• Depuis 2007, la ville de Reims s’est développée, dynamisée par l’arrivée du TGV. Son parc s’est agrandi et le centre ville se prépare à accueillir sa première ligne de tramway. • Le seul point noir : de nombreux acteurs du tourisme s’interrogent sur la politique touristique. Pour certains, elle est tout simplement inexistante, pour d’autres, elle manque de concertation et de visibilité. • Alors, entre un grand nombre de projets hôteliers et des professionnels qui espèrent une meilleure gestion de la promotion et de l’évènementiel, Reims cherche sa route afin de valoriser au mieux ses atouts, et ce à quelques mois du 800e anniversaire de sa célèbre cathédrale.
Après l’arrivée du TGV Est Européen en juin 2007, qui a placé Reims à 45 min de Paris et à 30 min de l'aéroport Roissy Charles de Gaulle, la ville continue sa transformation. La même année, elle a réaménagé le parvis de sa célèbre cathédrale et, depuis, elle s’est lancée dans de grands travaux, dans le cadre du projet Reims 2020. A la rentrée, elle a aussi accueilli un nouveau campus de Sciences Po, qui participe à cette nouvelle dynamique. La prochaine étape, et pas des moindres : l’arrivée du tramway en avril (voir encadré). Les hôteliers attendent la fin de ces travaux avec impatience. “Depuis deux ans, le centre ville est complètement chamboulé. Certains établissements se sont retrouvés isolés, et il est devenu difficile d’orienter les clients alors que les passages changent tous les jours. Alors nous sommes ravis d'en voir le bout. Et nous espérons que ce nouveau tramway aura pour nous des retombées positives”, affirme Antoine Renardias, président du club hôtelier.“Mes hôtels, tous deux en centre-ville, souffrent quelque peu de l’absence des Anglais, qui est la plus importante clientèle étrangère pour nous. Mais pour l’instant nos établissements, comme les autres à Reims, se maintiennent à des taux d’occupation corrects. Pour développer notre activité, il nous manque une politique touristique à moyen et long terme. Nous perdons du temps ! Il faut à tout prix se décider à mettre les bonnes personnes aux bons postes, afin de faire avancer les choses. Car aujourd’hui, Reims souffre d’un gros déficit d’image. Quant aux différents projets hôteliers des promoteurs, il y en a de plus ou moins farfelus… Je ne suis pas convaincu, par exemple, que nous ayons besoin d’un gros porteur sur le site du Sernam (NDLR : derrière la gare centrale). Le parc a déjà augmenté sa capacité ses derniers temps, et le marché est en récession… Il faut donc être prudent dans le choix des projets.”Et après le tram, ce sera aux travaux de contournement de la ville par l'autoroute A4 de s’achever. “Le reclassement de la portion d'autoroute actuelle, qui passe aujourd'hui le long du centre des congrès, permettra d'aménager en centre ville la Coulée Verte, un espace de 650 hectares non urbanisé qui traverse la ville, bordant la Vesle et le canal, où seront implantés de nouveaux lieux de détente et de loisirs”, se réjouit Claude Fath, le directeur du centre des congrès. Quant à la pénétrante, il avait un temps été question de la supprimer, mais la ville a abandonné l’idée. “En tout cas, Reims est dans un cercle vertueux. Elle évolue à grands pas”, souligne Claude Fath. Et tout ceci génère business et image.Quant au parc hôtelier, lui aussi n’a de cesse de progresser, tant en qualité qu’en quantité. En comptant la prochaine ouverture, 181 chambres supplémentaires sont venues enrichir le parc depuis 2009. Cette année là, l’hôtel Continental 3* s’est doté de 10 nouvelles chambres et un Suite Novotel 3* de 80 chambres a ouvert ses portes à proximité de la gare TGV Reims Centre. Et en 2011, un nouveau B&B proposera 91 chambres en 2*, en face de la Gare TGV Champagne-Ardenne, au pied du tramway, à proximité de la sortie "Gare TGV" et du nouveau tracé de l’autoroute A4. Parallèlement, de nombreuses rénovations ont été engagées. Parmi elles, celle de l’Hôtel de la Paix, le premier hôtel référencé Eco-label en région Champagne-Ardenne. Après avoir rénové 35 chambres il s’est doté en 2008 de 75 chambres supplémentaires en 3 étoiles+, devenant le plus grand établissement de la région (169 chambres). Mais pour la mairie, cela ne suffit pas.