
La tendance des hôtels éphémères a gagné du terrain au cours des deux dernières années, et l’engouement pour ces établissements mobiles, respectueux de l’environnement et installés dans des sites originaux, ne cesse d’augmenter. Souvent constitués d’anciens containers et de tentes, ils compensent la simplicité de leur esthétisme par leurs emplacements, dans des endroits inaccessibles aux hôtels traditionnels.
Les hôtels éphémères créés à partir d'anciens containeurs ou de tentes ont fait leur apparition dans des pays comme la Belgique, la Chine, les Etats-Unis, la France, ou plus récemment le Sri Lanka. Ce type d'établissements a été baptisé hôtels pop-up en référence à leur transportabilité et leur modularité, un containeur pouvant être installé et désinstallé rapidement, et à volonté, dans des endroits inaccessibles aux hôtels traditionnels. Le concept des hôtels pop-up fait rêver en sortant des frontières de l'hôtellerie traditionnelle, mais cela suffit-il pour vendre un simple containeurs comme un hôtel de luxe ? L'idée des hôtels pop-up est née au sein de la société britannique homonyme, The Pop-up Hotel, en 2011, avec l'objectif de proposer quelques logements temporaires sur le site du festival de musique de Glastonbury. Depuis, Pop-Up Hotel a fait du chemin, étant passé de 20 à 130 chambres proposées sur les lieux, toutes réservées, et le concept s'est exporté à l'international, avec l'apparition de plusieurs initiatives similaires comme Belgian Sleeping Around, English Snoozebox, ou encore Danish Pink Cloud. Les opérateurs d'hôtels éphémères réalisent des prouesses d'un point de vue marketing, pour arriver à vendre des containeurs, des tentes, des yourtes et autres cabanes comme des hébergements haut de gamme et luxe. Les chambres de Pop-Up Hotel sont ainsi proposées à partir de 1 146 euros la nuit, celle de Sleeping Around à partir de 149 euros, et celles de Pink Cloud à partir de 100 euros, soit loin des gammes de prix opérées dans les auberges de jeunesse. La question qui se pose alors est de savoir comment les opérateurs d'hôtels pop-up arrivent à compenser la fragilité de la toile, la modestie du plastique et l'austérité des murs métalliques. Où aucun hôtel n'est jamais allé Selon Mark Sorrill, fondateur de Pop-Up Hotel, les établissements éphémères ne sont pas si éloignés du concept de l'hôtellerie traditionnelle, consistant en "une série de boxes empilés les uns sur les autres et offrant un cadre de nuit intime aux clients". L'empilement de containeurs n'est en effet pas incompatible avec la mise en place de services hôteliers : concierges, portiers, ou encore restaurant, bar et spa. Pour Mark Sorrill, les hôtels pop-up sont ainsi en mesure de donner plus de valeur à l'expérience hôtelière en élevant le concept boutique à un autre niveau : "un hôtel pop-up offre des services similaires de ceux de l'hôtellerie traditionnelle mais en connectant directement le client à l'environnement spécial qui l'entoure". Le fondateur du concept a par exemple installé un établissement éphémère sur les pelouses de la Osborne Estate, un bâtiment du 19e siècle faisant office de résidence d'été pour la reine Victoria et le Prince Albert. Les opérateurs d'hôtels pop-up justifient ainsi leur positionnement luxe et haut de gamme par l'originalité et la diversité de leurs emplacements, ainsi que par la qualité des services proposés qui se rapprochent de ceux de l'hôtellerie traditionnelle. Sur la vague du respect de l'écologieSpleeping Around, la traduction belge du concept, recycle également des containeurs d'expédition mais se positionne davantage sur le marché de niche des hôtels boutique. La capacité de ses établissements éphémères est ainsi plus restreinte que celles de Pop-Up Hotel, avec seulement six containeurs par installation : quatre pour les chambres, un pour les petits-déjeuners et le salon, et un pour le spa. En plus de ces infrastructures, offrant toutes une vue dégagée sur le site choisi, le concept mise sur son aspect écologique, avec l'utilisation de matériaux respectueux de l'environnement. Actuellement, l'établissement éphémère est installé sur les quais d'Anvers et sa prochaine destination devra répondre aux critères suivants : une surface de 400 mètres carrés, avec une vue remarquable, un accès à l'eau potable et à l'électricité, et la possibilité d'y amener un camion pour l'installation. La société mise sur l'individualité du concept, une expérience client diversifiée et son aspect écologique pour vendre ses installations éphémères. Ce type d'établissements surfe sur la tendance actuelle de la proximité avec l'environnement et du glamping : "l'hôtel pop-up combine le romantisme et le plaisir du camping au confort de l'hôtellerie de charme", résume Mark Sorrill. L'environnement est un atout pour l'industrie du luxe et il faut le mettre en valeur autant que possible. Un concept sur-mesure Le cabinet danois d'architecture Pink Cloud a développé son propre concept d'hôtel pop-up plus tardivement, en envisageant d'installer des hôtels temporaires dans des immeubles de bureaux vides. L'objectif est double : équilibrer le rapport entre l'offre et la demande de chambres d'une destination rapidement, et permettre aux propriétaires de tirer profit de leurs bâtiments inoccupés. Selon Eric Tan, fondateur associé de Pink Cloud avec Leon Lai et Schlapps Nico, le montage de ce type d'établissement ne prend que deux à quatre semaines au lieu de cinq à six ans pour un hôtel traditionnel, et tous les éléments tiennent dans un seul camion, soit 36 boxes pour les chambres, le night-club, le restaurant et même la piscine. Leon Lai précise que ces installations sont parfaitement adaptables à la ville où s'établit d'hôtel, que ce soit pour l'ajout d'une piscine à Miami ou d'un ring de boxe à Manhattan : "tout dépend de la ville d'accueil et du public ciblé". Le groupe travaille actuellement sur la semaine de la mode de New York avec des marques de luxe comme Prada et Diesel. Bien que le concept d'hôtels éphémères semble à première vue être plus adapté au marché des auberges de jeunesses et de l'hôtellerie économique pour l'aspect bon marché de ses installations, les opérateurs ont prouvé leur capacité à se positionner sur un segment plus luxe et haut de gamme. Ils arrivent à séduire une clientèle habituée aux établissements parmi les plus étoilés via la mise en place de services personnalisés dignes de l'hôtellerie haut de gamme et l'originalité de l'expérience proposée. "Tout est une question d'expérience du client, et pas uniquement de qualité de la literie", conclu Mark Sorrill.