Édito

Connais-toi toi-même ! Une maxime qui devrait s’appliquer au tourisme

Le tourisme a-t-il achevé sa mutation pour s’offrir une nouvelle dimension ? La question mérite d’être posée pour confirmer la nouvelle orientation qui se dessine après la sortie de crise. On ne parle plus simplement de voyage mais plus largement de divertissement, de paix sociale, de convivialité familiale, voire de réconciliation sociétale…

Mais déjà, pour concrétiser cette dimension supplémentaire, faudrait-il en définir les contours, sans chercher forcément à le réinventer.

Le tourisme est désormais reconnu comme l’une des premières activités économiques mondiales. Petit à petit, sa contribution économique au PIB est prise en compte, même pour les pays les plus industrialisés.

Il n’y a pas si longtemps, sa valeur ajoutée n’était qu’anecdotique ou exotique. Elle est désormais élevée au stade de « priorité nationale », au moins dans les discours et dans l’élaboration de plans stratégiques.

La crise récente a contribué à lui découvrir des vertus insoupçonnées de ressourcement, de (re)découvertes locales, de prise de conscience environnementale. Mais ce n’est que le début d’un cheminement qui n’efface pas totalement des images persistantes.

Il faut le reconnaître, le simple mot de Tourisme véhicule encore toutes sortes de caricatures qui n’arrangent pas sa perception. « L’homme est laid », disait Michel Serrault dans un film parodique de Jean Yann… que dire du « touriste » quand il s’acharne à endosser son costume de vacances. Comment justifier son accoutrement hétéroclite par le seul fait de visiter un pays ou une région hors de son environnement habituel ?

Par leur comportement, les touristes contribuent encore à cette image négative et une forme de rejet quand leur présence est trop visible. Pourtant, c’est justement pour apprécier une vie, une culture, une ambiance différente de leur quotidien qu’ils sont venus dans des destinations qui ont forgé leur identité au fil des siècles.

Heureusement, les différents confinements, et surtout leurs sorties vécues comme une libération, ont apporté une nouvelle dimension au tourisme, ont mis en avant son rôle social, voire sociétal. La crise a modifié des valeurs traditionnelles. La définition du luxe s’éloigne de l’ostentatoire pour privilégier l’expérience unique, émotionnelle, réservée à un petit nombre. Plus largement, les vacances traditionnelles insistent davantage sur les moments de retrouvailles et de partage, que sur le simple farniente.

Du coup, est-ce que l’on peut encore se limiter à parler de tourisme ? Le terme parait aujourd’hui trop étriqué pour embrasser ces nouvelles attentes. Il ne recouvre plus totalement les services qu’elles peuvent générer. L’activité touristique reste une « industrie », voire une industrie de masse qui pèse de tout son poids sur le PIB, mais elle peut évoluer vers une nouvelle expression, plus proche de l’air du temps et plus porteuse de valeurs positives.

Dans un mouvement de balancier perpétuel, on se rapproche des origines : quand les voyages, proches ou lointains, étaient une rupture du quotidien, justifiés par la curiosité ou la nécessité. Il y a quelques siècles, Pascal a théorisé la notion de divertissement. Elle était pour lui une façon d’échapper à sa condition, une diversion du quotidien pour des activités ludiques ou plus sérieuses. Même s’il avait tendance à condamner cette échappée vis-à-vis du réel, on peut y trouver une motivation fondamentale du tourisme et des voyages.

Sortir de ses habitudes, découvrir de nouveaux lieux, partager de nouvelles sensations sous toutes leurs formes sont autant de motivations qui devraient animer les visiteurs. On quitte un tourisme conquérant pour une approche plus discrète où – idéalement – les voyageurs se fondent dans une vie locale qu’ils sont venus partager.

Le tourisme change de dimension pour s’élargir à une Hospitalité qui prend tout son sens, puisqu’il faut accueillir les voyageurs, les héberger, les accompagner, leur rendre – leur vendre – les services qui font les retombées économiques tant appréciées.

Cette nouvelle approche de l’économie touristique est renforcée par les évolutions de comportement des voyageurs eux-mêmes. Les frontières sont aujourd’hui beaucoup plus poreuses entre le travail et le temps libre, entre les activités professionnelles et personnelles. De nouveaux barbarismes linguistiques traduisent ces nouvelles pratiques : workation, staycation, bleisure, workspitality,… qui rendent de plus en plus caduque la séparation claire entre les moments de vie.

Face à ces changements, les opérateurs touristiques répondent déjà par de nouveaux concepts : coworking, coliving, hybridation… même si leurs modèles économiques restent à affiner. D’autres sont à inventer avec cette préoccupation constante de produire les meilleures prestations et expériences.

Ne l’appelez plus Tourisme, le tourisme est une chimère ! Il faut désormais parler d’accélération des émotions et c’est bien toute la vocation de l’Hospitalité !

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