“Il nous manque des 4 étoiles, et un gros porteur pour fonctionner avec le centre des congrès, qui ne cesse de développer son activité. Une douzaine d’ouvertures sont en projet dans la ville, et la moitié d’entre elles semble très bien engagée”, insiste l'hôtel de ville. En plus du B&B, dont l’ouverture est imminente, Reims pourrait accueillir un gros porteur sur le site de Renault à côté du Centre des Congrès (en 2014), 2 résidences hôtelières, un Best Hôtel en périphérie, un hôtel dans l’ancienne caserne Jeanne d’arc, un derrière la gare centrale et un autre le long de la promenade, à proximité de la gare du centre ville (entre 2014 et 2017), un hôtel 4* de 80 chambres dans l’ancienne caserne des pompiers face à la cathédrale (dont la mairie devrait bientôt annoncer l’opérateur), un hôtel Najeti à quelques kilomètres de Reims (annoncé depuis 2 ans mais pour l’instant en stand by)… Tous ces projets sont à des stades plus ou moins avancés et leur nombre inquiète le club hôtelier. Pour son président, Antoine Renardias, “nous avons un parc très complet et le TO pour la ville est de 60%. Cela ne justifie donc pas un grand nombre d’ouvertures. D’ailleurs, des études très complètes réalisées par MKG nous l’ont confirmé. Nous ne sommes pas contre l’arrivée de nouveaux hôtels, mais il faut les digérer ! Et là, les projets nous semblent vraiment nombreux… Surtout que nous ne voyons pas de quelle manière, par sa politique, la ville compte les accompagner. Il faudrait déjà que la mairie crée d’avantage de produits touristiques, notamment autour de la cathédrale et du champagne”.Car concernant le Champagne, l’un des atouts majeurs de la ville, les choses se sont un peu compliquées il y a deux ans, avec la fermeture des caves Piper-Heidsieck en centre ville. Ouvertes 7 jours sur 7 et pouvant accueillir jusqu'à 400 personnes/jour de mars à décembre, elles avaient reçu 62.000 visiteurs en 2006, se classant au deuxième rang des plus fréquentées à Reims. “Elles attiraient beaucoup de monde et leur capacité d’accueil nous manque. Il serait bon chose que la ville se lance dans la création d‘un musée racontant l’histoire du champagne”, propose Antoine Renardias. “Nous y pensons bien sûr”, confie Jacques Cohen, adjoint au Tourisme à la mairie. “Mais nous ne pouvons pas financer seuls un tel projet et pour l’instant, les différentes maisons ne sont pas parvenues à trouver un accord. Chacun se dit que ça servira surtout aux autres… Résultat : c’est le statu quo ! Alors que ce musée serait un produit d’appel de plus, grâce auquel toutes les caves mais aussi les petits musées alentours pourraient recevoir plus de monde”. En attendant, la ville se concentre sur l’autre atout majeur de la ville : la cathédrale.2011 marquera le 8ème centenaire de ce monument historique et Reims est bien décidé à capitaliser sur l’évènement. Du côté des hôteliers, tout le monde est dans l’attente puisque le programme n’a pas encore été annoncé. Mais à la mairie, les choses sont déjà en route. “Il y aura des concerts, des conférences, un concours de dessin, de nombreuses expositions, une bouteille de champagne dédiée à l’événement sera même créée par la Maison Taittinger… Et surtout, nous allons proposer 3 fois par soir, de mai à octobre au moins, un magnifique son et lumière sur le parvis de la cathédrale. Pour l’occasion, nos statues, si particulières dans leur mouvement, vont retrouver leurs couleurs d’antan”, se réjouit Jacques Cohen. “Les flèches qui étaient prévues mais n’ont jamais été construites seront même reconstituées en réalité augmentée… Cela promet un spectacle hors pair. Et avec la campagne de communication qui accompagnera cet évènement, nous espérons attirer un maximum de monde”.Et après le 8e centenaire, la mairie souhaite continuer d’organiser ce genre de spectacle, afin de valoriser sa cathédrale. Une nouvelle qui devrait ravir les hôteliers, souvent déçu que plus aucun évènement de ce genre ne soit organisé. Et en plus de ce son et lumière, l’autre élément qui sera mis en place pour le 8ème centenaire et dont Jacques Cohen n’est pas peu fier, c’est la présence d’une grue "cage à écureuil". “Il s’agit exactement de la même grue que celle qui était utilisée au Moyen-âge. Elle est en cours de construction. Nous ferons des démonstrations dans la ville. Et des personnes présenteront les métiers de l’époque”.Pour Reims, 2011 marquera aussi le temps du changement dans l’organisation de la politique touristique de la ville. Aujourd’hui, elle est gérée par