Entretien avec Fabrice Collet, CEO B&B Hôtels, 11ème opérateur hôtelier européen au 1er janvier 2020 (classement Hospitality ON).
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Je suis le président des Hôtels B&B. J’ai 49 ans et suis le père de quatre enfants. Je travaille chez B&B depuis 8 ans. J’ai un long passé hôtelier car mes parents étaient hôteliers et j’ai grandi dans un hôtel. Cela m’a appris ce qu’était ce métier exigeant, ses difficultés et ses joies.
Quand on m’a proposé de rejoindre B&B, j’ai su que j’allais retrouver les origines et ce que j’avais aimé.
Qui sont vos modèles et mentors ?
J’ai eu la chance d’avoir été entrainé et poussé par de nombreuses personnes qui ont cru en moi et m’ont aidé à me développer. Parmi lesquelles chez Arthur Andersen, Vincent Fesquet. Philippe Bernard alors président d’Elis quand j’y travaillais et qui m’a beaucoup aidé. J’ai ensuite fait un long parcours aux côtés de Bertrand Dumazy alors patron d’Edenred. Enfin ces dernières années, une rencontre extraordinaire avec Georges Sampeur qui m’a aidé, encouragé et permis d’être là où je suis aujourd’hui.
Quel est l’ADN de B&B ? Quels sont les facteurs qui ont conduit le groupe là où il se trouve aujourd’hui ?
Il y a beaucoup de caractéristiques qui font le succès de B&B. dans un premier lieu, une forme d’optimisme et d’enthousiasme. Nous avons chez B&B un esprit d’enfant à croire encore que tout est possible et qu’il suffit de vouloir pour pouvoir.
Nous avons également quelques formules magiques, nous sommes des entrepreneurs. Actionnaires de notre entreprise que nous considérons comme la nôtre. Nos hôteliers eux-mêmes sont des entrepreneurs, nous en avons beaucoup parlé, nous avons beaucoup communiqué à ce sujet. C’est une qualité essentielle pour nous, elle se traduit par la manière dont on regarde à chaque fois cette entreprise, la manière dont nous sentons systématiquement que c’est la nôtre et que nous en sommes responsables. Elle se traduit également dans la manière dont on parle à nos clients en nous rappelant à chaque instant que nous sommes là pour les servir et que ce sont eux qui nous nourrissent et qui font notre succès.
Il y a également l’humilité, la conscience du fait que nous faisons un métier simple, de l’hôtellerie économique. Nous n’avons pas de projection d’égo vers le luxe, nous nous contentons de vouloir apporter tous les jours à nos clients une solution simple et efficace pour des courts séjours et de le faire avec constance et efficacité.
La décentralisation a également été clé dans notre succès ces dernières années. Nous avons chez B&B fortement conscience que nos clients sont allemands en Allemagne ou encore polonais en Pologne pour leur grande majorité et que l’on doit leur apporter une solution qui est allemande pour nos clients allemands, polonaise pour nos clients polonais, etc. Cela n’est possible que si les centres de décision au service des hôteliers sont proches d’eux. La présence de supports locaux dans chaque pays est absolument essentielle et nous a permis d’éviter beaucoup d’écueils auxquels d’autres peuvent être confrontés. Nous avons donc des produits qui sont très spécifiques d’un pays à l’autre. Ils répondent aux mêmes besoins, mais le font à la manière de chaque pays.
Une aide aussi pour le lien avec les investisseurs, cette proximité sur le terrain ?
Sur le développement, il y a quelques acteurs centraux en Europe dont le plus connu est Covivio avec qui nous faisons beaucoup de choses qui sont très déployées à l’étranger. Toutefois, le marché du développement est resté extraordinairement local. A ce jour je ne connais pas d’acteur qui soit capable de financer dans 14 pays depuis la France. Nous sommes bien sûr amenés à développer des partenariats locaux avec des dizaines d’acteurs dans une dizaine de pays. Cela est possible, car nous sommes locaux et que nous sommes au contact de ces pays avec des centres de décision locaux.
L’arrivée récente de Goldman Sachs, selon les éléments que vous avez partagés avec nous au Paris Asset Forum >hospitality, va vous permettre d’accélérer. Quelles sont vos destinations prioritaires et pourquoi ?
