Au moment où nous abordons la dernière ligne droite avant la fin d’une année 2020 pour le moins particulière, beaucoup annoncent un monde de demain, un hôtel de demain, un tourisme de demain… La pandémie apporte un souffle nouveau à nos métiers, et nous n’aurons pas assez de nos deux mains pour bâtir ce nouveau monde.
Personnellement, je pense que le monde de demain était déjà là hier. Discret, mais bien présent. Certes moins perceptible qu’il ne le sera demain, mais nombre de faisceaux faibles étaient déjà clairement identifiés. On l’a dit et redit, nos clients veulent davantage d’expérience, donner plus de sens à la consommation de biens et services liés au secteur de l’hospitalité, sont à la recherche de saveurs locales et d’empathies sincères. A tous les niveaux, nous devons passer de la commodité du service à la quête insatiable d’expérience pour le client.
On l’a vu aussi avec les marques, dans tous les secteurs. Prôner une volonté de faire du développement durable ou d’être une entreprise responsable ne suffit plus : il faut maintenant l’incarner avec significativement plus d’authenticité et de sincérité qu’il y a 5 ans. L’heure n’est plus au « greenwashing » ou au « corporate bullshit ». Que l’on soit d’accord ou non, à l’heure des avis clients en ligne, le « name & shame » donne le pouvoir à chaque citoyen de dénoncer publiquement, ou du moins sur les réseaux sociaux, les pratiques qu’ils jugent socialement inacceptables. Ainsi, la réputation dépasse le service ou le produit fourni. Mesurer sa réputation c’est bien, la piloter c’est mieux. La qualité est le résultat d’un processus, celui de la production du service (servuction).
Il ne s’agit pas que de séduire les clients, mais aussi ses propres collaborateurs. Ceux à qui on cherche à donner du sens, qu’on souhaite embarquer dans le projet de l’entreprise. Tout comme les clients, ils observent, scrutent et jugent les démarches opportunistes et marketing en opposition à celles qui transforment en profondeur l’ADN des sociétés.
Clients, collaborateurs, la liste ne s’arrête pas là : ces réflexions concernent tout autant les investisseurs pour le financement, les mairies pour les projets d’implantations, etc.
Concernant l’ADN de nos produits et services dans notre secteur de l’hospitalité, peut-on vraiment parler d’évolution ? Je dirais plutôt un retour à ce qu’étaient les valeurs séculaires de notre métier. Après 30 ans d’industrialisation et de standardisation de nos concepts, depuis une décennie certains produits ont catalysé les nouvelles attentes de nos contemporains et montré la voie.
Au-delà du changement des attentes des clients, les modèles d’investissement évoluent également. Si l’eau s’évapore sous le soleil, il ne semble pas que ce soit le cas des liquidités de la finance sous les feux du COVID-19, du moins pour l’instant. Elles attendent patiemment des cieux plus lisibles et seront l’un des acteurs de la restructuration du marché, mais pas seulement. Le montage classique entre OPCO pour l’exploitation et PROPCO pour les murs tirera des enseignements de cette crise du COVID-19. On peut prédire l’intégration de la valeur murs + fonds, et ainsi le recours plus fréquent à des managers issus d’opérateurs hôteliers traditionnels, ou du third party management.
L’immobilier d’exploitation, qui crée de la valeur sur un actif par son exploitation, restera sans aucun doute attractif dans les prochaines décennies. Son modèle revisité est encore tout jeune et il ne tardera pas à entrer dans la force de l’âge.