trois organismes différents : la mairie, l’Office du tourisme et l’association Destination Reims. Ce qui génère quelques difficultés. Alors afin de “tous avancer dans le même sens”, comme l’explique Jacques Cohen, la mairie va “reprendre la main”. C’était annoncé depuis longtemps. L’année prochaine, ce devrait être fait. “Nous avons perdu du temps car nous voulions obtenir un consensus. Ce n’est visiblement pas possible”, regrette l’adjoint au Tourisme. “Nous allons maintenant très vite reprendre la main sur l’OT et fusionner avec Destination Reims. A l’Office, l’association actuelle devra laisser la place afin que nous impulsions une nouvelle dynamique. Seule l’entité Reims Evénements restera pour l’instant à part. Ce qui ne nous empêchera pas de travailler au développement du tourisme d’affaires”. Pour l’occasion, un nouveau point d’accueil commun à l’OT et à la Mairie devrait être aménagé sur le parvis de la gare “où nous accueillerons aussi bien les nouveaux Rémois que les touristes”, précise Jacques Cohen . Un nouveau site Internet est également actuellement en construction. 2011 devrait donc être l’année de toutes les nouveautés.La première ligne de tramway Les travaux entamés dans le centre de Reims touchent à leur fin, pour la plus grande joie des hôteliers. Parcourant la ville du Nord au Sud sur 11,2 km, la première ligne de tramway de Reims sera inaugurée le samedi 16 avril 2011 et mise en service le lundi 18 avril 2011.Elle sera la nouvelle colonne vertébrale des transports collectifs de l’agglomération rémoise. Conçues dans une logique de complémentarité, les correspondances avec les lignes de bus permettront d’optimiser le maillage du territoire.Cette première ligne de tramway de l’agglomération comptera 23 stations et desservira le CHU, mais aussi la gare TGV à Bezannes et la gare centrale, toutes les 6 minutes minimum. Les 18 rames très colorées dont l’identité visuelle a été imaginée par le designer Ruedi Baur circuleront de 5h30 à 0h30. 70 000 habitants seront ainsi desservis, soit près d’un tiers de la population de l’agglomération. Le coût de l’opération s’élève à environ 305 M€.Claude Fath, directeur de Reims Évènements, qui gère le Centre des congrès et le Parc des expositionsComment se porte votre activité ? _ L’industrie des rencontres professionnelles à Reims va bien. Nos sites accueillent en moyenne 200 manifestations par an et génèrent plus de 30 M€ de retombées économiques sur la ville et la région. En 2010, le Centre des congrès de Reims va enregistrer une progression de son chiffre d’affaires de 29 %. Cette croissance sera supérieure à 35 % sur les 3 dernières années malgré une conjoncture difficile. Et les trois quarts de nos manifestations sont d’ampleur nationale voire internationale. Ce qui est une très jolie performance pour un centre des congrès tel que le nôtre.A quoi attribuez-vous ces bons résultats ? _ Tout d’abord nous disposons d’une équipe d’une grande maturité. Et la ville s’inscrit dans un cercle vertueux. Le TGV l’a mise à trois quarts d’heure du centre de Paris et à 30 minutes de Roissy. Le parc hôtelier a évolué, tant en qualité qu’en capacité, de grands travaux ont été lancés pour embellir et réaménager la ville, notamment ceux du tram, qui passe maintenant sous nos fenêtres, et puis nous avons accueilli à Reims une nouvelle antenne de Sciences politique tournée vers l’Amérique du Nord… Tout cela participe à l’image de la ville et à son développement.Pensez-vous pouvoir encore doper votre activité ? _ Nous avons aujourd’hui atteint notre vitesse de croisière. Mais il nous reste du potentiel de développement. Nous pourrions accueillir d’avantage d’événements durant les saisons creuses, comme les vacances scolaires, et nous devons aussi consolider notre position sur l’international. Pour ce faire, nous avons d’ailleurs recruté un commercial senior qui rejoindra très bientôt notre équipe. En continuant à faire évoluer le profil de nos congrès vers des rendez-vous nationaux et internationaux, nous avons devant nous une belle marge de progression. Et nous avançons aussi sur le chemin du développement durable en multipliant nos efforts pour réduire l’empreinte environnementale de nos manifestations.L’hôtellerie rémoise sera-t-elle capable de vous accompagner dans ce développement ? _ Oui. D’ailleurs, le nombre de chambres a déjà augmenté. Et c’est