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Entretien avec Jean-Pierre Pinheiro Directeur France et Luxembourg de Turismo de Portugal qui partage les actions mises en oeuvre par la destination. Le Portugal a été le premier territoire touristique à mettre en place une charte d'engagement sanitaire, quelles seront ses prochaines démarches ?

Quel est votre parcours ?

J’ai fait une formation dans le tourisme puisque j’avais déjà pour objectif de travailler dans ce domaine. J’ai donc suivi une spécialisation en Marketing Touristique, puis je suis rentré à l’IREST (L’Institut de Recherches et d’Études Supérieures du Tourisme) à la Sorbonne où j’ai fini mes études avec une spécialisation dans la politique de développement touristique, l’aménagement du territoire et le marketing.

Je suis passé par le privé, notamment par de l’hôtellerie. J’ai travaillé pour la Fédération des Logis de France à Paris. Et je suis très vite rentré à l’Office de Tourisme du Portugal – cela fait maintenant 20 ans que j’y suis et une petite dizaine d’années que j’en ai pris la direction.

Vous avez été la première destination à lancer une charte d’engagement sanitaire. Pouvez-vous nous expliquer la genèse de cette démarche ?

Nous nous sommes rendus compte très vite que c’était l’une des notions fondamentales pour aider à la reprise du tourisme au Portugal. Je fais référence ici aux études qui ont été lancées pendant le confinement auprès des consommateurs. La notion de la sécurité sanitaire revenait en premier plan. Nous avons très vite compris qu’il était important et urgent de préparer la destination afin que les clients se sentent rassurés et puissent revenir le plus tôt possible. Nous avons travaillé très rapidement avec les hôtels, les restaurants, les cafés, les entreprises d’animation touristique ou encore les musées. Nous avons lancé ce label « Clean and Safe » avec des critères très spécifiques qui ont été d’ailleurs définis en accord avec les autorités sanitaires portugaises et les préconisations de l’OMS de manière plus globale.

Dans un premier temps, nous avons fait une campagne de sensibilisation auprès des professionnels (des hôteliers, des restaurateurs, des cafés). Nous avons été capables de lancer le label assez tôt, ce qui nous a amenés effectivement à être les premiers à le faire.

Aujourd’hui, nous avons plus de 10.000 entreprises et entités qui ont adhéré à ce label. C’est un véritable succès, car le message est véritablement important pour la destination. Nous sommes prêts : toutes les mesures sont prises en compte pour recevoir à nouveau les touristes en toute sécurité.

Vous avez dit 10.000 entreprises du secteur inscrites dans cette démarche de labellisation. Sur combien de professionnels au Portugal ?

Aujourd’hui, sur l’ensemble du secteur, nous sommes à au moins 70% de l’offre qui suit ce programme. Il y a eu une belle réaction et une réactivité de la part des professionnels du tourisme. C’est aussi dans leur intérêt puisque ceux qui le mettent en place le plus tôt possible pourront bénéficier du retour plus rapide de la confiance des touristes.

Comment se déroule à l’instant où nous nous parlons [le 19 juin au Portugal] la réouverture des frontières ?

Ce qui était très important pour nous, c’était que cette reprise soit accompagnée d’une reprise des opérations du transport aérien et du tour operating. Rouvrir les frontières, c’est une bonne chose mais s’il n’y a pas d’offre qui permet aux touristes français d’accéder au Portugal, c’est moins intéressant.

Nous avons veillé à ce qu’un minimum d’opération soit garanti pour assurer le transport vers la destination. La grande majorité des compagnies aériennes qui desservaient le Portugal avant la crise se sont remises en opération en quantité raisonnable et suffisante pour permettre de répondre à la demande – celle-ci est évidemment croissante et va se faire lentement.

Sur la plupart des plateformes de réservation, que ce soit les réservations d’hôtels ou de transports aériens, le Portugal est cité dans le top 3 des destinations les plus demandées depuis une quinzaine de jours – principalement depuis le discours du président Macron et l’annonce de la réouverture des frontières.

Le Portugal étant dans le trio de tête avec l’Espagne et la Grèce. Ce sont les trois destinations qui sont le plus demandées, évidemment à des volumes qui sont bien en dessous de la normale en cette période de l’année. Nous sommes autour de 20% du volume habituel. Mais cela est déjà positif puisque nous avons tous conscience que les français vont principalement rester en France. D’ailleurs tout est fait pour au niveau de la communication des institutions, des régions françaises, d’Atout France, des autorités et du gouvernement qui passent le message pour que le français reste en France cet été.

Nous pensions donc que la reprise vers l’étranger allait se faire bien plus tard. Mais nous avons cette bonne et agréable surprise de voir que finalement il y a quand même des français qui sont en train de réserver leurs vacances à l’étranger.

Quel est le dispositif mis en œuvre par la destination Portugal ?

Dans la phase de confinement, nous n’avons pas arrêté de communiquer. C’était important de continuer à avoir une prise de parole. Le message n’allait pas dans le sens de la promotion car cela n’aurait pas été bien vu par la clientèle.