Cette accélération dépend avant tout de nous. Nous avons avec Goldman Sachs des actionnaires qui sont là pour nous aider à faire ce que nous faisons déjà depuis des années. Ouvrir un hôtel par semaine, et si possible d’avantage, racheter des petites chaînes d’hôtels, construire des hôtels. En dehors du développement « classique », ils sont là pour nous aider à trouver des opportunités intéressantes et bien construites via le développement par croissance externe. Ils sont très motivés et en ont évidemment les moyens. D’un point de vue géographique, nous allons d’abord essayer de rester prêts de nos bases. Nous n’allons pas nous perdre dans des destinations que l’on ne connaît pas. Nous sommes aujourd’hui en Europe et regardons ce qui se passe en Europe aujourd’hui. Nous sommes au Brésil et allons poursuivre notre développement en Amérique latine.
Nous commençons également à étudier des destinations où nous ne sommes pas actuellement présents, mais avec lesquelles nous avons quelques familiarités, car nous les étudions depuis un moment comme le Moyen-Orient et l’Asie.
Quelques ouvertures marquantes prévues dans les prochaines années ?
C’est compliqué pour nous de répondre à cette question. Chaque ouverture est marquante pour B&B.
Nous ouvrons prochainement un établissement à Cortina d’Ampezzo en Italie, également deux établissements en centre-ville de Florence dont un à proximité immédiate du Ponte Vecchio, un très bel emplacement.
En Allemagne, nous allons ouvrir un très grand hôtel dans le centre de Hambourg. Nous allons continuer à ouvrir dans des destinations urbaines secondaires pour continuer de mailler notre réseau.
Nous attendons également l’ouverture de notre premier établissement en Hongrie à Budapest.
En France, nous continuons à mailler le terrain de manière systématique. Notamment dans les prochains mois, nous allons renforcer notre présence dans les Hauts de Seine.
Nous ouvrons également de beaux établissements du côté de Lisbonne. Nous continuons à nous renforcer en Espagne. Nous venons d’ouvrir un établissement de 14 étages au Brésil dans le centre de Sao Paulo.
Quoi qu’il en soit, nous ouvrons un établissement par semaine, nous ouvrons partout et chaque hôtel a son importance.
En France en 2020, nous ouvrirons entre 20 et 30 établissements, en 2021 ce ne sera pas d’avantage.
Selon vous à quoi ressemblera l’hospitality à l’avenir ?
Quelques réflexions me viennent à l’esprit.
Nous voyons de plus en plus se dessiner un monde où il y a deux besoins hôteliers. Un besoin d’expérience, fêter un anniversaire de mariage, partir avec des amis dans ce cas, on va rechercher des hôtels très spécifiques et pointus qui vont résonner avec quelque chose que l’on a dans le cœur. Il y a aussi un besoin de commodité avec la nécessité d’un service simple, efficace et fluide. Chez B&B nous répondons plus au second besoin qu’au premier.
Je pense que cette distinction se fait de plus en plus de manière forte et typée.
Nous évoluons de plus en plus vers la personnalisation. Pour le haut de gamme, on peut se dire qu’il y a une quantité de services disponibles dans un hôtel, on peut accéder à 400 services simultanément et cela se justifie par le prix. Pour ces établissements d’entrée de gamme comme chez nous, nous allons au contraire réfléchir à des clients robots à qui l’on va pouvoir proposer une quinzaine de services en moyenne. Tout cela permet bien sûr d’offrir des prix beaucoup plus contractés et intéressants pour le client. L’inconvénient de ce que nous faisons, c’est que même si nous sommes bons, ce client moyen n’existe pas et tout le monde a besoin de service, mais pas tous les mêmes. Plus le temps passe, plus nous allons apprendre à mieux connaître nos clients et plus nous pourrons leur proposer des services sur-mesure. Nous pourrons proposer parmi tous les services possibles et imaginables dans l’hôtellerie la quinzaine de services dont ils ont vraiment besoin un soir donné pour un prix juste.
La personnalisation peut être quelque chose d’extraordinaire qui va arriver dans les prochaines années.