cette socialisation est également au cœur de notre métier.
Notre industrie touristique se revendique souvent comme une fabrique de souvenirs et d’expériences. Cela va au-delà de la fonction de nos équipements ou services, c’est-à-dire dormir ou se déplacer lorsqu’on y est « contraint ». C’est d’ailleurs l’un des principaux travers que la distribution moderne de notre secteur a mis en évidence, renvoyant les acteurs face à la « commoditisation » de leur offre : les résumant à un tarif, à une date et à un lieu donnés. Evidemment, la nature ayant horreur du vide, cela a ouvert une opportunité pour les offres alternatives, parfois mieux adaptées et plus riches de sens pour les voyageurs.
L’offre étant la « Materia prima » de notre secteur, il appartient aux alchimistes de notre industrie d’accompagner la transmutation nécessaire de notre secteur, comme leurs pères en leur temps l’avaient fait au cours des années 80-90 avec des nouveaux concepts industrialisés parfaitement alignés avec les attentes de leurs contemporains, transformant ainsi l’offre qui les précédait.
Le contexte de démocratisation des transports et la mondialisation grandissante l’ont ensuite accompagné à merveille.
Avec une humanité qui est passée de plus en plus du rural vers l’urbain, les boutique hôtels sous toutes leurs formes ou autre Airbnb ont su répondre à la nécessaire mutation, forçant la précédente vague d’offre à se remettre en question.
Les crises, quelle que soit leur nature (économique, guerre ou pandémie), entrainent souvent l’évolution des sociétés. On l’a vu avec la crise de la vache folle ou encore les attentats du World Trade Center. Ces traumatismes marquent notre mémoire collective et nous font évoluer.
Justement, ne dit-on pas que dans toute crise, les sages savent y voir des opportunités ?
La première des opportunités est l’occasion qu’elle nous offre de faire un travail d’introspection, et avec le confinement que le Covid-19 nous a imposé, on peut dire qu’on a été servi. Sur un plan personnel, elle a peut-être permis à chacun de se reconnecter à ses fondamentaux, d’aller au plus proche des messages murmurés par notre âme. Je vous propose d’essayer, avec humilité, de faire celle de notre industrie de l’hospitalité en allant chercher au plus profond des racines de ce secteur du tourisme.
Qu’en est-il de l’âme de notre secteur ? On y verrait que c’est sans aucun doute l’hospitalité de l’âme. Cette âme qui caractérise et personnalise chaque individu, celle qui est sensible à l’empathie sincère, au soin apporté dans les attentions et les détails.
Cette hospitalité de l’âme, de l’individu, ne fait pas de distinction entre celle du voyageur ou celle du voisin. Les équipements hôteliers vont muter, s’adapter et être plus hybrides, c’est à dire mieux équilibrés entre les clients locaux et ceux de passage.
On avait déjà identifié que les attentes du consommateur s’orientent vers de l’authenticité, de la cohérence avec son environnement local, du sens dans la durabilité écologique des modèles, mais également de l’engagement au niveau social. Telles sont donc les aspirations de l’âme de nos contemporains.
Notre mission doit s’articuler à satisfaire toutes ces aspirations, que ce soit celles de nos clients locaux, des voyageurs que l’on accueille, de nos collaborateurs, mais aussi de nos partenaires et fournisseurs, sans oublier notre communauté locale.
Voilà une grande mission, pleine de sens, permettant à nos collaborateurs d’avoir de l’impact dans leur métier au quotidien et d’y développer des passions pour ce secteur, trop souvent absentes ces dernières années.
Pour le reste, c’est-à-dire ce qui appartient au monde matériel, nous allons devoir accélérer nos mutations tant sur le digital, les gains de productivité, la souhaitable évolution de la distribution… pour n’en citer que quelques-uns.
Réjouissons-nous à la perspective de pouvoir écrire de nouvelles lignes de notre histoire sur des pages blanches. Cette pandémie permettra de rebattre les cartes de situations qui nous semblaient figées et que nous observions parfois avec trop de fatalité.
La perspective peut être réjouissante, elle n’en masquera pas moins la réalité des prochains semestres, plus dure et sûrement plus brutale que ce que nous avons pu connaître jusqu’à présent.
Nous avions invoqué un changement profond : nous voilà donc servis sur le niveau de secousse nécessaire.
Il ne nous reste plus qu’à espérer que le Covid revêt les vertus de la catharsis dont semble t-il notre secteur avait besoin.
Mais l’âme de notre métier ne change pas, nous sommes et resterons profondément des animaux sociaux en besoin d’interactions et de partages sincères avec les autres.
C’est bien là, l’âme de l’hospitalité.