une bonne chose pour nous. Surtout que le TO de la ville est relativement bon. L’agence de voyages que nous avons montée a signé une charte avec certains hôteliers et cet outil nous permet de garantir à tous l’hébergement recherché. Alors certes, plus nous allons développer les congrès nationaux et internationaux, et plus nous aurons besoin de capacité d’accueil en haut de gamme. Mais Reims est bien dotée en la matière et le marché va encore évoluer doucement. Je ne m’inquiète pas à ce sujet. Pas plus que face aux nombreux projets d’ouverture, dont on entend parfois parler car je ne me préoccupe que des projets dont l’aboutissement est garanti, et je trouve leur nombre raisonnable.Aurélie Colin, directrice hébergement à l’hôtel du Nord 2*“Notre hôtel de 50 chambres se situe dans l’hyper centre de Reims. Nous fonctionnons surtout avec du tourisme d’affaires, et notamment grâce à Reims Evénements. Le centre des congrès de la ville tourne bien, ce qui nous aide, ponctuellement, à remplir un bon nombre de chambres. Et leur volonté de développer leur activité nous conforte dans notre optimisme. Surtout qu’ils ne se contentent pas d’organiser des congrès et des séminaires. Ils sont aussi à l’origine de notre Festival de jazz, par exemple. Et puis à Reims, nos clients ne manquent pas d’activités touristiques. Entre les promenades à faire au centre ville, la cathédrale, la basilique, la dizaine de caves à découvrir à Reims et aux alentours, l’usine des célèbres biscuits roses à visiter à quelques kilomètres de là… Il y a vraiment de quoi s’occuper ! Et notre marché de Noël, qui va bientôt s’installer à nouveau à Reims, attire pour l’instant surtout des touristes locaux. Mais il commence à se faire connaître et devrait vite faire de décembre une très bonne période pour nous.”Messaline Mauget, réceptionniste au Grand Hôtel des Templiers 4*“L’hôtel est situé en plein centre ville et notre clientèle vient principalement pour son loisir. Elle est majoritairement étrangère. Nous accueillons beaucoup d’Anglais, des Américains, des Allemands… Mais aussi des Norvégiens ou encore des Suédois grâce aux nouvelles liaisons Champagne-Scandinavie mises en place par Ryanair au départ de l’aéroport Paris Vatry. Il est d’ailleurs dommage que la ligne vers Oslo soit supprimée durant l’hiver l’année prochaine. Nous espérons que d’autres lignes vont continuer de dynamiser le tourisme. Mais nous sommes déjà très satisfaits. Bien sûr, les travaux du tramway nous ont causé quelques difficultés, mais nous avons tout de même fait une bonne année. Meilleure même que les deux dernières. Et 2011 devrait aussi être une bonne période pour nous avec le 8ème centenaire de la cathédrale. Nous ne savons pas encore exactement ce qui va se passer, mais tout à l’air en bonne voie. ”Jean-Pierre Fourney, directeur du Mercure de Reims 3* Centre Cathédrale“Notre mix client se partage entre 53% de touristes de loisir, et 47% de touristes d’affaires. Globalement, je suis très positif au sujet de la destination Reims. Surtout que les travaux du tramway seront bientôt terminés, ce qui sera une très bonne chose pour l’hôtellerie du centre ville. Mais nous manquons de vrais commerciaux pour vendre la ville, et surtout d’une politique touristique écrite avec les différents acteurs. La nouvelle municipalité peut compter sur notre soutien pour faire avancer les choses. Mais aujourd’hui, elle ne nous concerte pas. Et je suis assez inquiet lorsque j’entends parler des différents projets hôteliers. Certes, la mairie, comme toutes les autres, voudrait développer l’activité du centre des congrès. Mais il tourne déjà bien et nous ne pourrons pas rivaliser avec les grandes destinations spécialisées sur ce marché. Or, en l’état actuel des choses, le parc hôtelier n’a pas besoin d’agrandir sa capacité. Et puis avant de construire des chambres supplémentaires, il faudrait créer davantage d’évènements, et puis un Musée sur le champagne et l’histoire. Nous avons de bonnes bases : une cathédrale, une basilique, une région réputée, des caves… mais aussi des rendez-vous tels que le week-end d’excellence automobile ou notre festival Flâneries musicales. Ca marche. Reste développer tout cela. A capitaliser sur nos acquis.”Marc Paradis, directeur du Holiday Inn Garden Court 3* Reims City Centre et de l’Holiday Inn Express 2* Reims, et président de Destination Reims