Nous avons fait une campagne plutôt inspirationnelle où nous invitions les gens à rester chez eux. Mais rester chez soi, c’est une chose en continuant à rêver et à penser aux futures vacances. Nous disions : « Rester en France. Rester chez vous mais continuez de rêver et ne perdez pas espoir ». C’était d’ailleurs le thème de cette campagne : de garder l’espoir. Ensuite, nous avons lancé une autre campagne où nous invitions les français à lire ou à découvrir le Portugal par le biais des auteurs et de leur littérature portugaise. Cette campagne « Lisez le Portugal » était une adaptation de « Visitez le Portugal ».

Depuis la réouverture des frontières, nous avons lancé une nouvelle campagne qui est sur la réouverture de la destination, dans l’optique de la promotion. Parallèlement, nous avons commencé à lancer des campagnes de promotion, de ventes et de marketing avec les tours opérateurs partenaires et les compagnies aériennes.

Nous allons être dans une communication pour les dernières minutes de l’été, mais aussi pour la rentrée. Nous avons conscience que cela va démarrer progressivement et nous comptons beaucoup sur l’arrière-saison. Nous espérons pouvoir reprendre de l’activité en septembre, octobre, novembre, l’hiver 20/21 et même le printemps 2021.

Et en termes de budget ?

Globalement, le budget sur le marché français (entre la campagne institutionnelle, les campagnes co-brandées avec les tour-opérateurs et les compagnies aériennes), nous sommes autour des 2 millions d’euros. C’est à la fois une campagne essentiellement sur les réseaux sociaux et une campagne co-brandée qui est beaucoup plus diversifiée en termes de types de supports.

Et les retombées ? Les gens sont-ils réceptifs ?

La campagne lancée pendant la période du confinement a eu un beau succès. Nous avons là aussi été parmi les premiers à lancer cette communication « Restez chez vous ». Cela a été repris par beaucoup d’offices de tourisme parce que c’était normal – personne ne voulait communiquer sur la promotion et personne n’avait envie de dire « Venez chez nous » pendant le confinement. La campagne sur le label « Clean and Safe » a eu aussi eu un très beau retour du public et de la presse qui ont très vite réagit à ce lancement de label.

Quelles sont les prochaines étapes pour vous en termes d’accompagnement et de promotion ?

Nous allons lancer les campagnes conjointes avec les partenaires tour-opérateurs. La plupart d’entre eux préfèrent attendre la rentrée parce qu’ils estiment que l’été sera un peu compliqué et certains vont se concentrer sur la France. Beaucoup souhaitent attendre et voir comment les choses vont évoluer et pensent que septembre-octobre serait plus propice. La machine sera mieux lancée puisqu’aujourd’hui la capacité aérienne est telle qu’elle devrait pouvoir répondre à la demande croissante.

À la rigueur, nous avons presque envie de dire que vu la capacité aérienne qu’il y a aujourd’hui cela devrait se remplir tellement vite que la communication ne sera presque pas utile. Il faut rappeler que nous avons aussi une particularité sur le marché français, c’est qu’il y a beaucoup de portugais. Nous sommes plus d’un million et demi entre les portugais résidant et travaillant en France, mais aussi cette génération de descendants de portugais qui ont aujourd’hui la nationalité française. Nous savons qu’en juillet-août, il y aura cette communauté portugaise qui va aller au Portugal et remplir les vols.

D’ailleurs, nous avons lancé une campagne de communication qui est spécifiquement dédiée au marché interne afin de les convier au Portugal cet été – cette campagne s’étant élargie à la communauté portugaise vivant à l’étranger.

En dehors des clientèles françaises et lusodescendants, quelles sont les clientèles que vous visez ?

Les principaux marchés sont par ordre : l’Espagne qui est notre premier marché en termes de volumes de touristes. Puis l’Angleterre vient juste après. Ils sont quand même plus de 4 millions de visiteurs par an. En troisième position vient la France avec 3,2 millions de français chaque année, juste devant le marché allemand avec un petit peu moins de 3 millions.

Pour le marché anglais, il y a cette problématique de réouverture des frontières et de quarantaine. C’est l’inconnu. Honnêtement, nous ne savons pas encore comment va réagir la clientèle britannique. Nous pensons que la clientèle française, espagnole et allemande reviendra plus rapidement en nombre que l’anglaise mais peut-être que je me trompe.

Nous sommes également persuadés que la clientèle city break, court séjour et les couples reviendront plus rapidement et plus facilement au Portugal. Les familles restent très fortement liées à la période de vacances scolaires. Il est fort probable qu’elles ne reviennent pas en nombre cet été et qu’elles restent plus en France pour des raisons de sécurité ou pour des retrouvailles avec la famille. En revanche, les groupes de tourisme d’affaires restent segmentés et le tourisme seniors en groupes reviendra beaucoup plus tard dans l’année.

C’est aussi l’inconnu pour septembre car tous les voyages scolaires sont arrêtés. Il est probable que les académies et les écoles ferment complétement les voyages à l’étranger jusqu’à la fin de l’année 2020.

Pour toute information sur la situation sanitaire et les conditions aux aéroports, n’hésitez pas à aller voir sur le site www.visitportugal.com. C’est important de rappeler qu’il n’y a pas de restriction en termes d’obligation de test aux frontières continentales. C’est tout à fait libre. Le Portugal attend avec impatience de nombreux visiteurs.

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