
A l’heure des nouvelles technologies, l’ordinateur constitue un outil de travail indispensable et il arrive qu’il soit parfois utilisé à des fins extra professionnelles par des salariés peu scrupuleux. Comment l’employeur peut-il légalement réagir par rapport à des dérives fréquemment constatées et préjudiciables à l’entreprise ?
L’arrêt Nikon précise que “le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée. Celle-ci implique en particulier le secret des correspondances. Dès lors, l’employeur ne peut prendre connaissance des messages personnels émis par des salariés et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail, sans commettre une violation de cette liberté fondamentale” (décision chambre sociale de la Cour de cassation du 2 octobre 2002).En conséquence, le salarié commet bien une faute grave dés lors que l’employeur prouve qu’il était le seul à avoir accès au poste informatique et qu’il s’est connecté sur le réseau Internet plusieurs heures par jour durant le travail, sans pouvoir justifier l’usage professionnel.Depuis cette jurisprudence très protectrice, la Haute Cour de justice a corrigé les règles en matière de respect de la vie privée du salarié mais également sur la protection des données informatiques de l’entreprise. Dans une décision rendue le 10 juin 2008 par la chambre sociale de la Cour de cassation (n°06-19229), les Hauts magistrats ont rappelé : _ • en premier lieu qu’en application de l’article 9 du Code civil, tout salarié a droit au respect de sa vie privée et que les investigations et recherches de l’employeur devaient respecter la vie personnelle du salarié. _ • mais en second lieu, que le respect de la vie personnelle du salarié ne constitue pas un obstacle aux mesures ordonnées par le juge, en application de l’article 145 du Code de procédure civile.En l’espèce, un employeur suspectant un salarié d’actes de concurrence déloyale, obtient du Président du tribunal de commerce une ordonnance de référé autorisant un huissier de justice à accéder aux fichiers informatiques non expressément référencés comme personnels par la salarié contenues dans l’ordinateur de l’entreprise mis à sa disposition.Selon les Hauts magistrats, la mission confiée à l’huissier de justice de prendre copie " en présence du salarié ou celle-ci dûment appelé et aux conditions définies par le jugement confirmé du tribunal du commerce, des messages échangés avec des personnes identifiées comme étant susceptibles d’être concernées par les faits de concurrence soupçonnés " était nécessaire à la protection des droits de l’employeur.Dans une autre affaire, la chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé, une décision rendue par une Cour d’appel concernant le licenciement pour faute grave d’un salarié qui, un mois donné, avait passé, à des fins non-professionnelles, plusieurs heures sur le site Internet à partir de l’ordinateur de l’entreprise (arrêt du 18 mars 2009 n°07-44247)Les Hauts magistrats estiment que le licenciement pour faute grave est justifié dès lors que l’employeur apporte la preuve que son salarié a usé abusivement de la connexion Internet de l’entreprise, à des fins personnelles durant une période non raisonnable.En l’espèce, l’employeur avait constaté sur les relevés de connexion au réseau Internet à partit de l’outil informatique mis à la disposition du salarié dans un bureau individuel, que durant plusieurs mois, des connexions très fréquentes avaient lieu, parfois plusieurs fois par jour pour des durées très longues (durée totale d’environ 41 heures dans le mois, soit environ 2 heures par jour de présence dans l’entreprise).L’employeur a également démontré au juge du fond que l’historique des connexions au web avait été effacé de manière intentionnelle, le privant de la possibilité de contrôler l’usage qui avait été fait de l’ordinateur. Pour l’employeur, le fait que le salarié avait volontairement effacé toutes les traces de connexion, son comportement rendait impossible son maintien dans l’entreprise puisqu’il estimait que les connexions avaient un caractère exclusivement privé.En conséquence, le salarié commet bien une faute grave dés lors que l’employeur prouve qu’il était le seul à avoir accès au poste informatique et qu’il s’est connecté sur le réseau Internet plusieurs heures par jour durant le travail, sans pouvoir justifier l’usage professionnel.